Intervention de Jean-Louis Masson

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 16h40
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Masson :

Au nom du groupe Les Républicains, nous vous donnons acte, madame la garde des Sceaux, de votre projet d'augmentation du budget de la justice de 300 millions d'euros en 2019. Si l'on y ajoute les 260 millions d'euros de l'année dernière, cela représente 560 millions d'euros sur deux exercices budgétaires. Mais ne souriez pas trop vite, car je vous propose de placer cette somme en perspective avec un autre chiffre, celui de la dépense publique. Sur les deux mêmes exercices budgétaires, elle se sera accrue de 42 milliards d'euros. Si vous faites une règle de trois, vous observerez comme moi que l'augmentation du budget de la justice ne représente que 0,013 % de l'augmentation de la dépense publique sur la même période. Non, madame la ministre, sans vouloir vous offenser, votre budget ne comble pas l'immense retard de cette fonction régalienne !

Comme vous le savez, votre budget ne permettra pas de décoller de la toute fin du peloton européen en la matière – peu glorieux, me semble-t-il, pour la patrie des droits de l'Homme. Mais tout cela, le Sénat vous l'a dit, notamment lors de l'examen du projet de loi de programmation 2018-2022.

J'aurai quelques observations et questions sur la justice judiciaire. La pénurie chronique des magistrats et fonctionnaires de greffe ne cesse d'être dénoncée, année après année – je dirais même quinquennat après quinquennat. Cela se mesure d'ailleurs au délai moyen du traitement des procédures, qui ne cesse d'augmenter et qui n'a cessé de le faire à nouveau au cours de l'année que nous venons de vivre, toutes juridictions confondues. Vous connaissez bien sûr les chiffres bien mieux que moi. On note néanmoins une augmentation des crédits pour les magistrats à titre temporaire ou les agents non-titulaires, avec 22 millions d'euros. Faut-il y voir une certaine forme de précarisation des statuts ?

Concernant l'administration pénitentiaire, nous notons – comme l'a fait mon collègue – un recul important des annonces présidentielles sur la lutte contre la surpopulation carcérale au sein des maisons d'arrêt, puisque 15 000 places nouvelles devaient être créées d'ici 2022 et que vous révisez ce chiffre à 7 000. Au demeurant, et compte tenu des délais de réalisation d'un établissement pénitentiaire, de l'ordre de quatre à cinq ans, votre objectif semble vraisemblablement irréalisable. Vous n'avez d'ailleurs, à ce jour, pas arrêté le programme d'implantation définitive de nouveaux établissements. Les maisons d'arrêt resteront donc vraisemblablement surpeuplées. Qu'il me soit ici permis de revenir en arrière. À la même époque l'an dernier, vous étiez portée par le même enthousiasme qu'aujourd'hui, mais rien n'a changé dans les maisons d'arrêt. La surpopulation carcérale est une réalité dans tous les établissements de notre pays.

Ma question concerne le renseignement pénitentiaire. Vous présentez un budget de 5,8 millions d'euros et 39 personnes supplémentaires, mais permettez-moi de vous demander de nous préciser ce qui n'y figure apparemment pas, qu'en tout cas je n'ai pas trouvé : existe-t-il une doctrine et quel est le dispositif que vous envisagez de mettre en oeuvre pour ce service de renseignement pénitentiaire ?

Concernant l'aide juridictionnelle, le problème est structurel et souligné chaque année. Il tient à un coût en constante augmentation et au nombre toujours croissant de personnes éligibles, au-delà de l'augmentation du montant des prestations. Chaque année, cette dépense est toujours sous-estimée. Le Sénat a fait une proposition sur laquelle je souhaiterais avoir votre avis. Il s'agirait de réclamer un « droit de timbre » de 20 euros à 50 euros aux justiciables. Que pensez-vous de cette proposition sénatoriale ?

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