Intervention de Aurélien Pradié

Séance en hémicycle du jeudi 31 janvier 2019 à 21h30
Pour une école vraiment inclusive — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Pradié :

Je reviendrai d'abord sur mon sous-amendement no 83 , en rappelant que la désignation, dans chaque département, d'AESH chargés de soutenir les AESH de terrain correspond exactement à ce que nous avions proposé voilà quatre mois. Vous avez d'ailleurs eu la grande délicatesse de reprendre mot pour mot les cinq premières lignes de notre texte et de les copier-coller, ce qui témoigne de votre grande imagination.

Quel est le fond du problème ? Tout d'abord, il convient de s'assurer que les AESH du terrain, qui sont confrontés à une grande diversité de handicaps, puissent bénéficier d'une oreille experte et attentive pour les soutenir. Ces mêmes AESH, que nous avions alors qualifiés d'accompagnants « ressources », doivent pouvoir venir en appui sur le terrain afin de constituer des binômes de formation, car des enfants autistes, sourds ou porteurs d'autres handicaps ne sont pas accompagnés de la même manière. Le sous-amendement no 83 vise à remplacer le terme d'AESH « référents », que vous avez choisi – sans doute pour ne pas maintenir le nôtre – , par celui d'AESH « ressources ».

Vous avez eu tort, en effet, de choisir ce terme. Les AESH nous ont dit que le terme de « référent », utilisé aujourd'hui en Île-de-France, était impropre. Selon une AESH référente, il induit implicitement un lien hiérarchique, l'AESH qui n'est pas référent étant subordonné à celui qui l'est. Le terme de « ressource » est donc beaucoup plus adapté. Dans le droit du travail, le terme de « référent » a d'ailleurs une signification très claire et établit précisément ce lien hiérarchique : c'est ce que produirait l'adoption de l'amendement tel qu'il est rédigé, alors que ce n'est pas du tout, j'imagine, dans votre intention.

Mon sous-amendement no 84 vise à remplir la coquille vide qu'est votre dispositif. Les quatre premières lignes de votre amendement no 78 rectifié enfoncent des portes ouvertes en disposant notamment que, dans chaque département, sera désigné un AESH « référent ». Or, sa mission n'est pas précisée : elle consisterait à fournir un « appui » aux AESH de terrain, mais ce mot ne veut rien dire, puisque tout est envisageable, du remplacement au renfort physique, en passant par l'accompagnement technique. Ce mot est vide de sens. Si donc vous ne voulez pas créer des postes d'AESH référents fantômes ou fourre-tout, la loi doit préciser la nature de leurs missions. C'est le sens de ce deuxième sous-amendement.

Je le dis très sereinement : si, après l'avoir expéditivement rejeté, vous croyez vraiment au dispositif que nous avons proposé voilà quatre mois, la loi doit définir le cadre minimal des missions auxquels ces AESH seront affectés, sans quoi nous serons confrontés à un vrai problème. Je souhaite bien du plaisir à tout employeur de bonne foi pour savoir, aujourd'hui, ce que recouvre le terme d'« appui » au moment de définir la fiche de poste. C'est à nous, parlementaires, de savoir ce que nous voulons faire et c'est de cela que nous devons discuter.

Quant au sous-amendement no 85 , il vise à éviter un écueil qui avait d'ailleurs été pointé lors des auditions que nous avions réalisées et lors du débat en commission : le cas où les AESH ressources ou référents ne seraient pas issus de ce métier même. Nous voyons vite la dérive possible : une direction des services de l'éducation nationale pourrait nommer dans cette fonction d'appui – car il ne s'agit pas que d'un titre – quelqu'un qui n'aurait pas d'expérience du métier d'AESH.

Or, il faut s'assurer que celles et ceux qui, demain, viendront en appui des acteurs de terrain aient bien déjà exercé sur le terrain. Ce sous-amendement dispose donc que « Ces accompagnants doivent, pour accéder à cette mission, avoir exercé durant au moins trois années la mission d'accompagnant auprès des élèves dans le département concerné ou dans tout autre département. » Trois années, monsieur le ministre, cela tombe bien, puisque c'est la durée que vous évoquiez tout à l'heure à propos des CDD.

J'ajoute que c'est aussi une manière de répondre à la volonté des AESH de pouvoir progresser dans leur carrière. Les accompagnants nous disent en effet vouloir commencer comme AESH, apprendre et, au terme de trois, six ou dix années d'expérience, pouvoir se spécialiser. Ils pourraient alors devenir AESH référents ou ressources.

Ce serait une manière de compléter un amendement issu de notre proposition de loi – que vous avez rejetée avec des mots très durs. Tel qu'il est rédigé, en effet, c'est une coquille vide. À nous, parlementaires, de la remplir.

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