Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 17h05
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Je voudrais préciser d'emblée que les députés communistes ne voteront pas ces crédits. Il y aura peut-être des votes différents au sein du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR), mais sa composante communiste ne votera pas ce budget.

Il y a, en effet, la question de l'arme atomique. Alors que des forces se lèvent pour dire qu'il faut interdire les bombardements des populations civiles, à juste titre, car elles n'ont pas à payer le prix des guerres, on continue à vouloir disposer de la bombe atomique. Ce sera pour bombarder qui ? Si on signe des traités stipulant qu'il ne faut pas bombarder des populations civiles, à quoi va-t-il servir de dépenser 14,5 millions d'euros par jour pour moderniser et adapter la bombe atomique aux enjeux du XXIe siècle ? Il faut une cohérence entre les positions que l'on prend et notre action.

J'en viens au volet relatif au soutien à nos militaires : il faut évidemment leur fournir du matériel, mais on doit aussi redonner du sens à notre armée. Les communistes ont toujours considéré qu'elle devait servir à défendre le pays, et qu'il fallait procurer à nos militaires les moyens de le faire. Mais de la défense du pays on est passé à celle des intérêts français, puis à celle de nos valeurs, avec l'idée de les imposer au monde entier. On s'autorise, à ce titre, à faire des interventions ici et là, ce qui pose une question philosophique sur le rôle de notre armée.

Le Président de la République s'est un peu couché en acceptant le diktat de l'OTAN sur les 2 % du PIB qui devraient être consacrés aux dépenses militaires. Ce n'est pas une idée du Président de la République, mais une exigence de l'OTAN qu'il a reprise et que nous ne partageons pas. Nous pensons que la question de l'OTAN se pose aujourd'hui et qu'il n'est pas normal de ne pas ouvrir ce débat dans notre Assemblée. Face à l'attitude des Américains, faut-il que l'OTAN continue à exister ? Ne doit-on pas poser cette question, notamment au sein de notre commission ? Que peut-on construire avec l'Union européenne (UE) et dans d'autres cadres, comme celui de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), alors que les États-Unis abandonnent l'OTAN ? C'est un sujet dont on pourrait se saisir, sans forcément en rester au seul aspect militaire.

Nous demeurons très attentifs à l'industrie française, y compris dans le domaine de l'armement. Christophe Naegelen a dit qu'il faudrait acheter européen : nous y sommes plutôt favorables, mais l'Europe a adopté un principe de concurrence libre et non faussée. On aurait pu prévoir une exception, comme on l'a fait pour la culture, en vue de favoriser notre indépendance et notre autonomie au plan européen.

En ce qui concerne les drones, nous aimerions savoir si certains crédits de ce budget vont être consacrés à des recherches sur les robots tueurs. C'est un vrai sujet dans le domaine de l'armement : il y a une évolution qui ne nous convient pas du tout, car on voit bien les dérives liées à l'intelligence artificielle. Cela rejoint la question qui a été posée sur le numérique et la cybercriminalité : imaginez des robots tueurs qui feraient l'objet d'une cyberattaque et dont d'autres acteurs prendraient ainsi le contrôle. Cela peut ressembler à un scénario de science-fiction, mais il est en réalité tout à fait crédible. Je pense que nous ne travaillons pas suffisamment sur ces sujets et que le peuple n'est pas assez associé à toutes ces questions d'avenir, à travers ses représentants.

Vous voyez que nous nous posons beaucoup de questions philosophiques et stratégiques. Nous ne voterons pas ce budget, même si nous apprécions l'effort réalisé pour l'équipement de notre armée – il nous semble même que l'effort devrait être un peu plus important. Nous n'acceptons pas, en revanche, tout ce qui concerne la bombe atomique.

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