Intervention de Marie-Claude Picardat

Réunion du mardi 2 octobre 2018 à 11h00
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Marie-Claude Picardat, co-présidente de l'Association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL) :

Je vais m'attacher à faire valoir quelques principes.

S'agissant des propositions relatives à la protection de la deuxième mère, l'APGL souhaite que toutes les possibilités propices à la sécurisation des couples, des liens de filiation, donc des familles et des enfants, soient ouvertes. C'est notre credo : nous devons protéger les familles et les enfants.

Il va de soi que ne laisser au second parent, voire au troisième ou quatrième, la possibilité de ne devenir parent qu'après coup revient à placer les familles dans une période de suspens qui leur est préjudiciable. Je rappelle que les deux premières adoptions effectuées dans le cadre de la loi, à l'époque de l'ouverture, ont été obtenues de manière précipitée par deux couples de femmes. Dans le premier cas la mère, militaire, partait au front à l'étranger, au service de la France, donc vers une situation de danger. C'est pour cette raison que le juge a accéléré la procédure d'adoption du deuxième enfant – ce qui montre à quel point les familles doivent être protégées. Dans le second cas, l'adoption a été prononcée sur le lit de mort de la mère biologique, parce que le juge a précipité les choses afin de sécuriser la situation de l'enfant.

Aussi, afin d'éviter ce genre de situations, régulièrement rencontrées, demandons-nous la protection de la deuxième maman de façon extrêmement simple : en appliquant les règles de droit commun relatives à la filiation d'un enfant né par PMA – et ce sans aucune révolution juridique, simplement en ouvrant la possibilité de reconnaissance en mairie pour les couples non mariés.

Il faut ouvrir la présomption de paternité à une présomption de parenté, favoriser l'adoption simple en n'imposant pas que le parent non marié, par exemple dans les cas de coparentalité, puisse perdre son autorité parentale dans les cas où on a sécurisé les familles de cette manière-là. On pourrait également, car nous pensons également à toutes les familles qui n'ont pas pu bénéficier dans le passé de l'entrée en vigueur de la loi du 17 mai 2013, lorsque que les personnes sont séparées pour un certain nombre de raisons, permettre l'établissement d'une parenté d'une filiation par possession d'état et sa retranscription dans les actes civils.

Par ailleurs, et nous sommes tout à fait en désaccord avec l'ADFH sur ce point, nous ne souhaitons pas que la loi crée de nouvelles catégories d'enfants ; il ne doit pas y avoir d'un côté les enfants nés par PMA, et d'un autre côté les enfants conçus sous la couette. Nous considérons qu'aucune indication relative à la façon dont l'enfant a été procréé ne doit figurer sur son acte de naissance qui, comme pour les autres enfants, doit établir sa filiation, et c'est tout ! L'enfant a deux mamans, peu importe comment elles ont fait pour que l'enfant naisse et que la filiation puisse être établie ; il a deux papas, il a deux papas, il n'a qu'une mère, il n'a qu'une mère, etc. C'est ainsi, et on ne voit pas pourquoi on viendrait créer de nouvelles catégories d'enfants fondées sur le seul mode de leur conception. Si les personnes hétérosexuelles qui ont recours à la PMA ne souhaitent pas lever le secret de la conception de leur enfant, nous estimons que cela les regarde.

Il ne revient pas en effet au législateur d'organiser la police des alcôves et la police des familles, pour forcer des récits familiaux potentiellement traumatisants. Le jour où un enfant cherchant son état civil dans son acte de naissance prendra connaissance d'une vérité qui le concerne et que l'administration détient, mais que ses parents n'ont pas souhaité lui délivrer pour des raisons qui les regardent, nous estimons que ce sera lui avoir fait une violence que nous ne voulons pas lui imposer.

Nous sommes donc favorables à ce que le législateur rende possible une ouverture progressive à l'accès à des connaissances portant sur les donneurs et les donneuses en cas de nécessité. Dans le cas des familles homoparentales, la question ne se posera d'ailleurs pas, elle sera forcément posée et fera partie du récit familial. Quant aux personnes hétérosexuelles, qu'elles se débrouillent comme elles le veulent ; certaines souhaiteront raconter à leur enfant quel a été le parcours médical qui a permis leur procréation, d'autres non, ou elles le feront plus tard, à un moment que la famille jugera opportun et qui ne sera pas commandé par une nécessité administrative, ce qui n'est pas du tout la même chose.

Pour ce qui concerne la façon dont les filiations peuvent être réorganisées, nous vous ferons parvenir un résumé d'articles abordant le sujet. Nous ne voulons pas mettre par terre le droit actuel, au contraire nous voulons simplement, puisque ça nous a été reproché tout à l'heure, entrer dans les catégories générales et faire en sorte que nos catégories particulières puissent s'intégrer dans le droit commun. S'agissant de la reconnaissance des enfants nés par GPA, il faut faire cesser la violence à leur égard et permettre, selon les directives de la Cour européenne des droits de l'Homme, la reconnaissance de leur situation dans l'acte civil afin qu'ils vivent tranquillement en toute légalité, avec les mêmes droits que les autres enfants sur le territoire de la République.

Je tiens enfin à préciser, si monsieur ignore quelle est la diversité des familles représentées à l'AFC, qu'à l'APGL toutes les confessions sont représentées.

1 commentaire :

Le 30/01/2019 à 15:04, Girodolle (Fonctionnaire) a dit :

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Vous êtes en plein un cas d'école de ce que je commentais tout à l'heure : vous êtes adultes, et vous avez une grande envie d'avoir (acheter) un enfant quelque soient les conditions de satisfaction de cette demande, car vous estimez que c'est un DROIT. Avez-vous pensez une seconde à l'avenir de votre enfant, à la construction de son propre équilibre dans une société qui n'a jamais changé ses habitudes de coller des étiquettes sur les gens. J'ai élevé une fille qui n'était pas biologiquement la mienne, je lui ai donné mon nom, et à l'école, l'instituteur l'a montré du doigt lorsqu'il s'est aperçu que le nom sur le carnet de santé n'était pas le mien. A 37 ans elle a voulu retrouver son géniteur. Si je lui avais menti sur son origine, elle se serait construite sans ce patrimoine. Elle a de tout temps connu la vérité, et a finalement reconnu que ce sont les valeurs de vie que je lui ai donné qui l'on construite. A mon avis, chaque enfant a besoin d'un père et d'une mère pour favoriser un développement harmonieux.

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