Intervention de Jean-Baptiste Moreau

Séance en hémicycle du vendredi 2 novembre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Agriculture alimentation forêt et affaires rurales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Baptiste Moreau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs spéciaux, en tant que rapporteur pour avis, je devrais vous parler du budget du ministère de l'agriculture ou du thème de mon rapport, à savoir la création d'un fonds public-privé de transition agro-écologique. Je vous en parlerai, mais lors de la présentation de mon amendement ; c'est un tout autre sujet que j'évoquerai durant les cinq minutes qui me sont imparties.

Dans les deux tiers du pays, nos agriculteurs souffrent, depuis le mois de juillet, de la sécheresse. Je tiens, monsieur le ministre, à saluer l'action que vous avez déployée, ainsi que votre prédécesseur, Stéphane Travert, pour faire activer le Comité national de gestion des risques en agriculture – CNGRA. Les aides motivées par les calamités agricoles représenteront sans doute entre 5 000 et 7 000 euros par exploitation dès le mois de décembre. L'anticipation du versement des aides au titre de la PAC a également permis de soulager la trésorerie des exploitations agricoles.

Toutes ces actions sont très utiles, mais je crains, hélas ! qu'elles ne suffisent pas. Dans le Massif central, l'agriculture subit une crise structurelle depuis plus de dix ans. Les fermes de polyculture-élevage connaissent des cours bas depuis des années, avec des charges constantes ou en hausse. Le texte que nous avons voté, et dont j'ai l'honneur d'avoir été le rapporteur, doit permettre de redresser cette situation en prenant en compte les coûts de production dans les prix de vente des agriculteurs. Ce texte est en train de se mettre en place ; laissons-lui le temps de faire ses preuves.

En attendant, toutefois, il faut prendre des mesures d'urgence, car nous pourrions assister, cet hiver, à un grand nombre de cessations d'activité dans ces régions qui s'étendent du Massif central au Grand Est de la France, en passant par la Bourgogne. Ce sera la résultante des difficultés économiques et du moral des éleveurs, aujourd'hui au plus bas. Les attaques iniques à répétition engagées par certains militants vegan ne font que renforcer cet état de fait. À cette heure, nous avons dépassé la colère et certains agriculteurs sont entrés dans une logique de résignation.

Pour le seul département de la Creuse, les déficits en fourrage sont évalués approximativement à 50 000 tonnes pour la paille et 50 000 tonnes pour le foin. Il est révoltant de constater que la solidarité paysanne, qui a fait la force de l'agriculture, n'existe plus. J'en appelle ici à la solidarité nationale pour sauver une profession qui pourrait purement et simplement disparaître.

Ces exploitations sont très vertueuses d'un point de vue environnemental et produisent une grande partie de l'alimentation pour leurs animaux mais, bien souvent, elles ne sont pas autonomes en paille, car installées dans des régions et dans des conditions pédoclimatiques qui ne le permettent pas. Or on a vu se développer cette année la vente de paille vers la Belgique ou l'Allemagne, à destination d'usines fabriquant des granulés pour le chauffage par le biais de la cogénération. Il est totalement révoltant, alors que les éleveurs n'auront pas de quoi nourrir les animaux et les héberger proprement dans les stabulations cet hiver, de voir que certains sont en train de spéculer sur le prix de la paille afin de récupérer la majeure partie des aides destinées aux éleveurs au titre de cette sécheresse. Mon discours n'est certes pas politiquement correct, mais il vient du coeur.

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