Intervention de Alain Tourret

Réunion du mercredi 28 novembre 2018 à 16h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

Il se trouve que j'étais l'un des rapporteurs de cette loi. Nous étions huit rapporteurs plus un rapporteur général, notre ami M. Richard Ferrand, et au titre de l'ouverture, il y avait sept rapporteurs socialistes et un non-socialiste. Dès lors, j'ai estimé que j'avais le droit de parler autant que les sept autres réunis, bien évidemment ! (Sourires.)

L'observation que je pourrais faire est que ce fut une loi absolument exceptionnelle. Mme Cécile Untermaier l'a souligné, jamais une telle coproduction n'avait été réalisée entre le pouvoir exécutif, d'un côté, et le pouvoir législatif, de l'autre. Cette coproduction a été la volonté du ministre de l'économie. Je puis vous assurer que nous avons tous compris qu'il serait Président de la République, à la manière dont il se comportait en tant que ministre de l'économie, et nombre d'entre nous se sont alors rapprochés de lui, moi le premier.

Ma deuxième observation est qu'une séparation, à mon sens anormale, a été faite entre la loi « El Khomri » et la loi « Macron », pour des raisons purement politiques que chacun connaît, mais qu'elle s'est faite contre l'avis de l'ancien ministre de l'économie. Cela a été, je pense, une grave erreur. Si j'avais une préconisation à formuler aujourd'hui, c'est que la mission d'information soit la même sur la loi « El Khomri » et sur la loi « Macron », car il existe de nombreux points communs entre les deux lois. Cela permettrait d'avoir une position plus globale, nécessaire pour une loi de cette importance. Monsieur le président, vous avez bien fait de le rappeler.

Au-delà des propositions du rapport, que je fais toutes miennes, quels sont les échecs ?

Premièrement, la justice prud'homale. Pendant quarante ans, j'ai plaidé devant les conseils de prud'hommes de France et de Navarre, comme l'on dit. C'est donc un sujet que je connais bien. Ce qui est effrayant dans la justice prud'homale, c'est sa lenteur. Or la loi « Macron » n'a rien résolu et nous sommes toujours à plus de 32 mois pour faire venir une affaire devant un juge départiteur. Si vous ajoutez deux ans pour la cour d'appel et deux à trois autres pour la Cour de cassation, ce sont des procès qui durent entre sept et dix ans. Se rend-on compte de ce que signifie un procès qui dure de sept à dix ans ? Sur ce point, nous ne sommes arrivés à rien. Ne faut-il pas remettre en discussion le fait d'aller directement devant le juge départiteur ? Nous aurions vraiment intérêt à y réfléchir. Tous les syndicats y sont opposés, qu'ils soient patronaux, ouvriers ou de cadres, mais face à cette absence de résultats, nous devons nous poser des questions.

Deuxièmement, j'étais chargé d'une grande innovation, Monsieur le président : que, dans les redressements judiciaires, on permette aux créanciers chirographaires de participer au capital de l'entreprise à la hauteur du montant de leurs créances. La loi allemande et la loi américaine le prévoient. Mais il est encore trop tôt pour pouvoir en décider, car l'autre question que je me pose est de savoir si un délai de deux ans est suffisant pour l'évaluer.

Je voudrais souligner le grand travail réalisé par l'ensemble des rapporteurs et leur dire que, bien évidemment, je voterai la publication de leur rapport.

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