Intervention de Olivier Serva

Séance en hémicycle du mardi 30 octobre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Serva, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

.. cette hausse s'explique par des mesures de périmètre. La mission profite en effet de la budgétisation de 296 millions d'euros au programme 138 « Emploi outre-mer », en lien avec la transformation du CICE en baisse de cotisations.

Cette seule mesure ne suffit pas à expliquer l'augmentation apparente des crédits. Une autre partie est liée au recyclage d'économies permises par la réforme de l'avantage fiscal sur l'impôt sur le revenu, ainsi que par la suppression de la taxe sur la valeur ajoutée non perçue récupérable, ou TVA NPR.

Sans ces mesures, les crédits de la mission seraient stables. Le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, M. Olivier Dussopt, l'avait d'ailleurs indiqué lors de son audition par la délégation aux outre-mer.

Dans le détail, le dispositif d'exonérations de cotisations de sécurité sociale, pris en charge par le programme 138 « Emploi outre-mer », est modifié par le PLFSS pour 2019 afin de prendre en compte la suppression du CICE outre-mer, dont le taux était majoré par rapport à celui en vigueur dans l'Hexagone. Des difficultés apparaissent aujourd'hui dans la configuration du nouveau régime d'exonération. La ministre des outre-mer elle-même a affirmé qu'il y avait des raisons de faire évoluer le dispositif. Je redoute les pertes que pourraient subir certaines entreprises et j'estime que la discussion avec le monde économique doit se poursuivre sur ce sujet, comme Mme la ministre vient de l'indiquer. Pourquoi ne pas maintenir le CICE outre-mer le temps de stabiliser le nouveau régime d'exonérations ?

Dans le même programme 138 « Emploi outre-mer » a été créée une nouvelle action dédiée au financement des entreprises ultramarines et partiellement financée par les économies issues de la suppression de la TVA NPR. Bénéficiant de 56 millions d'euros de crédits, cette action financera un fonds de garantie lui-même doté de 10 millions d'euros pour soutenir le dispositif « Avance + » de Bpifrance, qui remédiera en partie au problème des délais de paiement des collectivités territoriales. Nous travaillons actuellement sur ce sujet avec le Gouvernement et espérons des évolutions positives pour nos entreprises.

De même, une dotation de 10 millions d'euros permettra d'étendre le bénéfice du prêt de développement outre-mer – PDOM – de Bpifrance aux entreprises de moins de trois ans, c'est-à-dire à celles qui souffrent le plus. Il devrait également permettre de préfinancer les crédits d'impôt.

En attendant d'être en mesure d'évaluer ce mécanisme dans le cadre spécifique de la bascule future de la défiscalisation vers le crédit d'impôt, il me semble souhaitable que soit maintenu le verrou constitué par l'article 110 de la loi de finances pour 2016, issu de l'amendement Letchimy.

Le second programme de la mission, le programme 123 « Conditions de vie outre-mer », affiche, lui aussi, des crédits en augmentation grâce à des mesures de budgétisation. Seront ainsi renforcés la politique contractuelle de l'État et le FEI, qui finance des investissements publics structurants dans l'ensemble des territoires d'outre-mer.

Je note l'écart important entre le montant des autorisations d'engagement, qui s'élèvent à 70 millions d'euros, et celui des crédits de paiement, qui s'élèvent à 30 millions d'euros, s'agissant de cette dotation supplémentaire au FEI, financée par la diminution de l'avantage sur l'impôt sur le revenu.

En second lieu, l'analyse des dispositions fiscales qui permettent de financer l'augmentation des crédits révèle que ces mesures de périmètre et de budgétisation sont permises par la refonte de dispositifs fiscaux, laquelle suscite des interrogations, voire de franches oppositions.

Le Gouvernement propose ainsi de supprimer le dispositif de TVA NPR ; cette mesure m'inquiète. Je note cependant avec satisfaction que les entrepreneurs qui ont avancé un acompte d'investissement pourront mobiliser la TVA NPR dans le cadre de cet investissement. Toutefois, j'appelle à nouveau de mes voeux une réforme moins brutale et plus progressive. Les acteurs économiques ont en effet besoin de stabilité, dans les DOM plus qu'ailleurs. Je sais que vous êtes, madame la ministre, ouverte à une nouvelle concertation avec eux, comme vous l'avez indiqué lors de votre récent déplacement à La Réunion.

Je réaffirme ici mon opposition à la réforme de l'avantage fiscal sur l'impôt sur le revenu adoptée en première partie du présent PLF. Cette mesure, nous l'avons beaucoup dit, ne passe pas en outre-mer.

Je propose que l'on finance le maintien du dispositif par la suppression des indemnités d'éloignement perçues par les fonctionnaires d'État hexagonaux mutés dans les collectivités d'outre-mer. Créée dans les années 1960 pour tenir compte de la durée du voyage jusqu'aux territoires de destination, cette prime n'a plus de raison d'être.

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