Intervention de Mathilde Panot

Séance en hémicycle du lundi 5 novembre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

J'imagine que personne n'est surpris de cette logique, puisqu'elle ne concerne pas seulement cette politique : la destruction systématique de la puissance publique sert de projet politique au macronisme.

J'évoquerai toutefois les spécificités de cet aveuglement idéologique pour ce qui concerne le ministère de la transition écologique : de 2013 à 2019, 13 250 emplois ont été supprimés dans ce ministère et chez ses opérateurs ; pour 2019, ce seront encore 1 329 postes en moins, avec, en premier lieu, une perte de qualifications.

Tout le monde sait le haut niveau de qualification que suppose la réussite de la transition écologique. En effet, les services de l'État, en appui des collectivités territoriales ou pour l'État lui-même, doivent avoir la capacité d'expertiser tout projet qui pourrait avoir un impact environnemental – mais comment le faire avec toujours moins d'agents de terrain ? Que peuvent les agents des agences de l'eau pour contrôler le respect des normes d'émission par une usine, pour surveiller l'état des cours d'eau et rechercher l'origine des pollutions, ou pour vérifier que les dossiers de construction de ponts et de routes respectent la loi sur l'eau, ou que les stations d'épuration rejettent une eau propre, alors que, depuis 2010, un quart de leurs effectifs a été supprimé ? Pour la seule année 2017, 146 ingénieurs de très haut niveau ont quitté le ministère et 23 d'entre eux sont allés directement vers le secteur privé. Si les départs se poursuivent à ce rythme, le ministère devra faire face à une véritable hémorragie.

Quand viendra le temps d'expertiser des projets, que se passera-t-il ? C'est simple et consternant à la fois : l'État devra faire appel à des cabinets d'expertise privés, pour des coûts bien plus élevés et pour produire des résultats plus ambigus. C'est là le deuxième problème de cette fuite générale : quelle garantie d'indépendance restera-t-il pour ces résultats, suspects de reposer sur des intérêts privés ? Ce phénomène produira donc une aberration totale : l'État paiera beaucoup plus cher pour des résultats moins rigoureux.

Il s'agit là de la conséquence de politiques qui, de Sarkozy à Macron, en passant par Hollande, n'ont pas varié. Cette constance dans l'erreur relève à la fois de l'obstination et de la volonté partagée par ces gouvernants, obnubilés par différents intérêts privés, de saper la puissance publique. Depuis dix ans, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux et la politique du gel de l'indice ont été la règle dans la fonction publique. Rendre l'État plus efficace en mettant ses services en pièces, telle est la philosophie générale qui s'applique au budget du ministère de la transition écologique.

Ce n'est pas tout : le deuxième point frappant est l'affaiblissement des opérateurs du ministère. Le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement – CEREMA – , par exemple, a perdu 300 équivalent temps plein de 2015 à 2018. Or, c'est l'un des coeurs de l'expertise publique en matière d'environnement.

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