Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du lundi 22 octobre 2018 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Article 29

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Vous partez du principe, madame la députée, que l'Agence serait plus indépendante si elle était financée par une taxe affectée plutôt que par des crédits budgétaires. Mais cela se discute : si le Parlement peut diminuer des crédits budgétaires, il peut aussi remettre en cause, comme le montrent nos discussions, une taxe affectée. Il n'y a donc pas de lien entre l'indépendance et l'un ou l'autre de ces modes d'abondement.

D'autre part, une telle mesure n'irait pas dans le sens de ce dont nous sommes convenus tout à l'heure, à savoir limiter les taxes affectées, non seulement parce qu'elles contreviennent au principe de l'annualité budgétaire, qui d'ailleurs permet le financement du ministère des sports, mais aussi parce que c'est là notre volonté. On peut toujours décider, pour des raisons politiques, de créer telle ou telle taxe ; mais si l'on ne coupe pas le robinet, passez-moi l'expression, cela peut tout de même poser problème.

Troisièmement, comme nous le verrons notamment en discutant des transports – tout à l'heure ou la semaine prochaine – , les taxes affectées ne sont pas forcément la panacée, puisque leur produit peut baisser. On constate ainsi, en ce moment, une chute des recettes issues des procès-verbaux routiers – à rebours de ce qu'on lit parfois dans la presse – , ce qui est un problème pour de nombreux territoires : de mémoire, cela représente un manque à gagner d'un peu plus de 100 millions d'euros pour l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France. Que suis-je censé faire, en tant que ministre des comptes publics ? Me tourner vers le ministère des transports et lui annoncer que 100 millions manquent à l'appel ? C'est la logique de la taxe affectée : elle rapporte quand on la crée, puis ses recettes peuvent baisser.

Doit-on assumer un tel risque ? Évidemment, ce n'est jamais ainsi que les choses se passent, puisque les dépenses engagées n'ont pas été calculées en fonction de ces recettes. Dès lors, on vient voir le ministre des comptes publics pour lui dire qu'il manque 100 millions ! Je suis, si je puis dire, le garant de l'équilibre du budget. Si le produit d'une taxe affectée augmente, il ne faut pas y toucher et, comme vous le souhaitez, en profiter pour financer autre chose – sans augmenter le niveau déjà élevé de la fiscalité, comme le notait le président Woerth – , et s'il baisse, les crédits budgétaires doivent combler le manque à gagner. Ce n'est pas ainsi que l'on diminuera la dépense publique et le niveau de la fiscalité.

L'AFLD reçoit déjà des subsides très élevés de la part de l'État. J'ai bien compris que vous ne proposiez pas de doubler son budget, même si, comme le suggère la remarque du rapporteur général, ce point n'est pas forcément clair dans la rédaction de votre amendement. Mais, à la limite, ce n'est pas vraiment le sujet. Entre 2016 et 2018, les crédits budgétaires alloués à l'AFLD ont augmenté de plus de 23 %. On ne peut donc pas dire que l'État ait diminué les moyens consacrés à la lutte contre le dopage. Aux termes du PLF pour 2019, 10 millions d'euros de crédits sont prévus, lesquels ne sont donc pas rabotés.

Aussi l'avis reste-t-il défavorable. Surtout, madame la députée, je vous invite à considérer qu'il n'y a pas de lien entre l'indépendance et une taxe affectée, laquelle est discutée au même titre que les crédits budgétaires. De plus, je le répète, le défaut d'une taxe affectée est que, parfois, son produit peut baisser, car la vie économique est ainsi faite. En ce cas, on se tourne vers le ministre des comptes publics pour lui demander des crédits budgétaires : on en revient à l'indépendance que vous évoquiez. Tout cela ne serait donc pas de bonne méthode budgétaire.

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