Intervention de Cécile Muschotti

Séance en hémicycle du mercredi 30 janvier 2019 à 15h00
Prévention et sanction des violences lors des manifestations — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Muschotti :

« Quand la maison brûle, on ne va pas demander au juge l'autorisation d'y envoyer les pompiers », déclarait le commissaire du Gouvernement Romieu dans ses conclusions d'un célèbre arrêt rendu par le tribunal des conflits le 2 décembre 1902. Je pense, monsieur le ministre, mes chers collègues, que nous sommes tous d'accord avec cette judicieuse remarque sous forme de litote et avec ce qu'elle implique en droit. Selon la théorie des circonstances exceptionnelles, le juge administratif accepte que l'autorité chargée du maintien de l'ordre public puisse, lorsque les conditions d'un strict respect de la légalité ne sont pas remplies, déroger à celles-ci sans que sa décision soit entachée pour autant d'illégalité.

Transposée au contexte actuel, en particulier à celui des violences exceptionnelles qui se donnent cours lors de manifestations, cette théorie autorise le préfet à faire toutes diligences pour prévenir ces violences, y compris confiner le temps qu'il faut les individus susceptibles de se livrer au sport navrant auquel nous avons tous assisté et qui, à juste titre, nous révolte.

Cependant vous avez tenu, monsieur le ministre, à opérer une sorte de transfert de cette théorie des circonstances exceptionnelles dans le droit commun – qui, comme son nom l'indique, s'applique aux circonstances communes, c'est-à-dire normales et habituelles, qui n'autorisent pas à appliquer aux individus auteurs de ces violences un régime super-dérogatoire par rapport au droit commun.

L'article 2 de cette proposition de loi ne respecte pas ce principe. En transposant dans le droit commun l'interdiction administrative de séjour de l'état d'urgence et en en limitant la portée aux manifestations se déroulant sur la voie publique, comme l'a rappelé la rapporteure du texte au Sénat, Catherine Troendlé, cet article viole en particulier le principe de légalité des délits et des peines . Comment, en effet, le préfet pourrait-il juger de la culpabilité d'un individu au regard d'infractions pénales qui n'auraient pas fait l'objet d'une condamnation judiciaire ? C'est ce qui a motivé l'amendement no 217 , dont je suis cosignataire.

Vous avez répondu à cette interrogation en déposant un amendement no 228 réécrivant l'article 2. Je m'en félicite, même si je ne suis pas pleinement convaincue, bien que persuadée de la nécessité de lutter contre des violences évidemment inacceptables.

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