Intervention de Marie-Christine Dalloz

Séance en hémicycle du lundi 12 novembre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2018 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Christine Dalloz :

Je commence par la forme, monsieur le ministre. Le PLFR 2018 nous a été présenté le mercredi 7 novembre à dix-sept heures quinze, la commission devant l'examiner le vendredi 9 novembre à neuf heures. Cela fait moins de deux jours pour étudier le texte et rédiger quelques amendements. Sauf à ce que le Gouvernement considère que le Parlement ne sert à rien, qu'il n'y a pas lieu d'amender et que ses textes sont paroles d'évangile – je suis désolée d'employer cette expression dans cet hémicycle – il n'est pas satisfaisant de travailler dans de telles conditions.

La date limite de dépôt des amendements était fixée au jeudi 8 novembre à quinze heures, c'est-à-dire moins de vingt-quatre heures après la présentation du texte, et alors que la commission des finances était réunie pour examiner les articles non rattachés du PLF pour 2019. La réunion de la veille s'est achevée à une heure du matin et a repris jeudi à neuf heures pour prendre fin à treize heures. Nous disposions donc de deux heures, entre treize et quinze heures, pour étudier le texte et déposer des amendements. Nous sommes loin du respect des droits du Parlement !

Pour la séance publique, de nouveau, des délais inacceptables nous ont été imposés : l'examen en commission s'est achevé vendredi à dix heures trente et la date limite pour le dépôt des amendements était fixée au samedi 10 novembre à dix-sept heures, soit vingt-neuf heures après.

Monsieur le ministre, le Gouvernement ne peut pas bafouer à ce point les droits du Parlement. Je ne suis pas loin de penser qu'il y a là une forme de mépris. Auriez-vous accepté en tant que député de telles conditions de travail ? Pour vous avoir connu à une autre époque, je suis sûre que non. Pourquoi imposer des délais aussi contraints au Parlement ?

De plus, nous avions à examiner en même temps – expression chère au Président de la République – les articles non rattachés du PLF pour 2019 en commission des finances et, en même temps toujours, les crédits des missions en séance publique. Le Président de la République utilise cette expression pour relier deux termes : une chose et l'autre. La commission des finances avait, quant à elle, trois sujets à traiter en même temps !

Que signifie cette précipitation ? Qu'est-ce qui peut justifier une telle urgence ? Un certain nombre de collègues ont dû quitter la commission, en plein examen des articles non rattachés, pour venir en séance publique défendre un amendement et voter, avant de retourner en commission. Ce n'est pas convenable, ni sérieux ! Si vous vouliez faire de l'antiparlementarisme, vous ne vous y prendriez pas autrement. C'est précisément ce qui nous est reproché : le fait de survoler les choses.

Sur le fond, je reconnais que ce PLFR est différent des précédents, avec neuf articles seulement, et sans mesure fiscale. Toutefois, les signaux d'alerte sont nombreux, ce qui aurait justifié un débat un peu plus nourri.

Premier signal : l'érosion de la croissance économique. M. Labaronne nous a dit que la croissance était repartie. Pour ma part, je constate que la Commission européenne a maintenu sa prévision de croissance pour 2018 à 2,1 % dans la zone euro, alors que le Haut conseil des finances publiques a estimé plus vraisemblable une croissance de 1,6 % en France, dans son avis du 31 octobre 2018. Nous sommes donc en décrochage par rapport à la zone euro, il faut l'admettre.

Deuxième élément d'alerte : la progression de la dette publique. L'endettement public va culminer à 175 milliards d'euros, soit 98,6 % du PIB. Et c'est dû à la progression de la dépense publique, qui s'établit à 20 milliards d'euros en 2018 et sera de 25 milliards en 2019. C'est dire que votre communication sur votre « maîtrise totale de la dépense » est battue en brèche par la réalité budgétaire !

Troisième élément : le déficit, qui s'élève à 60,6 milliards d'euros, soit 2,6 % du PIB. Pourtant, entre la loi de finances initiale et le présent projet de loi de finances rectificative, nous avons enregistré 7 milliards d'euros de recettes supplémentaires, du fait de la croissance. Et, à périmètre fiscal constant, en tenant compte de l'inflation, l'ensemble des recettes fiscales – TVA, impôt sur les sociétés, impôt sur le revenu, TICPE – croît de manière naturelle de 30 milliards d'euros. Donc, ce n'est pas sérieux, monsieur le ministre !

Enfin, s'agissant du pouvoir d'achat, je souscris aux interrogations de Valérie Rabault : la réduction de 50 millions d'euros des crédits consacrés au chèque énergie constitue un très mauvais signal avant le 17 novembre. Personne ne peut comprendre votre fiscalité punitive !

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