Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du mercredi 21 novembre 2018 à 21h30
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Après l'article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Cet amendement vise à déjudiciariser la procédure de changement de sexe à l'état civil.

En effet, le changement de la mention du sexe n'emporte aucun enjeu d'ordre public et permet une meilleure protection du droit à l'autodétermination de sa personne, contenu dans le droit fondamental à la vie privée. La législation actuelle oblige encore à rendre public un fait qui relève du privé et de l'intime.

Il est incompréhensible qu'il faille passer devant une juridiction afin que celle-ci détermine une réalité que seule la personne requérante peut apprécier. La définition de l'identité de genre ne doit pas faire partie des compétences d'un juge, comme s'il s'agissait d'une substance quantifiable et extérieurement observable. Si l'autorité judiciaire, au titre de l'article 66 de la Constitution, est la gardienne des libertés individuelles, elle doit l'être pour la personne détentrice de ces libertés et non contre elle.

Or la législation actuelle ne protège pas mieux les droits individuels, au contraire. Elle se fonde sur une idéologie considérant qu'une personne naît femme ou homme et que ces catégories sont immuables et exclusives l'une de l'autre. Cette idéologie nourrit la transphobie et la violence institutionnelle contre les personnes intersexes. Elle cause des discriminations dans tous les pans de la vie pour les personnes concernées : accès à l'emploi, au logement, aux soins, aux services bancaires et, parfois même, au droit de vote.

La lutte contre la transphobie passe donc nécessairement par la modification de la mention du sexe à l'état civil et sur les papiers d'identité. Le 6 août 2012, la France a officiellement reconnu la transphobie, en ajoutant « l'identité sexuelle » parmi les motifs de discrimination inscrits à l'article 225-1 du code pénal.

La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle a facilité le changement de la mention du sexe à l'état civil, en permettant aux personnes concernées de faire ces démarches auprès du tribunal administratif. Elles doivent néanmoins toujours fournir des preuves. Cela les oblige à présenter au juge des éléments de leur vie privée, comme des photos ou des communications écrites.

Pourquoi leur imposer ainsi de passer sous les fourches caudines du juge, s'agissant d'une question si intime et fondamentale ? La modification du code civil que nous proposons ne perturbe en rien l'ordre public. Elle ne porte nullement atteinte à la salubrité, à la sécurité ni à la sûreté publiques.

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