Intervention de Florence Lasserre

Séance en hémicycle du jeudi 29 novembre 2018 à 15h00
Activités agricoles et cultures marines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFlorence Lasserre :

Le Président de la République a fait de la transition écologique un axe extrêmement fort de son mandat. Aujourd'hui, tout le monde convient du bien-fondé de cette perspective et une très large majorité de nos compatriotes est également convaincue qu'il est nécessaire d'agir. C'est là une donnée inéluctable : il nous faut réussir si nous voulons transmettre aux générations futures les clés d'un développement économique, social et environnemental viable.

Dans cette optique, notre rôle est particulièrement important à travers l'examen de lois structurantes pour un avenir commun. Nous le savons toutes et tous : il n'est pas de protection environnementale sans que les acteurs de la filière agricole soient forts. Le rôle que joue cette filière pour la protection des milieux aquatiques est fondamental.

Pourtant, l'activité conchylicole est aujourd'hui menacée et je crains, si la réglementation française n'évolue pas, que la profession ne soit vouée à disparaître. La conchyliculture joue un rôle déterminant dans le maintien de l'équilibre écologique de la faune et de la flore marines. Il ne faut pas oublier qu'elle est la principale branche de l'aquaculture française et qu'elle est répartie sur l'ensemble du littoral français, représentant ainsi une activité économique très importante et un enjeu environnemental majeur.

À cet égard, de nombreuses études scientifiques montrent le lien fort entre l'activité conchylicole et le bon état écologique des eaux marines. Les conchyliculteurs ont en effet besoin d'eaux littorales saines afin de poursuivre leurs exploitations. Les activités ne peuvent perdurer que si les milieux marins et côtiers sont en bon état : le lien entre maintien de la conchyliculture et biodiversité est donc primordial.

L'Europe a pris la mesure de ce dossier et nous ne devons pas oublier que, dans le cadre de la politique commune de la pêche, le Fonds européen pour les affaires maritimes a permis à la France, pour la période 2014-2020, de disposer d'une enveloppe de 588 millions d'euros.

Or, malgré les mesures adoptées par l'Union européenne en faveur d'une meilleure prise en compte de l'activité conchylicole, notre droit national est resté en retrait et n'a pas suffisamment pris en compte la question du maintien de la profession et de son devenir. Il est donc très difficile pour les acteurs mobilisés sur ce sujet de mettre en oeuvre un plan efficace de protection et de sauvegarde de l'activité. Nous ne pouvons que le regretter, d'autant plus que certains réseaux, comme le réseau de surveillance REPAMO, font un travail particulièrement important.

Aussi, je pense qu'il est grand temps que le législateur s'engage fortement en faveur du maintien et du développement de l'activité conchylicole, dont je rappelle qu'elle constitue une activité fondamentale dans certaines régions.

Tel est l'objectif que notre collègue Jimmy Pahun a assigné à la proposition de loi que nous discutons aujourd'hui : favoriser le développement des activités agricoles déjà présentes pour répondre aux besoins actuels et futurs des conchyliculteurs.

Pour y parvenir, la proposition de loi vise à contrer les risques que représentent les pressions foncières qui s'exercent sur les chantiers conchylicoles du nord de la France, ainsi que sur les mas conchylicoles du sud. Il est en effet vital pour le maintien de la profession d'agir en priorité sur le maintien de la vocation agricole des exploitations aujourd'hui dédiées à la culture marine.

Pour y parvenir, il est nécessaire de renforcer le droit de préemption des SAFER, afin de mettre un terme à la stratégie de détournement du droit auquel certains se livrent aujourd'hui, ce qui leur permet de s'enrichir grâce à la spéculation foncière.

Le groupe MODEM et apparentés partage avec le rapporteur l'espoir que l'adoption de ces dispositions évitera l'apparition, sur le littoral, de résidences – pour la plupart secondaires – à l'emplacement d'anciennes exploitations conchylicoles.

Cette ambition s'inscrit parfaitement dans la suite logique des dispositions que nous avons votées dans la loi ELAN – évolution du logement et aménagement juridique – et qui ont été récemment confirmées par le Conseil constitutionnel : au sein du groupe MODEM et apparentés, nous refusons de voir nos terres agricoles transformées en chambre d'hôtes, en gîtes ou en restaurants. Si ces activités sont évidemment très importantes, car vecteurs de tourisme et participant au nécessaire développement économique, leur croissance ne doit pas se faire au détriment des terres agricoles.

Je tiens à saluer l'ensemble des représentants des groupes politiques présents lors des auditions qu'a menées le rapporteur et lors de l'examen en commission : nous avons pu construire ensemble un texte d'équilibre et de consensus qui répond à des préoccupations territoriales fortes auxquels les élus du littoral sont confrontés au quotidien.

Cette proposition de loi est le fruit d'une large concertation, d'abord avec la profession conchylicole et les élus locaux qui subissent ces importantes pressions foncières et touristiques, puis avec les députés de la majorité et de l'opposition afin d'élaborer un texte transpartisan qui puisse soutenir une activité essentielle pour la vie socio-économique de nos territoires.

Nous sommes tous profondément attachés au maintien des exploitations agricoles, qui sont parties intégrantes de nos territoires et de leur identité. À travers cette proposition de loi, mon groupe souhaite préserver ces économies locales qui valorisent nos paysages, respectent l'environnement et façonnent la spécificité de chaque espace.

Je me félicite donc que cette proposition de loi ait été adoptée à l'unanimité en commission et j'espère que la discussion en séance sera tout aussi constructive, car le tissu économique est complexe : dans les nombreuses communes littorales françaises, près d'un emploi salarié sur deux est lié à l'économie résidentielle et à la présence de touristes et de résidents permanents. Or ces emplois évoluent étroitement avec des emplois productifs liés à la mer et à la culture marine. La bonne cohabitation de ces deux types d'activités est donc centrale et reste un gage de développement local performant.

Mes chers collègues, il nous appartient de tout mettre en oeuvre afin de préserver les activités agricoles dans une zone aussi fragile que le littoral, qui est victime de fortes pressions touristiques, démographiques et foncières. Le littoral dont nous parlons n'est pas seulement métropolitain, mais également ultramarin, car le droit de préemption des SAFER s'applique également aux établissements publics fonciers agricoles des collectivités et territoires d'outre-mer. Les territoires ultramarins disposeront donc, eux aussi, d'outils similaires de préservation du foncier.

Le rôle social et économique de ces activités, leur participation à l'entretien du patrimoine historique et naturel du pays, leur attrait en matière de tourisme, mais aussi leur importance pour le maintien d'une bonne qualité de l'environnement sont les atouts de cette filière au service de la vitalité et du dynamisme du pays.

Nous ne pouvons pas nous permettre de prendre le risque de voir disparaître cette activité au profit d'une « cabanisation » du littoral. Une telle perte serait dramatique tant sur le plan social que du point de vue environnemental. Ces activités primaires permettent aux communes littorales de vivre et d'avoir des résidents toute l'année.

C'est pourquoi le groupe MODEM et apparentés votera avec enthousiasme cette proposition de loi pour la protection des activités agricoles et des cultures marines en zone littorale.

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