Intervention de Olivier Véran

Séance en hémicycle du jeudi 25 octobre 2018 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 — Après l'article 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran, rapporteur général de la commission des affaires sociales :

Le problème de la consommation d'alcool, d'alcool fort et de rhum en particulier, dans les outre-mer fait l'objet d'une littérature conséquente. Je suis allé regarder : la consommation quotidienne d'alcool fort est significativement plus importante aux Antilles – au-dessus de 2 % – et à La Réunion – 1,1 % – qu'en métropole – 0,7 %. Les conséquences de l'alcoolisation en matière d'accidents mortels de la route sont importantes : 46 % des personnes tuées outre-mer le sont dans un accident impliquant un conducteur dont le taux d'alcoolémie supérieur ou égal à 0,5 gramme d'alcool par litre de sang, contre 30 % en métropole. Le surrisque d'accident mortel est donc de 50 %. Les interpellations pour ivresse sur la voie publique sont fréquentes à La Réunion – 21 pour 10 000 habitants, contre 16 en métropole, c'est-à-dire un surrisque de près d'un tiers. Les statistiques relatives au syndrome d'alcoolisation foetale – causé par l'absorption d'alcool par les mères pendant leur grossesse – sont également alarmantes : à La Réunion, c'est 0,36 cas pour 1 000 naissances, contre 0,07 en métropole. Le décalage est ici net par rapport aux Antilles : ce chiffre est de 0,04 en Guadeloupe, c'est-à-dire un chiffre inférieur à celui de la métropole, et il est en Martinique à peu près identique à ce qu'il est en métropole.

Les populations ultramarines, et en particulier les hommes, sont parmi les plus touchées par la consommation d'alcool et le risque de dépendance. En Guadeloupe, cela concerne 10,8 % de la population générale, et à La Réunion 13,6 %, contre 8,2 % dans l'hexagone.

Parmi les causes possibles de ce phénomène, il y en a une qui saute aux yeux : le prix de l'alcool. Vous l'avez dit, madame Dufeu Schubert : les différences par rapport à la métropole peuvent être extrêmement importantes.

Je suis allé regarder les prix en supérette. Nous avons cherché les prix les plus bas pour un litre de rhum : à La Réunion, on en trouve à 5,99 euros le litre ! Les prix commencent en Guadeloupe à 6,99 euros le litre, en Martinique à 9,26 euros – et en métropole à 15,80 euros. Le consommateur paye donc trois fois moins à La Réunion qu'en métropole. Et une bouteille contient un litre outre-mer, contre 0,7 en métropole.

Enfin, le degré d'alcool du rhum, qui est de 37 degrés en moyenne en métropole, monte jusqu'à 49 degrés outre-mer.

La corrélation avec les risques de santé publique que j'ai énumérés est nette.

Cela rappelle les débats d'une proposition de loi – que nous avions votée ensemble, madame Bareigts – relative au surdosage en sucre, outre-mer, de nombreux produits alimentaires. Cette situation n'est pas acceptable ; notre politique de santé publique ne peut pas être à deux vitesses. C'est pourquoi la commission des affaires sociales a très largement adopté l'amendement, no 317 , présenté par Mme Dufeu Schubert.

Toutefois, à titre personnel, je suis sensible aux arguments de mon collègue Thomas Mesnier et du groupe majoritaire. À titre personnel, je serai donc favorable à l'amendement no 1600 .

Avis défavorable à l'amendement no 1678 .

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