Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du lundi 3 décembre 2018 à 16h00
Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Article 42 bis b

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Monsieur Dufrègne, vous parlez de justice de proximité, mais il faut voir ce dont nous parlons ! Il s'agit ici de grande criminalité, de délinquance organisée, de réseaux de trafiquants. En la matière, il faut qu'une juridiction unique soit compétente pour l'ensemble du territoire national, afin de mieux coordonner les dossiers. C'est pourquoi nous avons choisi d'étendre la compétence de la JIRS de Paris pour les affaires d'une « très grande complexité ».

Cela laisse subsister évidemment la compétence des huit JIRS qui maillent aujourd'hui notre territoire. Elles pourront prendre le début des affaires qui seront ensuite communiquées à Paris et y seront traitées.

Monsieur le rapporteur, vous avez raison de poser la question des risques de conflits de compétences. En donnant à la JIRS de Paris compétence nationale, nous ajoutons un échelon de compétence nationale au-dessus des parquets territoriaux et des JIRS, et à côté des parquets nationaux – le parquet national financier, le futur parquet national antiterroriste et les pôles de santé publique, auxquels s'ajoutera dans quelques mois la compétence du procureur européen.

Aujourd'hui, sur tout le territoire, les parquets sont engagés dans la lutte contre la délinquance sous toutes ses formes ; mais leur action est trop souvent dispersée, pas assez coordonnée ; les priorités ne sont pas suffisamment affirmées. Cela joue malheureusement au bénéfice des délinquants, des criminels, souvent mieux organisés. C'est pourquoi nous souhaitons, je le disais, donner une compétence de coordination à la JIRS de Paris, qui sera dotée d'un pôle d'analyse criminelle des procédures afin de faciliter les recoupements et les échanges d'informations entre parquets.

Mon objectif est de définir, et de conduire avec les parquets, une véritable politique pénale, qui sera construite sur trois niveaux : territorial, régional, national. Nous lutterons ainsi plus efficacement contre le terrorisme, mais aussi contre toutes les formes de criminalité organisée. Les dossiers les plus complexes et les plus techniques, par exemple en santé publique, seront aussi mieux pris en charge.

Je vous rejoins, monsieur le rapporteur, sur la nécessité de clarifier les modalités selon lesquelles s'articulera l'action des différents parquets, afin de pallier d'éventuels conflits de compétences, et afin que les investigations, les procédures, soient très vite confiées au parquet le mieux placé pour les conduire.

Dès que la loi sera adoptée, je mettrai donc en place un groupe de travail auquel je demanderai de me faire rapidement des propositions concrètes sur ce sujet. Il devra notamment réfléchir d'une part sur la possibilité de doter les parquets nationaux et régionaux d'un pouvoir d'évocation, et sur l'articulation de celui-ci avec les procédures ouvertes à l'instruction, et d'autre part sur un dispositif d'arbitrage des éventuels conflits entre parquets et procureurs généraux.

Les préconisations que pourrait formuler ce groupe pourraient figurer, dès 2019, soit dans le projet de loi relatif au statut du parquet – qui découlera de la révision constitutionnelle – soit dans celui qui instaurera le parquet européen que j'évoquais tout à l'heure.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.