Intervention de Jean-Michel Blanquer

Séance en hémicycle du mardi 12 février 2019 à 15h00
Pour une école de la confiance — Après l'article 1er

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse :

Monsieur le député, je vous remercie d'avoir proposé cet amendement qui met en lumière un sujet dont on ne saurait minimiser l'importance. Je ne vais pas répéter ce que vous avez dit, je souscris à l'ensemble de votre propos.

Le harcèlement est un phénomène qui a pris beaucoup d'ampleur dans les écoles et les établissements scolaires, en France mais aussi à l'échelle mondiale. Il renvoie à des réalités anciennes et même archaïques, comme la persécution d'un seul par plusieurs selon une logique qui rappelle celle du bouc-émissaire. L'éducation, telle que nous la concevons, s'oppose à cette logique. On voit parfois, notamment dans les cours de récréation, que la tendance à harceler existe : c'est précisément contre cette pente naturelle qu'oeuvre la civilisation, qui passe avant tout par l'éducation.

Avec la lutte contre le harcèlement, nous sommes donc au coeur de l'un des enjeux anthropologiques de l'école. Les nouvelles technologies ont donné au harcèlement une dimension nouvelle, puisque le cyber-harcèlement étend ce phénomène dans l'espace et le temps. Il crée aussi des phénomènes plus globaux qui, malheureusement, font l'actualité, puisqu'il est question depuis plusieurs jours de la « Ligue du LOL » qui est un cas désastreux de cyber-harcèlement entre adultes.

Bref, le sujet ne saurait être considéré comme mineur. C'est pourquoi, depuis huit ans, sont menées des campagnes importantes, que nous avons encore renforcées dernièrement. Mme Brigitte Macron s'est engagée personnellement contre le harcèlement. Quand elle a souhaité choisir un thème de sensibilisation nationale en matière éducative, c'est celui-ci, qui permet de toucher un grand nombre d'esprits, qu'elle a retenu.

Nous avons aussi développé, principalement sur internet mais aussi à la télévision, une campagne sur le cyber-harcèlement dont le thème est renouvelé tous les ans. Celui de cette année est le cyber-harcèlement à connotation sexuelle, dont les jeunes filles sont particulièrement victimes. Mais le harcèlement peut aussi être raciste, antisémite ou homophobe. Nous avons récemment lancé une campagne spécifique contre le harcèlement homophobe. De façon générale, la politique publique de lutte contre le harcèlement doit envisager toutes ces dimensions.

Pour avancer sur cette question, nous pouvons utiliser la voie législative ou la voie réglementaire, et en tout état de cause opérer une mobilisation générale. Nous y parviendrons en en parlant, comme nous sommes en train de le faire, en lançant des campagnes comme celles que nous avons engagées, mais aussi en formant les enseignants à la lutte contre le harcèlement, ainsi que le prévoit la réforme de la formation initiale des professeurs.

Cette lutte passe en effet par des réflexes professionnels : aller à l'encontre des plus petites formes de harcèlement dès qu'elles se manifestent, ne pas cloisonner le sujet, considérer que la lutte contre le harcèlement concerne l'ensemble des adultes qui travaillent dans l'établissement, voire des élèves eux-mêmes, et pas seulement les personnels de la vie scolaire – c'est pourquoi nous formons aussi des médiateurs. C'est ainsi toute une batterie d'actions qu'utilise le ministère de l'éducation nationale.

Je suis d'accord avec madame la rapporteure : ces actions ne nécessitent pas une évolution législative. Nous pensons donc que l'amendement de M. Bananant qui sera examiné ensuite et qui modifie le code l'éducation, et non le code pénal, est plus adapté tout en restant conforme à l'esprit de votre proposition.

Je donne donc un avis défavorable à votre amendement, bien que je sois très favorable à l'esprit dans lequel vous l'avez proposé. Ce débat aura bien entendu des suites car il faudra suivre l'efficacité des actions que le ministère mène en la matière.

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