Intervention de Christian Mourougane

Réunion du jeudi 29 novembre 2018 à 10h30
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

Christian Mourougane, directeur général adjoint de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) :

Je vous prie d'excuser notre directrice générale, Valérie Mancret-Taylor, qui n'a pu être présente ce matin.

Je voudrais d'abord, en quelques mots, préciser le champ d'intervention de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Nous pilotons un programme de lutte contre la précarité énergétique, lequel vise à permettre aux propriétaires occupants modestes ou très modestes ou à des propriétaires bailleurs, sous réserve de conventionner leur logement, de bénéficier d'aides et de subventions accordées par l'Agence pour rénover leur logement et en améliorer la performance énergétique. Le plan « Climat » nous fixe l'objectif de financer 75 000 logements par an. Cette année, nous devrions nous situer entre 65 000 et 70 000 logements financés, ce qui représente une augmentation de plus de 30 % par rapport à l'année dernière.

Pour ce qui est des freins à la transition énergétique, je distinguerai trois sujets différents. Le premier est celui du reste à charge pour les ménages, alors que je rappelle que nous nous adressons à des publics modestes. Après le financement de l'Agence à hauteur de 60 %, le reste à charge représente 40 % du coût du projet. Pour des coûts moyens de travaux compris entre 18 000 à 20 000 euros, cela représente environ 8 000 euros, soit plus de la moitié d'une année de revenus. Pour lever ce frein, nous nouons des partenariats, notamment avec le réseau immobilier Procivis et des collectivités locales. Toutefois, pour inscrire notre action dans la durée, il faudrait que ces dispositifs de financement du reste à charge soient généralisés et pérennes. Or nous constatons la difficulté des collectivités locales à accompagner la montée en charge du programme, de même que l'augmentation des objectifs fixés par l'État à l'Agence.

Le deuxième frein est lié à l'insuffisant développement et à l'insuffisante mobilisation du dispositif d'accompagnement. Nous nous appuyons principalement sur le réseau associatif Solidaires pour l'habitat (SOLIHA), partenaire majeur de l'Agence, et sur quelques bureaux d'études privés. Mais il faudrait généraliser au niveau national le soutien et l'accompagnement. C'est un axe majeur d'amélioration. Lorsque les territoires sont dotés d'outils d'accompagnement performants, les objectifs sont atteints. En revanche, dans certains territoires, il manque de l'ingénierie et de l'accompagnement. En corollaire de cette question de l'accompagnement, je rappellerais que la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a prévu la création d'un service public de l'efficacité énergétique de l'habitat, porté par les conseils régionaux, ainsi que la création de plateformes territoriales de la rénovation énergétique. En l'occurrence, la constitution de ces plateformes est un enjeu majeur d'accompagnement des propriétaires à titre individuel. Ces plateformes auront trois vocations : une vocation d'information du public, une vocation de recensement de l'ensemble des aides disponibles sur un territoire et une vocation d'animation du milieu professionnel. Je rejoins ici l'ensemble des préoccupations exposées par la FFB.

Enfin, le troisième frein au développement du programme « Habiter mieux » vient de la prise de décision collective dans les copropriétés, dans lesquelles chaque propriétaire est finalement le maître d'ouvrage, ou au moins en partie, des travaux sur les parties communes. Les difficultés que nous recensons sont celles liés à la mise en place d'un accompagnement collectif et d'une facilitation de prise de décision collective autour des travaux de la rénovation énergétique. Nous constatons qu'il est plus facile d'inclure ces travaux lorsqu'il s'agit de requalifier globalement une copropriété et d'intégrer des normes de confort, d'adaptation au vieillissement ou d'accessibilité aux étages. Aussi engageons-nous les copropriétés à réfléchir à des projets ambitieux et des volumes de travaux importants. Mais, dès lors que seuls les travaux de rénovation énergétique sont financés par l'Agence, le reste à charge est important et empêche des prises de décisions rapides. C'est un frein important. Le coût de 34 000 euros par logement pour les réhabilitations, annoncé par l'USH, est à peu près équivalent pour la rénovation énergétique. Et l'Agence n'en finance que 10 % à peu près, soit 3 500 à 4 000 euros.

Certes, les résultats sont plutôt encourageants grâce à la prise de conscience des copropriétaires. Mais, dans certains centres anciens, notamment dans les villes moyennes, on se heurte à un niveau de dégradation et à un taux de vacance des logements qui rendent la prise de décision complexe, notamment pour les propriétaires-bailleurs. En effet, pour bénéficier d'un retour sur investissement, ceux-ci doivent trouver des locataires. Aussi lisons-nous les politiques de transition et de rénovation énergétiques en lien avec celles de l'habitat, notamment de repeuplement des quartiers anciens dégradés et de remise sur le marché de logements vacants.

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