Intervention de Philippe Gosselin

Séance en hémicycle du vendredi 23 novembre 2018 à 15h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Avant l'article 52

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Vous le constatez : l'exercice sera très contraint. C'est d'ailleurs l'une des grandes difficultés que nous dénonçons.

Ce n'est pas l'habilitation à prendre des ordonnances qui nous pose un problème en soi. Je suis attaché à la Constitution de la Ve République et je ne vois pas d'inconvénient à ce qu'un gouvernement y recoure de temps à autre. Le problème, c'est que cette question arrive comme un cheveu sur la soupe. Je ne sais pas quelle mouche a piqué la majorité ou le ministère. J'évite d'en faire une affaire personnelle, madame la garde des sceaux, et ce n'est évidemment pas Nicole Belloubet que je vise, mais la ministre. Je ne sais pas ce qui vous a poussé à considérer qu'il y avait là une urgence absolue à réformer cette ordonnance.

Nul ne conteste la nécessité de remettre sur la table l'ordonnance de 1945, mais pourquoi le faire maintenant ? Et pourquoi sous cette forme ? Cette forme nous contraint, puisque nous ne pouvons pas déposer d'amendements, mais seulement des sous-amendements, qui ne peuvent modifier qu'un ou deux mots, ou quelques virgules. Nous sommes donc contraints de sous-amender n'importe quoi, puisque nous ne pouvons rien amender, de fait. Je vous propose donc la modification suivante : « d'amour, belle marquise, mourir vos beaux yeux me font », ou plutôt de préciser que le Gouvernement est habilité à modifier et à compléter les dispositions relatives à la justice pénale des mineurs « à droit constant ».

On va me dire que tout cela n'est pas très sérieux, puisque l'expression « à droit constant » est antinomique avec l'idée de modifier et de compléter. Certes, mais il se trouve que je ne peux pas faire autrement. Le droit parlementaire, le règlement de l'Assemblée nationale et la Constitution me contraignent. Que puis-je faire dans ces conditions ? Pas grand-chose. J'ai un pouvoir d'alerte, j'ai le verbe, mais vous piétinez les droits du Parlement sur un sujet qui est essentiel et dont nous aurions dû débattre davantage.

La main tendue, nous pourrions l'accepter si le menu était généreux. Mais il se trouve, madame la ministre, que vous venez nous exposer tout à la fois votre conception, votre calendrier et le contenu de la réforme que vous envisagez. Vous nous présentez une main tendue, mais vous nous dites qu'on ne touchera pas à la majorité pénale, vous annoncez des mesures éducatives et beaucoup d'autres. Le menu n'est plus un menu, mais un repas imposé ! Moi j'aime bien quand il y a un peu de choix, entre le fromage et le dessert, par exemple. Le sujet est suffisamment sérieux pour que je ne file pas davantage la métaphore, mais ce menu unique est la traduction d'une pensée unique. Or la modification de ce texte exige de la précaution et de la sagesse, et certainement pas de la précipitation.

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