Intervention de David Marchal

Réunion du jeudi 17 janvier 2019 à 9h30
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

David Marchal, directeur adjoint Productions et énergies durables de l'ADEME :

L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) rejoint naturellement le point de vue de la DGEC, en particulier en ce qui concerne le rôle indispensable de la filière éolienne dans la transition énergétique française et de l'évolution du mix électrique. À l'échelle mondiale, cette filière connaît un très fort développement avec une croissance annuelle de l'ordre de 17 % depuis 2010 ; il serait regrettable que la France n'en bénéficie pas.

L'ADEME tient un rôle particulier dans cette filière. L'ambition du Gouvernement se déploie dans deux domaines : les tarifs d'achat et les mesures de soutien mises en oeuvre par le ministère. L'ADEME ne finance donc pas les projets éoliens mais intervient plutôt en fournissant son expertise et en réalisant des études ; elle finance également l'innovation et accompagne le développement de plusieurs démonstrateurs.

Les études que nous conduisons visent à identifier les freins et les pistes de développement de la filière éolienne terrestre. Nous travaillons à partir de visions à long terme : à l'horizon 2050 voire 2060, l'éolien terrestre, grâce à sa compétitivité, pourrait occuper une place prépondérante dans le mix électrique. Ses coûts sont en baisse, comme en témoignent les derniers appels d'offres lancés par le ministère : le prix du mégawattheure s'établit à 65 euros, soit nettement moins que le tarif d'achat, qui s'élève à 72 euros. Les innovations qui surviendront d'ici à 2030 pourraient même faire baisser le prix du mégawattheure à 50 euros à cette date, car elles permettront tout à la fois de réduire les coûts de financement et d'allonger la durée de vie des machines. En clair, à long terme, cette filière occupera une place très importante dans le mix électrique et pourrait même, selon nos études, produire la moitié de l'électricité à l'horizon 2050-2060.

Nous réalisons également des études visant à affiner notre connaissance des gisements mais aussi des impacts de la filière sur la biodiversité et sur l'emploi ; une des études en cours porte sur le repowering, c'est-à-dire les conditions économiques dans lesquelles assurer le remplacement des machines existantes.

Je voudrais dire un mot de l'emploi. Dans cette filière en croissance et à laquelle sont attribués des objectifs importants, on entend souvent dire que les machines sont importées. L'ADEME réalise chaque année une étude intitulée « Marchés et emplois de l'efficacité énergétique et des énergies renouvelables » qui comprend un volet spécifique sur l'éolien terrestre. Selon la dernière livraison de cette étude, 14 000 emplois – pour 14 000 mégawatts – sont directement liés à la filière éolienne, ce à quoi s'ajoutent des emplois indirects, soit un total d'environ 18 000 emplois. Quelque 600 entreprises travaillent dans ce secteur en France, dont certaines exportent des composants pour un montant total de 700 millions d'euros. Toutes n'interviennent pas dans la fabrication d'éoliennes, mais 4 000 emplois équivalents temps plein (ETP) sont liés à l'exportation de composants, qu'il s'agisse d'électromécanique ou d'électronique de puissance.

L'ADEME finance également de la recherche-développement et des projets dans lesquels l'innovation vise à réduire les impacts ou à améliorer les performances. L'augmentation de la taille des machines concerne surtout l'éolien en mer mais d'autres projets portent sur des génératrices hybrides qui permettront de ne plus utiliser des aimants permanents, dont on connaît les incidences environnementales. Certains projets ont trait à la recyclabilité des pales : les pales actuelles, construites en fibre de verre, comme les coques de bateau, ne sont pas recyclables, mais la piste des thermoplastiques recyclables est en cours d'exploration. Autre projet : la production de mâts en béton pour l'exportation, ce produit connaissant un certain succès à l'étranger. Des industriels tels que Freyssinet, Jeumont, Arkema et d'autres sont impliqués dans ces différents projets, même s'ils ne sont pas toujours sur le devant de la scène, car les fabricants de turbines en tant que tels sont en effet assez peu nombreux.

L'un des enjeux majeurs de la filière éolienne tient à son appropriation territoriale. Nombreuses sont les collectivités locales qui s'impliquent, en particulier grâce aux retombées fiscales. Les collectivités peuvent d'ailleurs s'impliquer de bien d'autres manières dans les projets, pour peu qu'elles bénéficient d'un meilleur conseil. Il n'existe pas de réseau de conseillers éoliens ; c'est sans doute une piste à envisager pour mieux orienter les collectivités et mieux intégrer les projets dans les dynamiques territoriales.

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