Intervention de Sabine Thillaye

Séance en hémicycle du mardi 10 octobre 2017 à 15h00
Déclaration du gouvernement suivie d'un débat sur l'avenir de l'union européenne

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Thillaye, présidente de la commission des affaires européennes :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si l'Europe est un vieux continent, l'Union européenne est une idée moderne. Même si beaucoup de choses ont été dites ce soir, j'aimerais rappeler qu'elle est un projet d'avenir sans équivalent dans l'histoire. C'est une oeuvre juridique et humaine inédite et toujours en devenir. Je tiens ici à remercier le Gouvernement d'avoir pris l'initiative d'organiser ce débat, une semaine seulement après le début de la session ordinaire. C'est la preuve que les questions européennes sont consacrées au premier rang des priorités.

Très souvent on souligne que l'Europe manque d'un récit permettant de fonder son avenir et qu'on ne saurait simplement se contenter d'évoquer la guerre. Je ne suis pas d'accord : nous avons un récit. L'Europe aujourd'hui, c'est 7 % de la population du monde, 25 % de sa richesse mais 50 % de ses dépenses sociales. Le social est une valeur fondamentale de l'Europe. Nous avons de quoi civiliser la mondialisation si nous voulons nous en donner la peine. Si nous acceptons d'ôter nos lunettes nationales – françaises, allemandes ou espagnoles – d'États membres et chausser des lunettes extérieures, que constatons-nous ? Que nous sommes enviés, alors que nous passons notre temps à critiquer l'Europe du matin au soir ; que des peuples à notre porte votent avec leurs pieds pour venir ici profiter de ce que nous sommes : des États de droit et des démocraties fondées sur des valeurs. Nous devrions nous le rappeler de temps à autre !

En ce début du XXIe siècle, nous sommes face à une rupture majeure. La révolution numérique, qui ouvre une ère nouvelle, imposera un changement d'échelle qui peut déboucher sur une redistribution totale des cartes. Pour rester dans l'histoire, garder notre capacité d'influence et défendre notre modèle social et notre art de vivre, l'Europe est notre meilleure chance.

Toutefois, pour réussir, elle doit s'appuyer sur deux éléments : des ambitions et une méthode. Les ambitions ont déjà été évoquées par les précédents orateurs : l'Europe de la défense, la sécurité, l'intelligence artificielle, la gouvernance de la zone euro – je n'y reviens pas. La commission des affaires européennes veut être une force de propositions sur tous ces sujets : elle s'en préoccupera.

Le deuxième élément déterminant pour engager la refondation de l'Europe est la méthode. Pour réussir, l'ensemble des acteurs compétents – institutions, gouvernements, parlements nationaux, société civile – doivent s'engager dans une démarche collective. Je souhaite que la commission des affaires européennes porte cette dynamique. En plus de ses missions de contrôle, elle doit agir pour un dialogue interinstitutionnel modernisé.

Il nous faut aussi dépasser le seul cadre de l'Assemblée nationale et multiplier les contacts avec les autres parlementaires européens. La France est attendue en Europe et sa voix compte. Mais, pour réussir, nous devons aussi nous ouvrir à d'autres points de vue. Loin de constituer des obstacles, cette interculturalité et cette diversité sont une chance pour l'Europe. Elles bousculent nos habitudes et nous invitent à penser autrement. Elles sont ainsi sources d'innovation. Je suis persuadée que l'Union européenne aura toujours une longueur d'avance grâce à ses différentes manières de penser. De langues différentes, fondements de la pensée, naissent des logiques différentes qui sont sources de richesse et d'innovation.

À tous les niveaux – à Bruxelles, à Strasbourg, à Paris et dans l'ensemble des États membres – les questions européennes doivent faire l'objet d'un débat public. Les conventions démocratiques doivent également nous permettre d'engager un vrai travail de pédagogie sur les politiques existantes et le fonctionnement des institutions. Les parlements nationaux ont une responsabilité majeure. Le traité de Lisbonne leur donne une vraie légitimité pour agir. Saisissons-la ! C'est à nous, députés français, d'amplifier cette dynamique. Nous sommes le trait d'union entre l'échelon européen et les territoires.

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, nul ne peut dire avec certitude aujourd'hui ce que sera l'Europe au XXIe siècle, mais ce qui importe, c'est qu'elle est une oeuvre politique en devenir. Tout reste à écrire.

Je finirai sur une question fondamentale : oserons-nous devenir une vraie puissance ? Oserons-nous jouer vraiment la solidarité ? Oserons-nous dépasser nos égoïsmes nationaux ?

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