Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 11 octobre 2018 à 22h00
Création d'un répertoire des maladies rares ou orphelines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, Gauthier a six ans. Il est polyhandicapé du fait d'une maladie orpheline, la cytopathie mitochondriale. J'ai fait sa connaissance, il y a quelques jours, grâce aux pompiers de l'Hérault, à qui je veux rendre hommage ici, car ils avaient organisé, à Béziers, comme chaque année au début de l'automne, une soirée dont les profits étaient destinés à une « bonne oeuvre », comme on disait dans l'ancien monde. Cette année, la « bonne oeuvre » s'appelait Gauthier. Dans ses difficultés, Gauthier a de la chance : il a des parents merveilleux et courageux. Tous les quatre – Gauthier a un grand frère – habitent à Cazouls-lès-Béziers, dans ma circonscription. Lorsqu'ils ont compris que Gauthier était malade, ses parents sont allés à Montpellier pour savoir de quoi il souffrait. Mais, comme le diagnostic tardait à être établi, ils se sont finalement rendus à Paris, à l'IMAGINE, l'Institut des maladies génétiques de l'hôpital Necker, qui a pour mission de guérir les personnes souffrant d'une maladie génétique – un coup de chance, puisqu'ils avaient entendu parler de cet institut en regardant la télévision.

La proposition de loi déposée par nos collègues du groupe Les Républicains a du sens pour notre petit Gauthier – et je la voterai évidemment, si la majorité nous y autorise – , parce qu'elle peut permettre de changer le quotidien de sa famille comme de toutes les familles affectées par une maladie orpheline. Et le quotidien de ces familles n'est pas toujours facile, vous le savez. Je tiens à vous faire part de deux exemples concernant Gauthier.

Lorsqu'il était plus petit, Gauthier avait de réelles difficultés à se nourrir. Il est d'ailleurs aujourd'hui alimenté par gastrostomie. Mais il avait été administrativement identifié, catalogué, devrais-je dire, selon une certaine ALD – affection longue durée – , qui ne justifiait pas le remboursement de son alimentation. La sécurité sociale avait donc refusé à ses parents la prise en charge de ses poches de nourriture, allant même jusqu'à leur envoyer un huissier à leur domicile !

Autre exemple, lorsqu'il s'agit d'un enfant, le renouvellement des appareillages peut devenir un véritable parcours du combattant. Gauthier a besoin d'un corset-siège sur mesure et d'un verticalisateur pour lui permettre de se tenir debout à certains moments de la journée. Ces appareils sont entièrement remboursés dans le cadre de sa maladie. Mais, vous le savez, tous les enfants ne grandissent pas à la même vitesse. Gauthier a grandi rapidement dès lors qu'il a pu s'alimenter correctement ; il a rattrapé son retard en quelque sorte, et son corset est très vite devenu trop petit, lui causant une gêne importante. Malheureusement, il n'était pas « dans les dates », comme on dit, pour pouvoir le renouveler. Il existe, fort heureusement, la possibilité d'un renouvellement exceptionnel, et Gauthier a pu en bénéficier. Mais notre petit garçon a connu une seconde poussée de croissance, quelques mois plus tard, qui nécessite de changer à nouveau ses appareillages. Cette fois, la sécurité sociale a refusé la prise en charge, et Gauthier devra garder son corset inadapté jusqu'en janvier prochain ; c'est un crève-coeur pour ses parents.

La proposition de loi, qui vise à la création d'un répertoire des maladies rares et orphelines à destination des organismes publics et parapublics, est une bonne chose. Ce répertoire, qui a pour objectif de dresser la liste, pour chaque maladie, des dérogations à la réglementation du fait des effets de ces affections, devra prendre en compte ces cas trop souvent ignorés, qui, du fait de difficultés administratives supplémentaires, compliquent encore un peu plus le quotidien des familles.

L'exposé des motifs du texte explique également que seront déterminées les modalités d'enrichissement du répertoire, au vu de l'évolution de la médecine et des nouveaux cas concrets rencontrés par les personnes souffrant desdites affections. Les difficultés que j'ai mentionnées à l'instant devraient pouvoir être mentionnées dans ce répertoire, afin qu'il puisse servir, non seulement aux malades ou à leurs familles, mais également à l'administration, en lui permettant de réagir plus rapidement et plus efficacement lorsque des difficultés déjà identifiées sont portées à sa connaissance.

Pour toutes ces raisons, je voterai pour cette proposition loi – si vous nous y autorisez, je le répète encore une fois. Pour Gauthier et pour ses parents, et pour tous les autres, qui essaient de vivre dignement mais qui souffrent, non seulement dans leur corps mais aussi d'une incompréhension administrative, parfois très dure et très froide, due à des textes ne prenant que trop rarement en compte les cas particuliers, les cas singuliers. Pour information, le corset de Gauthier coûte 2 000 euros.

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