Intervention de Coralie Dubost

Séance en hémicycle du mardi 20 novembre 2018 à 21h30
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCoralie Dubost :

L'article 2 se fonde sur un constat que tout le monde partage, celui de l'engorgement de la justice, que quelques chiffres suffiront à illustrer. Il y a d'abord un allongement manifeste du délai de traitement des affaires, puisqu'en dix ans, les délais de jugement sont passés en moyenne de sept mois et demi à plus d'un an dans les tribunaux de grande instance. Le taux des affaires en attente a lui aussi augmenté, de 26 % dans les tribunaux de grande instance, de 29 % dans les tribunaux d'instance et de 28,4 % dans les conseils de prud'hommes. Le constat est le même à tous les niveaux et sur tout le territoire.

Comme mon collègue Gouffier-Cha l'a souligné, les modes alternatifs de règlement des conflits favorisent souvent une meilleure acceptation de la décision de la part du justiciable. Celui-ci est en effet impliqué dans le processus de décision, dans un temps de dialogue constructif, et il bénéficie par ailleurs d'une pédagogie de la solution, qui entraîne une meilleure acceptation. Outre le fait qu'ils réconcilient les citoyens et la justice et qu'ils sont plus rapides et moins coûteux, les modes alternatifs de règlement des conflits permettent aussi d'envisager une poursuite de la relation entre les parties, ce qu'une décision de justice ne permet pas, lorsqu'elle est trop brutale.

Je voudrais enfin souligner, en faisant un clin d'oeil à d'anciens collègues, que l'essor des modes alternatifs de règlement des conflits correspond aussi à un souhait qui s'exprime à l'échelle européenne. Déjà, en 2008, une directive européenne appelait au développement de la médiation civile et commerciale en Europe, notamment pour les litiges transfrontaliers. Nous nous inscrivons aujourd'hui dans son prolongement. En 2013, plusieurs scientifiques du laboratoire de recherches de Montpellier avaient publié des contributions sur le sujet dans la Revue des affaires européennes. Le professeur Laurent Coutron écrivait notamment qu'aucun État membre n'échappait à cette « dilection contemporaine pour le recours au juge », à ce phénomène général de juridictionnalisation des rapports sociaux. Le professeur Guy Canivet, quant à lui, y voyait le signe de la naissance d'une démocratie contentieuse, tandis que le professeur Foyet appelait à endiguer cette « maladie processive » du XXIe siècle.

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