Intervention de Jean-Michel Blanquer

Réunion du mardi 3 octobre 2017 à 17h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'Éducation nationale :

Madame Rist, la pénurie de médecins scolaires est une véritable question, assez ancienne d'ailleurs. Comme chacun le sait, il ne s'agit pas d'une question de support, mais de ressources, c'est-à-dire de volontaires pour occuper ces postes. Sur ce sujet que je considère comme l'un des plus importants, j'essaie de raisonner par objectif. Le premier est que tous les élèves de 6 ans puissent bénéficier de la visite médicale obligatoire. Aujourd'hui, ce n'est pas une réalité. Dans un premier temps, je voudrais au moins atteindre cet objectif. Pour y arriver, la principale piste – même s'il y en a d'autres – réside dans une coopération plus étroite avec le ministère de la santé. Nous avons commencé à travailler sur ce dossier avec Agnès Buzyn. Il conviendrait notamment que des médecins non scolaires viennent prêter main-forte aux médecins scolaires pour l'accomplissement de cette mission. Nous devons également dialoguer tant avec le corps des médecins scolaires que celui des infirmières, pour organiser les conditions d'exercice efficaces de ces visites.

Ce sont des solutions de court terme. À moyen et long termes, il nous faut développer de nouvelles vocations de médecins scolaires, notamment via l'inscription de la médecine scolaire au concours des internats des facultés de médecine, afin de disposer structurellement dans le futur de plus de médecins scolaires. Nous allons progresser sur ce dossier, mais je ne peux pas m'engager sur le rythme du progrès car il est dépendant de nombreux critères, notamment le volontariat des uns et des autres. C'est un sujet d'importance. Encore une fois, je souhaite aboutir à court terme à la systématisation de la visite médicale des six ans. Ce point est en effet fortement lié à d'autres qui viennent d'être abordés, et d'abord à la lutte contre les inégalités. De fait, les enfants les plus défavorisés sont les plus touchés, du fait du non-repérage d'un certain nombre de problèmes – d'oreille, d'oeil, ou de dyspraxie. Je suis donc très attentif à ce sujet de santé publique et de pédagogie.

Madame Pau-Langevin, je partage votre objectif de faire reculer les inégalités. Je ne reviens pas sur mes propos concernant les rythmes scolaires car je pense profondément, sur ce sujet comme sur d'autres, que nous devons nous attacher non pas seulement aux tuyaux mais à leur contenu : le débat ne doit pas se cristalliser sur quatre jours ou quatre jours et demi d'école, mais sur ce qui se passe pendant ces journées. Je le dis : des inégalités ont été accentuées ces dernières années par les nouveaux rythmes scolaires. Ne faisons pas semblant de ne pas le voir ! Je discute avec des maires, j'ai vu les réalités de terrain. N'oublions pas que la situation était hétérogène même avant notre réforme, puisque plus de 20 % des communes avaient choisi de concentrer les activités périscolaires sur le vendredi après-midi, ce qui était pour le moins discutable dans un certain nombre de cas. Par ailleurs, dans certaines communes, il s'agissait plus de garderie que de véritables activités périscolaires. Enfin, dans d'autres collectivités, les enfants ne sortaient pas à la même heure tous les jours et la désorganisation était pénible pour les familles. Nous n'avons pas changé une situation d'égalité pure et parfaite, loin s'en faut !

Mais nous sommes suffisamment honnêtes pour le concéder : la réforme a représenté un progrès dans un certain nombre de cas. Nous en tenons compte tout en proposant de changer ce qui ne va pas. Cela va dans le sens de l'égalité : nous allons aider les communes qui se trouvent dans cette situation à faire mieux que précédemment. C'est une logique de confiance, confiance dans les acteurs de terrain, les mieux à même de juger de ce qui est bon pour eux. Au travers de cette évolution, nous visons non pas une égalité de discours, mais une égalité concrète.

La réforme de l'éducation prioritaire fera l'objet de discussions dans les temps à venir. Il n'est pas question aujourd'hui de mettre quoi que ce soit en cause. Il n'y a donc pas de raison de créer la moindre inquiétude sur ce sujet. Par contre, il nous semble important de discuter toujours du renforcement de l'efficacité des moyens alloués à l'éducation prioritaire. C'est la raison de la « mesure REP + » prise pour cette rentrée et ce sera le cas pour les autres niveaux – collège et lycée – dans le futur. Par ailleurs, comme vous l'avez vu, notre projet de budget 2018 commence à envisager la revalorisation des primes des enseignants de REP +. Cela va dans le sens de la stabilisation, de l'attractivité et de la qualité que vous appelez de vos voeux dans ces réseaux.

En matière de mixité scolaire, là encore, je serai respectueux des expérimentations d'ores et déjà engagées et attentif à leurs résultats, afin d'évaluer si ceux-ci peuvent inspirer de futures politiques publiques. Je suis pour l'instant dans l'attente du parachèvement de ces expérimentations. De façon générale, je pense que la mixité scolaire viendra surtout des éléments d'attractivité que nous créerons dans les établissements en difficulté. C'est l'objectif du rétablissement des classes bilangues, mais également du latin et du grec ou des sections européennes. Nous serons également attentifs à tous les projets que les collèges pourront présenter, dès lors qu'ils viseront à créer de la mixité scolaire.

S'agissant du CSP et de la logique de confiance, je maintiens mes propos : je pense être entré dans une logique de confiance – je demande de la confiance et j'essaie de répandre de la confiance, notamment vis-à-vis des acteurs. J'observe que les mesures que je viens de commenter sont approuvées par plus de 80 % des personnes interrogées lors des enquêtes d'opinion. Cela n'est pas souvent arrivé à l'éducation nationale au cours des dernières années. C'est donc bien un signal positif de confiance. Je note que cela irrite justement ceux qui aiment bien casser la confiance. Quand vous plantez des arbres, il y a toujours des gens qui arrivent avec des allumettes… Je ne jouerai pas à ce jeu. Je ne cultiverai pas les polémiques et ne ferai pas semblant de croire que les sujets que vous évoquez divisent. Une personne a démissionné, le conseil reste en place. Comme j'ai eu l'occasion de le dire, je respecte infiniment ses membres. Ils sont respectables et je vais discuter de manière respectueuse avec eux en attendant le même respect dans l'expression publique des uns et des autres.

Monsieur Testé, vous avez raison, nous avons besoin d'accompagner les mesures quantitatives liées au dédoublement des CP par des mesures de nature qualitative. C'est même une évidence : le dédoublement en soi n'est pas suffisant. Des mesures de formation, notamment de formation continue des maîtres, sont à l'étude. Dès le mois de juin, nous avons enclenché des plans de formation par le biais des inspecteurs de l'éducation nationale, et des séances nous permettant de mobiliser l'ensemble de nos cadres autour de la réussite des élèves de CP en REP +.

Nous voulons nous situer à la pointe des meilleures méthodes pédagogiques pour l'entrée dans la lecture, l'écriture et le calcul. Nous voulons aussi disposer de maîtres confirmés dans ces classes. C'est ainsi que 95 % des maîtres et maîtresses affectés en CP REP + ont au moins trois ans d'expérience, et nous visons 100 % pour l'année prochaine. Par ailleurs, nous ne voulons plus de stagiaires en CP. Certains affirment que la classe de CP n'est pas si importante. Je leur laisse la responsabilité de ce jugement. Pour ma part, je réitère mes propos : le CP est extrêmement important. C'est pourquoi, comme vous l'avez dit, il faut parvenir à la stabilisation des équipes enseignantes. Les futures primes vont dans ce sens. Nous visons également l'attractivité par la réussite : il sera extrêmement enthousiasmant pour des professeurs d'enseigner en REP et en REP + si nous favorisons ce climat de réussite. Nous serons particulièrement attentifs aux deux points que vous soulignez : la formation et à la stabilisation.

Monsieur Bournazel, je vous remercie pour votre propos liminaire. Sur la question des rythmes scolaires, nous avons fait le choix de nous en remettre aux compétences existantes et donc aux communautés éducatives, en lien avec les mairies. Donc, même si le cas de Paris est effectivement particulier, la commune est malgré tout compétente. C'est dans ce cadre que les décisions seront prises. Quel que soit le choix de la ville, le ministère de l'éducation nationale souhaite nouer des partenariats qualitatifs avec la mairie, mais également arrondissement par arrondissement. Nous sommes attachés à cette qualité, au-delà du débat entre quatre jours et quatre jours et demi.

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