Intervention de Emmanuel Roux

Réunion du jeudi 22 novembre 2018 à 10h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Emmanuel Roux, président de la commission juridique de la CPU, président de l'Université de Nîmes :

- J'interviens ici en tant que président de la commission juridique de la Conférence des présidents d'université, mais également avec mon oeil de président d'une petite université de région, avec un retour assez pratique par exemple sur la participation aux commissions d'examen des voeux.

En préambule, je voudrais revenir sur le fait – cela a été indiqué tout à l'heure par Philippe Baptiste – que Parcoursup s'appuie sur une procédure beaucoup plus encadrée qu'APB, qui, dans certains cas de figure, procédait à un tirage au sort illégal. Pendant des années, APB a porté des décisions qui n'avaient pas de base légale. Cela a été dit très clairement.

Le premier constat en terme d'organisation est que nous avons été guidés pendant toute la durée de la procédure à la fois par le ministère de l'Enseignement supérieur, par la direction générale de l'enseignement supérieur, par les chancelleries qui ont accompagné, alimenté la réflexion et qui ont produit systématiquement des notes. Nous n'avons jamais été laissés à l'aventure et cela a permis d'encadrer le processus qui s'inscrit dans une logique de transparence.

Je voudrais rappeler la façon dont les choses se sont passées au sein des établissements : au-delà de la vision nationale, les établissements en interne ont dû s'organiser pour produire des classements qui ont été peu contestés. Pour rappeler rapidement la chronologie, le processus a démarré en 2017-2018 par le vote par les conseils d'administration des universités entre décembre et janvier, de deux dispositions : d'abord les « attendus », définis à un niveau national, mais déclinés par les conférences disciplinaires, les conférences des doyens de droit, de médecine, de toutes les disciplines, qui se sont réunies pour dire quelles étaient les conditions a priori pour entrer en première année de la licence correspondante. De la même façon, les capacités d'accueil par licence ont été fixées au même stade, de la manière la plus publique et la plus « démocratique » qui soit.

Dans un deuxième temps, fin mars-début avril, il a fallu constituer au sein des établissements des commissions d'examen des voeux de la façon la plus ouverte et transparente possible, par arrêté du chef d'établissement qui a désigné, pour chaque licence, au moins deux enseignants-chercheurs pour y siéger. Ces commissions ont eu pour mission de décliner les attendus votés par le conseil d'administration de l'université et d'utiliser l'outil Parcoursup en paramétrant l'outil d'aide à la décision qui a permis de hiérarchiser les propositions qui nous sont arrivées via les voeux exprimés dans Parcoursup, et d'en établir une pré-liste.

Il y a eu beaucoup de discussions et de débats sur ce point, avec une confusion de la part de certains qui pensaient qu'une espèce de sous-algorithme de Parcoursup devait être appliquée alors que, en réalité, il ne s'agissait pour les commissions d'examen des voeux que de classer un certain nombre de paramètres pour définir un pré-classement des dossiers suivant une liste, ensuite « retravaillée » par chaque commission d'examen des voeux au regard d'un certain nombre de critères qui ne pouvaient pas être pris en compte de façon automatique : par exemple, la lettre de motivation, qui a pu servir pour déterminer si le candidat devait être inscrit en « oui » tout court ou en « oui si », c'est-à-dire en assortissant la première année de licence d'un certain nombre de modules complémentaires.

Il s'agit là du coeur même du travail des commissions d'examen des voeux, en fait un travail de jury d'examen. Cela est tout à fait normal et le législateur a reconnu à ce moment-là le « secret du délibéré » de ces commissions. Cela a donné lieu à nombre de polémiques, alors qu'il s'agit bien d'un travail de jury d'examen et non pas d'un paramétrage algorithmique automatique, ce qui aurait été impossible.

À l'issue de ce travail, les commissions d'examen des voeux ont produit des listes de classement d'accès à la licence, qui ont été ensuite revues par les chancelleries au regard de paramètres dont nous ne disposions pas alors, c'est-à-dire les quotas d'accès pour les boursiers et pour les candidats de l'académie. Il convient de souligner que, de ce fait, les listes produites par les universités n'étaient pas celles qui ont été en fin de compte données sur Parcoursup. À cet égard, s'agissant des améliorations encore possibles, il y a lieu d'évoquer l'idée d'anticiper le dialogue en amont avec les chancelleries, de façon à ce que les universités soient informées en amont des paramètres qui conduiront à ouvrir plus ou moins telles formations à des candidats hors académie.

À partir du 22 mai, des propositions ont été déposées sur Parcoursup et les élèves de terminale ont pu exprimer leurs choix. Cette première phase s'est interrompue pendant le bac, elle a été ensuite rouverte le 26 juin pour la seconde partie, qui s'est déroulée au fil de l'eau pendant tout l'été jusqu'au 6 septembre, date à laquelle Parcoursup a été fermé pour les universités. Pendant tout l'été, des demandes complémentaires ont pu être faites par des élèves qui n'avaient pas forcément obtenu les propositions qu'ils voulaient ou qui n'en avaient pas eu du tout.

Ainsi que Gilles Roussel l'a dit tout à l'heure, le délai était sans doute trop long. Le mois d'août a imposé de mobiliser de nombreux collègues car il fallait à chaque fois, par parallélisme des formes, que les commissions se réunissent en urgence dès qu'un dossier arrivait pour décider s'il devait être pris. Qu'il ait été décidé que la procédure s'arrêterait à la fin du mois de juillet est donc une excellente nouvelle.

Une fois le processus achevé, les chanceliers des universités ont pu « reprendre la main » durant tout le mois de septembre pour les étudiants sans affectation, et à partir du 7 septembre les universités ont pu être saisies, conformément à la loi, des demandes des étudiants souhaitant connaître les raisons justifiant la proposition de classement dans tel ou tel type de licence qui leur avait été faite.

Pour conclure par un constat, j'ai eu de récents échanges avec un certain nombre de réseaux, en particulier la présidente du réseau Jurisup, qui est la « tour de contrôle » des contentieux universitaires en France. À ce jour, il y aurait moins de dix contentieux concernant Parcoursup, et quasiment aucune demande de motivation de la part des étudiants. Le délai contentieux est maintenant dépassé. Cette situation est très différente du cas d'APB, pour lequel les recours contentieux étaient très nombreux.

Cela démontre que le dispositif a fonctionné et que la polémique que certains ont voulu alimenter, y compris sur le terrain juridique, était stérile. Le dispositif est évidemment perfectible, en tout cas du point de vue purement juridique et également du point de vue d'un chef d'établissement d'une petite université de région. Mais je crois pouvoir dire qu'il a néanmoins très bien fonctionné. Je vous remercie.

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