Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du mardi 5 février 2019 à 21h30
Questions sur l'action policière pendant les mobilisations des gilets jaunes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

L'un des principaux fondements de légitimité d'un État est qu'il est la seule institution politique à bénéficier sur son territoire du « monopole de la violence physique légitime », pour reprendre la formule consacrée de Max Weber. Ce dernier rajoute tout de même que la violence physique n'est naturellement pas le moyen normal ni même le seul moyen de l'État moderne. En ce sens, selon nous, elle ne peut pas être mise sur le même plan que celle des individus.

Depuis le début de la mobilisation des gilets jaunes, l'usage de la force étatique, de cette violence dite « légitime », telle que vous avez décidé de l'exercer à l'encontre de milliers de concitoyens et concitoyennes, est contesté par un nombre croissant de personnes et d'institutions : manifestants et manifestantes, journalistes, parlementaires – dont nous sommes – mais aussi organisations de défense des droits humains sur le plan national et international, et même au sein des forces de sécurité.

Hélas, cette violence est en réalité inhérente à toute votre politique. Elle est la colonne vertébrale des lois votées par votre majorité de godillots : ordonnances de casse du droit du travail et cadeaux fiscaux aux plus riches, état d'urgence dans le droit commun, loi xénophobe anti-migrants et migrantes, jusqu'à la dernière en date, la loi anti-manifestants, dernière brique autoritaire de votre édifice.

Cette violence se retrouve dans la rhétorique orwellienne, les expressions qui suintent le mépris de classe au détour d'incessantes petites phrases : « enfants », « fainéants », « rien », « réfractaires », jusqu'au « Jojo » Gilet jaune, indigne d'être mis sur le même plan que vos parlementaires, ministres ou Président !

Dans la rue comme dans les médias ou les institutions, votre usage de la violence est illégitime parce qu'elle est la seule réponse substantielle et le seul instrument politique, dont vous usez et abusez alors que l'on ne vous entend jamais en reconnaître l'existence ni en indiquer les limites. Comment peut-on faire confiance à un pouvoir pour contrôler l'usage d'une violence dont il s'entête à nier l'exercice ?

Je renouvelle donc la question que j'ai posée à M. Castaner, non dans l'idée de « contrôler » votre action mais pour évaluer ce qu'il vous reste du sens des responsabilités dû à votre fonction. Reconnaissez-vous enfin qu'il y a bien eu un usage disproportionné de la force policière dans la gestion des manifestations, et êtes-vous prêt à en assumer l'entière responsabilité politique ?

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