Intervention de Bruno Questel

Séance en hémicycle du mercredi 31 octobre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Questel, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

La justice est depuis l'an dernier clairement placée au rang des priorités gouvernementales, répondant en cela aux engagements du Président de la République. C'est pourquoi je souhaite, avant toute chose, saluer les efforts consentis en faveur de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse dans ce projet de budget pour 2019. Je veux aussi souligner, madame la ministre, combien vous avez su, au début de l'année 2018, mener les négociations avec le personnel pénitentiaire qui manifestait alors.

S'agissant de votre projet de budget et des crédits qui nous occupent, il est évident qu'ils ne permettront pas de résoudre tous les défis auxquels ces administrations sont confrontées, tant le manque d'ambition des majorités précédentes en a fragilisé le fonctionnement. Il me faut donc insister sur le caractère remarquable des efforts consentis dans le contexte actuel de redressement des finances publiques. Les ambitions du Gouvernement s'inscrivent dans le respect de la loi de programmation budgétaire 2018-2022, adoptée l'an dernier, et s'incarnent dans le projet de loi de programmation et de réforme pour la justice, que le Sénat vient d'adopter et que nous étudierons en commission à partir de la semaine prochaine.

S'agissant de l'administration pénitentiaire, l'augmentation de 30 % des crédits d'investissement immobilier, la mobilisation de 56 millions pour la sécurité des établissements et la hausse de 4 % des dépenses de personnel démontrent un effort important de modernisation et de sécurisation du parc pénitentiaire et témoignent du soutien de notre pays aux agents qui y travaillent dans des conditions parfois difficiles. Aussi, madame la ministre, vous avez détaillé en commission des lois le programme de construction de 15 000 places de prison, en précisant les contours et les modalités. De même, vous avez expliqué comment vous prendriez en compte la nécessité de différencier la détention en fonction de la situation du condamné et de ses objectifs personnels de réinsertion.

En effet, les moyens budgétaires octroyés doivent être analysés à la lumière des orientations nouvelles qui seront données à la politique d'exécution et d'aménagement des peines par le projet de loi de réforme pour la justice, afin que les peines prononcées dans notre pays soient exécutées et utiles à la personne condamnée ainsi qu'à la société plutôt que d'avoir, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, un effet désocialisant et contre-productif à l'égard de l'objectif de prévention de la récidive. Aussi, au-delà de ces orientations, il nous faudra repenser l'incarcération afin de mieux responsabiliser les personnes incarcérées au cours de leur détention et de faire de leur passage en prison un moment utile. Ce sera là une part importante de la réforme de la justice que vous proposez et que mes collègues Laetitia Avia, Didier Paris, Jean Terlier et Stéphane Mazars défendent au nom du groupe La République en marche.

S'agissant de la protection judiciaire de la jeunesse, très affectée par les effets de la révision générale des politiques publiques engagée entre 2007 et 2012, elle poursuit ce qu'il est convenu d'appeler son rétablissement. Les structures qui accueillent les mineurs qui lui sont confiés vont être renforcées grâce à une diversification accrue des instruments juridiques de prise en charge et à la création de vingt centres éducatifs fermés.

J'en viens, pour terminer, aux problèmes de la pratique des cultes et du respect du principe de laïcité dans les établissements de l'administration pénitentiaire, et de la protection judiciaire de la jeunesse, auxquels j'ai souhaité consacrer mon avis cette année. Les auditions que j'ai conduites à ce sujet ont révélé un cadre juridique désormais bien établi depuis 2014. Des moyens importants ont été mobilisés au cours des dernières années pour renforcer la présence et la formation des aumôniers ainsi que la familiarité du personnel pénitentiaire avec ces problématiques. C'est tout particulièrement la religion musulmane, historiquement sous-représentée parmi les aumôniers, qui a bénéficié de ces moyens, notamment à la suite des plans de lutte contre le terrorisme et la radicalisation.

L'organisation des cultes en détention n'en continue pas moins de soulever certaines difficultés, car d'importantes disparités existent entre les aumôneries pénitentiaires d'une part, et celles hospitalières ou militaires d'autre part. Enfin, les règles actuelles ne semblent pas totalement tenir compte de la situation particulière de certains aumôniers, qui ne disposent pas, au sein de leur culte, d'un statut, d'une rémunération et d'une couverture sociale. Cette situation entraîne un déficit d'attractivité et des difficultés de recrutement croissantes. En effet, l'aumônerie musulmane fait face à une demande importante en détention, qui ne cesse d'augmenter. Cette question, madame la ministre, doit être appréhendée pleinement dès lors que – vous le savez – elle représente l'un des enjeux essentiels de la non-prolifération des idées les plus détestables dans le monde carcéral.

Vous l'aurez compris, le groupe La République en marche votera des deux mains ce budget.

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