Intervention de Julien Aubert

Séance en hémicycle du lundi 5 novembre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, monsieur le président de la commission des finances, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j'ai la charge de vous présenter les crédits relatifs à deux programmes et deux comptes d'affectation spéciale composant une partie de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Malheureusement, monsieur le ministre d'État, je vais commencer par un carton jaune car le jaune budgétaire – le rapport sur le financement de la transition énergétique – a été livré aujourd'hui, à treize heures trente. Si vous voulez que l'on puisse débattre sereinement des chiffres, il faut que le Gouvernement respecte le Parlement ! Ce budget représente 11,3 milliards d'euros en crédits de paiement, soit un montant en progression de 2,22 % par rapport à la loi de finances pour 2018. Près des deux tiers de ce montant financent le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » qui soutient la production d'énergies renouvelables. En complément de ces 11,3 milliards, vingt-et-une dépenses fiscales sont rattachées aux crédits de la mission, pour un montant de 3,2 milliards d'euros.

Ce budget s'inscrit, sans surprise, dans le prolongement des orientations définies en 2017 lors de la présentation du plan climat, mais je vais me focaliser sur trois sujets. Ma première observation concerne la réforme du CITE. L'an passé, ce crédit d'impôt a été modifié pour en recentrer le bénéfice sur certains équipements. La réforme, réalisée sans concertation suffisante avec les professionnels, a eu des effets budgétaires importants puisque le coût du CITE a été divisé pratiquement par deux, passant de 1,7 milliard d'euros en 2018 à une estimation de 879 millions en 2019. Je crains néanmoins qu'il y ait eu des effets d'aubaine ; nous verrons l'impact que cette évolution aura l'année prochaine sur les professionnels. Très récemment, le 19 octobre, vous avez annoncé votre souhait de modifier de nouveau ce crédit d'impôt en vue de favoriser l'enlèvement des vieilles chaudières à fioul. Pourquoi pas, mais il serait bon de stabiliser les dispositifs et de ne pas changer les règles chaque année, car les ménages et les acteurs économiques ont besoin de visibilité et de stabilité. Je dis cela en espérant qu'au-delà du CITE, la prochaine révision de la programmation pluriannuelle de l'énergie évitera les à-coups trop brutaux, notamment en matière de soutien à la petite cogénération au gaz naturel.

Deuxième point : la revalorisation du chèque énergie. Le projet de loi de finances prévoit de revaloriser de 50 euros ce titre de paiement destiné aux ménages modestes pour le porter, en moyenne, à 200 euros par foyer bénéficiaire. À première vue, tout le monde doit se satisfaire de cette mesure. Pourtant, le chèque énergie répond d'abord à des considérations sociales, et non à l'impératif de lutte contre les émissions de CO2. Nous avions ainsi montré l'an dernier que ce sont les ménages qui se chauffent aux énergies fossiles, notamment au fioul, qui en profitent le plus. En effet, le chèque énergie bénéficie aux ménages quelle que soit la nature de l'énergie utilisée. De manière paradoxale, un budget censé soutenir la transition énergétique peut donc favoriser la consommation d'énergies fossiles, ce qui montre l'illisibilité de la maquette budgétaire qui nous est présentée.

Je formule également une observation de bon sens : à quoi sert-il de revaloriser de 50 euros le chèque énergie si, dans le même temps, les ménages modestes doivent acquitter 200 ou 300 euros de taxes supplémentaires sur les carburants en raison de l'alourdissement de la fiscalité sur l'essence et le diesel ?

Je crois qu'il n'a échappé à personne que nos concitoyens ont bien perçu les effets négatifs sur leur portefeuille de l'accroissement des prix à la pompe. À l'inverse, je n'ai pas le sentiment que la revalorisation, intéressante mais insuffisante, du chèque énergie les ait convaincus. Vous vous félicitez de l'augmentation de la fiscalité verte dans le budget de l'État. Je vous laisse la responsabilité de vos propos, que vous assumerez le 17 novembre.

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