Intervention de François Ruffin

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Ruffin :

D'emblée, je fais remarquer qu'il y a une baisse de 4 % de l'enveloppe consacrée aux investissements d'avenir : elle se situe cette année à un milliard d'euros. Quel avenir peut-on construire avec un milliard d'euros ?

Pour les membres du groupe La France insoumise, le point clef de ce budget, celui qu'il faut marteler, c'est le choix qui a été fait en matière de crédit d'impôt sur la compétitivité et l'emploi (CICE). Celui-ci n'a pas été seulement renouvelé ou pérennisé, son montant – dont la moitié va aller à des multinationales – a quasiment doublé.

En temps normal, le montant de ce CICE est de 24 milliards d'euros par an. L'année prochaine, on va ajouter 20 milliards d'euros. On se demande à quoi peuvent bien servir les évaluations parce que dans toutes celles de France Stratégie et de la quasi-totalité des organismes qui travaillent sur le sujet, il est indiqué que le rendement de ce CICE est nul. Le CICE est inefficace ; il n'a permis de créer ou de sauvegarder que 100 000 emplois au maximum. On est dans ces eaux-là. Cela signifie que chacun de ces emplois coûte aux alentours de 200 000 euros par an. C'est une gabegie considérable, un puits sans fond.

Ces 24 milliards d'euros par an, auxquels on va ajouter 20 milliards d'euros l'année prochaine, sont distribués tous azimuts, en une espèce de saupoudrage qui profite beaucoup aux multinationales. Les premières grandes entreprises du privé qui bénéficient du CICE sont Auchan, Carrefour et Casino. Ces groupes n'ont aucun besoin de financement ; ils ne sont pas en concurrence avec des hypermarchés étrangers puisque leur activité se passe sur le marché local ; en plus, ils profitent de ce CICE pour procéder à des licenciements massifs.

Il est évident que là se trouve notre marge de manoeuvre, le choix de société, la direction vers laquelle nous voulons aller ou non. Ces 24 milliards d'euros en année normale et ces plus de 40 milliards d'euros pour cette année offrent une marge de manoeuvre considérable pour effectuer la transition écologique, pour aller vers un changement d'agriculture et pour développer ce que j'appelle les « métiers du tendre », qui devraient être considérés comme investissements d'avenir : l'accompagnement des enfants handicapés, les auxiliaires de vie sociale pour personnes âgées, les animateurs périscolaires qui s'occupent de nos gamins après l'école, et ainsi de suite.

Dans le budget, la marge de manoeuvre se trouve à cet endroit-là, dans ces 40 milliards d'euros qui sont saupoudrés et gaspillés dans l'espoir que quelque chose poussera peut-être. Ces sommes colossales auraient permis de réorienter un peu sérieusement la société française, notamment vers l'écologie. Ce n'est pas le choix que vous avez fait.

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