Intervention de Sébastien Jumel

Séance en hémicycle du jeudi 22 novembre 2018 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 13

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Jumel :

Dans le nouveau monde, les diagnostics sont souvent remplis de bon sens : ici, celui d'une justice malade, peu efficiente, trop lente, pas suffisamment réactive pour donner aux jugements toute leur force. L'ensemble de la communauté judiciaire, comme la représentation nationale, peuvent être d'accord.

Mais la suite est aussi extraordinaire que déroutante.

Au lieu de prendre en compte un tel diagnostic pour donner à cette fonction régalienne de l'État les moyens de son efficience, de son efficacité, de sa réactivité, vous en tirez prétexte, au nom d'une idéologie high tech, pour nous présenter une justice sans juge, et, maintenant, une justice par écran interposé, dématérialisée et, ce faisant, désincarnée, déshumanisée, oubliant la dimension humaine et matérielle nécessaire à la contradiction des dossiers ou à l'appréciation de leurs subtilités.

Je veux le dénoncer une nouvelle fois, alors que vous ajoutez des éléments de privatisation de ces fonctions régaliennes, en les faisant devenir payantes, ce qui n'est pas sans nous inquiéter.

Par ailleurs, cette dématérialisation ne prend pas en compte le fait que les juridictions ne partent pas de zéro. Les avocats avec lesquels j'échange me disent que l'on peut évidemment dématérialiser les relations entre professionnels, mais que, pour le reste, s'agissant de la formation des greffes et des moyens matériels, le compte n'y est pas.

Enfin, on trouve le diagnostic posé par une institution impartiale, renommée, qui ne siège pas ici : le Défenseur des droits estime que la numérisation des services publics creuse les inégalités et qu'elle constitue une énorme difficulté pour les personnes vulnérables. Nous en avons déjà fait l'exemple dans nos territoires, notamment avec la numérisation des cartes grises : nous ne sommes pas des bleus. Ce faisant, à l'heure où 33 % des Français déclarent être peu à l'aise avec internet, non contents d'accentuer la fracture territoriale, vous aggravez la fracture sociale ;

Vous pouvez nous raconter que le dispositif est moderne, libéré, simplifié. En réalité, il est déshumanisé, désincarné et, au bout du compte, peu efficace.

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