Intervention de Buon Tan

Réunion du mercredi 24 octobre 2018 à 17h05
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBuon Tan, rapporteur pour avis :

Je vous remercie pour vos encouragements et voudrais remercier à mon tour toutes les personnes qui m'ont aidé à rédiger le rapport et le document explicatif qui vous ont été remis. Nous avons eu à coeur de mettre à votre disposition une information digeste et compréhensible de tous – j'ai même souhaité qu'elle comporte un lexique des termes techniques – et je me félicite que cet objectif semble aujourd'hui atteint.

Je vais maintenant répondre aux questions qui m'ont été posées – en notant que les unes ont parfois répondu aux autres.

L'assurance export est un outil qui, depuis trente ans, dégage chaque année entre 200 millions et 1,5 milliard d'euros de bénéfice pour l'État. Globalement, le coût de l'assurance prospection, limité à quelques millions d'euros, se trouve donc largement couvert par l'assurance export. Malheureusement, étant donné les contraintes techniques liées au budget de l'État, il est impossible de flécher les recettes constituées par cet excédent, qui se trouvent donc captées par le budget général. Il faut savoir qu'un euro investi dans l'export rapporte entre 7 et 45 euros de facturation : comme vous le voyez, nous aurions tout intérêt à investir massivement dans ce domaine.

M. Quentin m'a interrogé au sujet de l'efficacité des réseaux des ambassades et des conseillers du commerce extérieur. Depuis quelques années, les ambassades ont pris à bras-le-corps la mission consistant à assurer la diplomatie économique – certains ambassadeurs y consacrent jusqu'à 40 % de leur temps –, dans le cadre de laquelle elles soutiennent les entreprises françaises, obtiennent des rendez-vous et influencent parfois les négociations.

Le réseau des conseillers du commerce extérieur, qui vient de célébrer son cent vingtième anniversaire, est lui aussi très actif – cela nous a été confirmé par le président de leur comité, M. Alain Bentéjac, que nous avons récemment auditionné. Je souligne que la France est la seule à disposer d'un tel réseau, constitué de conseillers très bien implantés et connaissant parfaitement les particularités, les contraintes et les pièges de la région où ils se trouvent. En outre, les conseils qu'ils dispensent sont gratuits et ils sont tout à fait disposés à être sollicités davantage qu'ils ne le sont actuellement. Il conviendrait donc de faire en sorte que ce réseau soit mieux connu par les entreprises.

Dans de nombreux pays, le fait de chasser en meute permet de disposer d'une meilleure visibilité et de moyens plus importants, c'est pourquoi, si cette pratique ne fait pas encore partie de la culture française, nos entreprises auraient tout intérêt à l'adopter. Dans le cadre des foires et salons, notamment, tous les exposants italiens se regroupent sous un pavillon unique constitué par une entreprise privée – très rentable, d'après les informations dont je dispose – quand les entreprises françaises se présentent, elles, en ordre dispersé. J'ai déjà eu l'occasion de proposer que nous en fassions de même en créant des Maisons de France à l'étranger, auxquelles les personnes intéressées par les produits, la technologie ou la culture de notre pays pourraient s'adresser comme à une sorte de guichet unique.

Les directions régionales du commerce extérieur ont été intégrées dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), qui sont à leur tour appelées à disparaître prochainement. À l'heure actuelle, au niveau régional, ce sont les chambres de commerce et d'industrie, qui connaissent très bien les entreprises locales, qui travaillent avec Business France et Bpifrance. Nous allons vers un guichet unique auquel les entreprises pourront s'adresser pour obtenir un diagnostic, d'éventuelles formations, des outils et des financements – en d'autres termes, pour être accompagnées dans leurs premières démarches. Pour les entreprises ayant déjà pratiqué l'export et souhaitant progresser dans ce domaine, l'accompagnement peut consister à les aider à embaucher des personnels en volontariat international en entreprise (VIE) ou à trouver des subventions pour financer un directeur export.

Dans ce processus, la création de cette base de données partagée qu'est le CRM va servir à ce que l'entreprise n'ait pas à constituer un nouveau dossier à chaque fois qu'elle rencontre un nouvel interlocuteur. Elle pourra également permettre d'assurer un suivi des informations dans le temps. Ainsi, une entreprise ayant connu une expérience fructueuse d'export au Japon pourra par exemple se voir proposer, l'année suivante, de tenter la même chose en Corée, un pays proche géographiquement et dont les habitudes culturelles et de consommation sont assez similaires. Aujourd'hui, il apparaît nécessaire de généraliser et de sanctuariser le CRM.

Bruno Joncour a évoqué la contractualisation. En la matière, la situation est assez encourageante, puisque cinq régions ont déjà signé avec l'État, et nous avons bon espoir que toutes l'aient fait avant la fin de l'année – Business France pense que c'est possible. En ce qui concerne les régions déjà engagées, je me félicite de constater que chacun joue parfaitement le jeu sur le terrain. Il y a donc tout lieu d'être optimiste pour la suite.

Pour ce qui est des bénéfices attendus, les économies d'échelle réalisées sont indéniables, notamment en matière d'occupation de bâtiments : aujourd'hui, Business France et les CCI sont souvent regroupés en un lieu unique, où ils travaillent ensemble. On assiste également à une déperdition beaucoup moindre, dans la mesure où les diagnostics, par exemple, peuvent se faire en la présence conjointe d'un représentant de Business France et d'un autre de Bpifrance, ce qui permet à l'entreprise concernée de se voir proposer une solution complète.

Outre le CRM, il va exister un outil informatique constitué d'une plateforme dédiée aux entreprises, ou chacune d'elles pourra trouver toutes les informations et accéder à tous les services susceptibles de lui être utiles – y compris les services privés. Une partie des services, notamment ceux destinés aux primo-exportateurs, n'intéressent pas les sociétés privées car elles ne sont pas rentables : c'est donc à l'État qu'il revient de les proposer. En revanche, une fois que l'entreprise a accompli ses premiers pas en matière d'exportation et qu'elle commence à prendre de l'ampleur, les accompagnateurs privés peuvent prendre le relais, car ils sont alors en mesure de facturer leurs services ; ceux qui jouent le jeu et signent des accords peuvent également bénéficier de ce réseau et ainsi récupérer des clients.

Le coût de facturation des services est une question essentielle. Aujourd'hui, les ressources de Business France proviennent déjà à plus de 50 % de la facturation. Une entreprise disposant de peu de moyens préfère souvent renoncer lorsqu'elle doit débourser une somme de l'ordre de 3 000 euros pour faire un salon. Cette raison a contribué à ce que, depuis 2014, il ait été observé une réduction de moitié du nombre d'entreprises ayant fait appel à l'assurance prospection – ce nombre est passé de 4 000 à 2 000 environ. Pour y remédier, nous faisons appels aux régions, qui disposent de budgets plus importants pour soutenir l'export, et travaillons à la mise au point d'un système de ticket modérateur : la région désireuse de mettre l'accent sur telle ou telle activité pourra régler une partie de la facture de Business France, dont seule une partie restera à la charge de l'entreprise concernée.

J'en viens aux clubs d'experts évoqués par Mme Michel – une idée très intéressante, et que nous avons l'intention de soutenir. J'ai auditionné l'an dernier le club Stratexio et cette année les représentants du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS), qui s'est très bien organisé pour chasser en meute, puisqu'il a pour habitude d'associer ses sous-traitants – en descendant jusqu'à deux niveaux – à ses opérations de prospection, qui obtiennent de très bons résultats.

Si en France, 20 % de l'export est réalisé par les PME, cette proportion est de 54 % en Italie. Notre pays compte 124 000 entreprises exportatrices, quand l'Italie en affiche 226 000, soit près de deux fois plus : cela montre que nous disposons d'une belle marge de progression, et que nous devrions être en mesure d'atteindre l'objectif ambitieux de 200 000 entreprises exportatrices que nous nous sommes fixés.

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