Intervention de Emmanuelle Anthoine

Séance en hémicycle du jeudi 8 novembre 2018 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Santé ; solidarité insertion et égalité des chances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Anthoine :

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les rapporteures, monsieur le rapporteur, chers collègues, pour ce qui est de la mission « Santé », et plus particulièrement de la recherche sur les cancers pédiatriques, vous avez indiqué en commission, madame la ministre, qu'il n'était pas forcément pertinent de transférer des crédits consacrés à la recherche fondamentale vers la recherche ciblée. Si cet argument est compréhensible, je ne comprends en revanche pas pourquoi vous n'avez pas pris la décision d'augmenter les crédits de la recherche ciblée et de la recherche fondamentale.

Ensuite, en ce qui concerne l'aide médicale de l'État, le budget est encore en hausse, avec 935 millions d'euros prévus pour 2019. Vous avez rappelé votre attachement à l'AME, et j'ai écouté vos arguments, mais trois questions se posent. D'abord, si nous comprenons les risques sanitaires, les soins urgents représentent environ 15 % des dépenses d'AME. Est-il donc interdit d'engager une réflexion sur le périmètre des autres dépenses ? Ensuite, des pays comme la Suisse, l'Espagne ou la Suède ont mis en place un droit de timbre. Pourquoi refusez-vous toute évolution sur le sujet ? Pensez-vous que leurs médecins sont plus inhumains que les médecins français ? Enfin, le renforcement du contrôle se limitera à la centralisation des demandes au sein de trois caisses pivot. Envisagez-vous d'autres mesures ?

J'en viens à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui présente le visage le plus humain de la République, symbole de progrès social ; c'est une fierté de compter une telle mission au sein du budget. Certains aspects de cette mission méritent une attention particulière. Tout d'abord, les places d'hébergement d'urgence manquent pour les sans domicile fixe, malgré les 14 000 places supplémentaires annoncées par le Gouvernement, et plus encore à partir de fin mars, lorsque les places ouvertes en hiver par le Gouvernement pour cause de grand froid ferment progressivement, conduisant des milliers de familles à la rue, sans autre solution.

En mai 2018, le Gouvernement a publié un arrêté plafonnant le tarif journalier des centres d'hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS, contrevenant au principe d'accueil inconditionnel prévu par le code de l'action sociale et des familles. Or le président Macron avait marqué une volonté radicalement différente en affirmant, en juillet 2017, que « la première bataille, c'est de loger tout le monde dignement », ajoutant : « Je ne veux plus, d'ici à la fin de l'année, avoir des femmes et des hommes dans les rues. » Nous sommes en novembre 2018 et rien n'a été fait. Il convient dès lors de revenir sur cet arrêté et d'allouer des budgets importants pour que la promesse présidentielle soit tenue.

D'autre part, nous sommes bien évidemment favorables à la revalorisation de la prime d'activité. Nous avons bien noté l'annonce importante selon laquelle le bonus prévu en 2019 serait porté à 30 euros. Mais en faisant passer le taux de cumul avec les revenus du travail de 62 % à 61 %, l'augmentation ne serait que de 12 euros pour un employé au SMIC. Pouvez-vous clarifier ce point, madame la ministre ?

Nous nous posons par ailleurs de nombreuses questions concernant les mineurs non accompagnés – MNA. Vous estimez que le Gouvernement fait un effort exceptionnel pour accompagner les départements ; mais les 141 millions d'euros crédités pour 2019 représentent à peine 10 % de la dépense globale assumée par les départements, dépense que l'Assemblée des départements de France estime à 1,5 milliard d'euros. Cette aide est sous-budgétée et l'État va devoir payer plus que prévu. Ces fonds sont censés couvrir à la fois les dépenses d'évaluation et les dépenses d'accueil des MNA au sein de l'aide sociale à l'enfance. Comment sont-ils répartis entre ces deux postes, et avec quelles estimations de flux entrants ? Pour 2018, le Gouvernement avait prévu 25 000 entrants, alors qu'il y en a eu le double ! Surtout, les dépenses liées aux MNA seront-elles intégrées au périmètre de 1,2 % d'augmentation annuelle des dépenses des départements imposé par les pactes financiers ? Dans l'affirmative, et vous en conviendrez, ces contrats qui prêtent déjà à polémique deviendraient intenables.

Pour ce qui est de l'égalité entre les femmes et les hommes, sujet qui me tient particulièrement à coeur, il est étonnant que le budget qui lui est consacré ne bouge pas d'un seul euro après qu'elle ait été déclarée grande cause du quinquennat. Contentons-nous alors de l'absence de baisse de crédits, même si nous ne pouvons nous résoudre à certains abandons.

En ce qui concerne les associations, nous avons entendu les engagements de la ministre assurant qu'il n'y avait pas de baisse de crédits effective pour les têtes de réseaux. Pourtant, l'ensemble de ces crédits ne sont pas retracés dans le projet annuel de performance, alors que dans le même temps, les moyens dédiés aux référents départementaux engagés dans l'accompagnement des femmes victimes de violences baissent également de 0,8 million d'euros.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » mérite les efforts qui lui sont consacrés. Alors, allons au bout de la démarche car c'est, en définitive, ce qui donnera du sens à notre action.

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