Intervention de Jean-Michel Mis

Séance en hémicycle du jeudi 22 novembre 2018 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 19

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Mis :

Comme vous l'avez rappelé dans vos propos liminaires, madame la ministre, le projet de loi de programmation 2019-2022 et de réforme pour la justice fait entrer notre justice dans une nouvelle ère, celle du numérique, tout en renforçant l'accessibilité et la qualité de la justice pour les justiciables.

L'article 19 doit rendre disponible gratuitement pour tous, en open data, les décisions de justice. Il porte à son terme le processus de diffusion au public des décisions de justice, prévu par les articles 20 et 21 de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, en mettant en cohérence les régimes d'accès et de diffusion des décisions de justice dans les deux ordres de juridiction. Ces décisions seront désormais accessibles à tous, soit en ligne, soit au greffe.

Permettez-moi un point d'histoire pour rappeler que cette question était déjà à l'ordre du jour au XIXe siècle, lorsque Augustin-Charles Renouard, conseiller à la Cour de cassation, écrivait dans son Traité des droits d'auteur dans la littérature, les sciences et les beaux-arts, publié en 1839 : « Les jugements et arrêts des cours et tribunaux, que ces tribunaux soient composés d'un juge ou de plusieurs, ne sont la propriété ni du siège duquel ils émanent, ni des plaideurs qui les provoquent. Ils appartiennent au pays tout entier ; leur publicité est à la fois une garantie pour les justiciables et un moyen d'enseignement pour tous les citoyens ».

Tel est bien l'objectif de cet article. Cet open data des décisions de justice renforcera la confiance et la transparence, mais favorisera aussi l'accès à la connaissance de la jurisprudence rendue, dans des conditions qui garantissent au justiciable la protection des informations qu'il a communiquées lors du procès.

Nous défendons le principe que cette publicité des décisions doit être suffisamment encadrée et permettre à tous d'accéder aux décisions de justice dans les mêmes conditions. Il ne faut pas qu'à partir des analyses, aujourd'hui possibles, de ces données, nous nous laissions tenter par une forme de justice prédictive. Il ne faut pas non plus que ces publicités portent atteinte à la vie privée ou à la sécurité des personnels de la justice, ni aux parties ou aux tiers. La possibilité d'anonymisation pour les magistrats et les greffiers, et l'anonymisation de principe pour les parties et les tiers, prévues dans cet article, remplit cet objectif.

Je tiens ici à saluer le travail conduit en commission des lois par notre rapporteure, Laetitia Avia, qui a concilié la transparence et la publicité, tout en assurant la protection de nos concitoyens.

La mise en oeuvre de ces dispositions, comme vous l'avez indiqué, madame la ministre, se fera progressivement, en commençant par les décisions de la Cour de cassation et en poursuivant par celles des cours d'appel, jusqu'à celles des conseils de prud'hommes et des tribunaux de commerce.

L'article 19 me semble satisfaire ainsi, comme le souhaitait la Commission nationale de l'informatique et des libertés – CNIL – en août 2017, le délicat équilibre entre accès au droit et protection de la vie privée.

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