Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du mardi 20 novembre 2018 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2019 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

Voici donc le Gouvernement surpris, avec les « gilets jaunes », par un mouvement de contestation populaire de son budget, chose assez inédite dans l'histoire de France. À vous entendre, nos concitoyens ne se mobiliseraient que parce qu'ils ne comprennent pas la justesse de vos mesures. Vous parlez, comme le Président de la République, d'un simple « besoin de pédagogie », comme si les Français étaient stupides et ne comprenaient pas la nature de votre budget, quand vous ne les accusez pas, comme M. Griveaux, de n'être que des « fumeurs de clopes qui roulent au diesel » et qui mériteraient, à ce titre, d'avoir disparu avec le XXe siècle.

En réalité, notre peuple reste très politique. Il comprend très bien votre politique et votre budget d'Ancien Régime. Qu'est-ce qui caractérise, en effet, un budget d'Ancien Régime ? C'est qu'il est un budget des taxes et des privilèges. Sous l'Ancien Régime, la taille et la capitation ne représentaient que 20 % de la fiscalité, soit approximativement la part actuelle de l'impôt sur le revenu, qui est presque le seul impôt progressif. Proportionnellement, cet impôt pèse deux fois moins sur les recettes fiscales qu'en 1981, et vous avez largement contribué à accroître ce différentiel. Or, par nature, les taxes qui sont un impôt non redistributif, ne sont pas progressives. Les gens ne remettent pas en cause le consentement à l'impôt en tant que tel : ceux qui se mobilisent contestent l'injustice fiscale.

C'est enfin, bien entendu, le budget des privilégiés. Grâce à la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune et l'instauration de la flat tax, votées avec la loi de finances pour 2018, 1 % de nos concitoyens, soit les 280 000 ménages les plus riches, ont vu leurs revenus augmenter de 4,8 %, récupérant ainsi 2,7 milliards d'euros, sur l'ensemble de vos mesures fiscales. À la fin de 2019, grâce aux deux derniers budgets cumulés, les 5 % de Français les plus riches auront capté 42 % des gains obtenus à la faveur de vos mesures socio-fiscales.

Voilà les seuls gilets que vous aimez : les gilets dorés, qui sont à notre époque ce que furent à l'Ancien Régime la noblesse et le clergé, que portait sur son dos le tiers état, autrement dit le peuple. Étonnez-vous, dès lors, que le peuple réagisse comme à la fin de l'Ancien Régime !

Mais tout cela, me direz-vous, n'est qu'un simple retour à l'envoyeur pour tous ceux qui vous avaient soutenus pendant la campagne électorale : je veux parler des 600 donateurs qui, à eux seuls, avaient contribué pour plus de la moitié aux 9 millions d'euros du budget de campagne d'Emmanuel Macron. Ils se retrouvent très largement, on pourrait le vérifier dans le Who's who, dans les bénéficiaires de votre politique.

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