Intervention de Marc Le Fur

Séance en hémicycle du mercredi 14 novembre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Action extérieure de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

C'est dire combien il fallait changer la donne.

Les pays désormais considérés comme prioritaires sont d'abord des pays africains : nous renouons ainsi, et je m'en réjouis, avec une tradition que nous avions abandonnée pour différentes raisons.

Pour aider ces pays, il faut changer de système. Les prêts sont adaptés aux pays intermédiaires, qui ont les moyens de se développer, mais les dons sont plus efficaces pour les pays les moins avancés. C'est à un basculement des premiers vers les seconds que vous procédez, monsieur le ministre, par l'intermédiaire de votre bras armé pour l'aide au développement, l'AFD, dont les crédits augmentent de 1 milliard d'euros en autorisations d'engagement.

En deuxième lieu, il faut défendre plus efficacement les priorités de la France. Pour cela, il faut mettre l'accent sur l'aide bilatérale. Aujourd'hui, le bilatéral ne représente que 58 % de notre aide. Pour les autres pays de l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques – cette proportion est de 74 %. Nous avons de la marge avant d'arriver à ce niveau !

Au total, les orientations données par le Gouvernement à l'aide publique au développement prennent le bon chemin. Plusieurs contreparties doivent néanmoins être exigées, ne serait-ce que pour que l'opinion française comprenne cet effort et y adhère.

Tout d'abord, la coopération des pays bénéficiaires en matière migratoire est indispensable. Le ministère de l'intérieur, que j'ai sollicité, indique que certains pays du Sahel coopèrent très peu dans ce domaine, alors même que la France les soutient fortement aux niveaux diplomatique, financier et même militaire – nos soldats versent leur sang pour eux. Le taux de délivrance des laissez-passer consulaires de certains de ces pays oscille entre 10 % et 25 % seulement : cela n'est pas tolérable, cela doit changer ! Il est possible d'obtenir des résultats : l'exemple du Niger, qui a su faire des efforts sur ce point, le prouve on ne peut plus clairement. Les autres pourraient faire de même.

Par ailleurs, il n'est plus tolérable que l'aide française serve à financer des entreprises étrangères – parmi lesquelles des entreprises extra-européennes, chinoises dans certains cas. Ces cas sont peut-être marginaux, mais ils existent, et ils se voient ! Il est donc indispensable que nos entreprises participent à ce développement. Au passage, je tiens à les saluer : bien souvent la presse les dénonce, les brocarde, mais il est heureux que certaines d'entre elles aient fait, depuis longtemps, le choix de l'Afrique ; elles comptent, dans leurs rangs, des hommes et des femmes d'expérience qui connaissent ces pays et y assurent la présence de la France – avec, évidemment, notre réseau diplomatique.

Enfin, il est indispensable d'améliorer l'évaluation des projets. Il faut progresser sur ce point, et pour cela, il faut légiférer. Je souscris aux conclusions du rapport rendu par notre collègue Hervé Berville à ce sujet : le Parlement doit légiférer clairement sur cette question, fixer les objectifs de l'aide au développement et prévoir les moyens nécessaires à une évaluation réelle et objective des résultats obtenus. Monsieur le ministre, légiférerons-nous sur cette question dès l'année 2019, en vue de concevoir un plan pluriannuel ?

Ces remarques faites, en guise de conclusion, je vous recommande, en tant que rapporteur spécial sur l'aide publique au développement, de voter ces crédits. J'avais dit, l'an dernier, que nous jugerions l'action du Gouvernement sur le montant prévu en autorisations d'engagement pour l'année 2019 : les crédits nécessaires sont bien présents. L'an prochain, nous jugerons sur les crédits de paiement : c'est dans l'ordre des choses.

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