Intervention de Edouard Philippe

Séance en hémicycle du mardi 3 octobre 2017 à 15h00
Questions au gouvernement — Attentat de marseille

Edouard Philippe, Premier ministre :

Madame la députée, le choc est immense. Au-delà de la tristesse que nous ressentons tous, il y a – c'est l'évidence – de la colère face à la brutalité de ces actes, de l'incompréhension face à ces crimes terroristes aveugles et particulièrement lâches. Vous avez rappelé, monsieur le ministre d'État, ministre de l'intérieur, les conditions dans lesquelles cet acte terroriste a été commis.

Il aurait pu avoir des conséquences bien plus dramatiques encore si les militaires de l'opération Sentinelle n'avaient pas été présents, et s'ils n'avaient pas fait la preuve de leur capacité à agir en employant leurs armes avec un sang-froid remarquable. Leur sang-froid a été salué à juste titre sur tous les bancs de cette assemblée, et je crois que nous devons nous en inspirer.

Nous devons nous en inspirer tout d'abord pour respecter le deuil terrible dans lequel sont plongés les familles et les proches des victimes. Comme moi, mesdames, messieurs les députés, vous avez vu – peut-être certains d'entre vous y ont-ils même participé – l'hommage qui a été rendu aux victimes, à l'université d'Aix-Marseille, par leurs amis étudiants et la totalité du monde universitaire. C'était un hommage poignant et juste : nous devons nous y associer.

Nous devons aussi nous inspirer de ce sang-froid pour faire toute la lumière sur les conditions dans lesquelles cet acte a été commis. Vous avez posé une bonne question, monsieur Teissier, que tous les Français se posent, et vous l'avez fait sur un ton qui vous fait honneur. Il faut y répondre : c'est pourquoi M. le ministre d'État, dès son arrivée sur les lieux, a ordonné une inspection en vue de déterminer exactement les raisons, les causes, les motifs, les responsabilités qui ont conduit à la situation que vous avez dénoncée. Nous aurons l'occasion d'en discuter, mais je pense qu'il est nécessaire, au-delà de la colère et de l'émotion qui s'expriment, de connaître précisément l'ensemble des faits avant de les commenter.

Enfin, le sang-froid dont ont fait preuve les militaires de l'opération Sentinelle doit tous nous guider. Il ne s'agit pas de nous interdire de débattre ici – si nous ne débattions pas dans ce lieu, alors nous ne débattrions jamais – des dispositifs législatifs à mettre en oeuvre pour répondre à la menace. Il s'agit plutôt de conduire ces débats en gardant en tête une idée claire : nous voulons tous, sur tous les bancs de cette assemblée ou du Sénat, répondre efficacement à cette menace.

Sans doute nous arrive-t-il de diverger quant aux moyens propres à garantir l'efficacité de cette réponse. Certains expriment l'opinion que les mesures que le Gouvernement a proposées et que M. le ministre d'État a soutenues devant le Parlement sont insuffisantes ; d'autres, que ces mêmes mesures sont trop dangereuses pour les droits et libertés. Mais à l'issue de ce débat, l'Assemblée votera, comme le Sénat a voté.

Ce que je veux vous dire, mesdames, messieurs les représentants de la nation, à vous et aux Français qui nous regardent, c'est que – comme nous le disons depuis le début, comme d'autres avant nous l'ont dit très clairement – le niveau de menace qui prévaut dans notre pays est élevé. En outre, cette menace est protéiforme : elle prend parfois l'aspect d'organisations structurées qui emploient des instruments de destruction puissants ; elle peut aussi prendre le visage d'un individu qui, basculant dans l'acte, commet l'irréparable, sans que grand-chose – je ne dis pas que ce soit toujours le cas – ne laisse à penser qu'il puisse ainsi basculer. Je le répète : la menace contre laquelle nous devons lutter est protéiforme.

Nous devons pour cela employer des instruments juridiques, mais pas seulement. Le droit existant sera complété grâce au projet de loi qui a été présenté au Parlement par M. le ministre d'État. Je pense que c'est un bon projet de loi, qui renforcera notre arsenal juridique. Cependant nous savons tous que la loi n'est pas le seul instrument de lutte contre la menace terroriste ; en tout cas, elle ne doit pas être la seule arme de cette lutte. Nous devons en effet combattre sur tous les fronts : c'est un combat culturel, un combat social, un combat d'ordre public. C'est pourquoi nous devons donner des moyens aux forces de l'ordre, améliorer la communication entre les services de renseignement, et faire en sorte que l'ensemble des citoyens français soient vigilants et attentifs à cette menace.

Le combat dans lequel nous sommes engagés n'est pas celui des forces de l'ordre contre les terroristes ; c'est le combat de la France contre des gens qui veulent la défaire. Cela signifie que tous les citoyens français doivent être vigilants, qu'ils doivent tous regarder, observer et participer à cet effort de défense de la nation.

Bien entendu, nous pouvons discuter des instruments juridiques pour lutter contre le terrorisme : c'est même un devoir. Mais nous ne devons pas nous arrêter au droit, qui relève de nous seuls : nous devons envisager la lutte contre le terrorisme d'une façon plus générale et plus déterminée, afin que les valeurs de notre pays prévalent définitivement.

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