Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du jeudi 21 février 2019 à 9h30
Référendums d'initiative citoyenne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

Devant la difficulté actuelle de faire vivre la démocratie, de grandes questions s'imposent à nous, en particulier celle de savoir comment mieux intégrer le citoyen aux décisions qui le concernent et, plus fondamentalement, quelle doit être la place du peuple au sein de ce que l'on appelle, à raison, la démocratie.

Au sein d'une société de plus en plus complexe, connaissant des changements si rapides et aux attentes multiples, la détermination du rôle de chacun pour l'intérêt de tous n'est pas toujours aisée. En 2008, lors de la réforme constitutionnelle pour la modernisation des institutions, notre groupe, alors dénommé Nouveau Centre, fut l'un des précurseurs de l'introduction de l'initiative citoyenne au sein de notre Constitution. Il s'agissait déjà de mettre en avant la nécessité que les citoyens soient force de proposition.

Les questionnements posés par la participation citoyenne ne sont pas nouveaux et de nombreuses divergences existent quant à sa mise en oeuvre. Néanmoins, nous devrions pouvoir tous nous rejoindre sur un double postulat de départ : les élus ont intérêt à y recourir pour améliorer la pertinence de leurs décisions, en accroître la légitimité et en faciliter l'application ; les Français expriment la volonté, de plus en plus prégnante, d'être associés à la vie de leur pays puisqu'ils sont bien évidemment les premiers concernés.

Tous, nous sommes donc convaincus qu'il est souhaitable de réfléchir à de nouveaux processus permettant à nos concitoyens de s'exprimer aussi en dehors des élections. Notre groupe, en revanche, ne voit pas dans le référendum d'initiative citoyenne, qu'il soit législatif, abrogatif, révocatoire ou constitutionnel, la solution miracle à tous les maux. Des exemples étrangers sont souvent cités. Il est vrai que le référendum d'initiative citoyenne existe chez certains de nos voisins et qu'il semble fonctionner. Toutefois, il faut le souligner, les taux de participation sont relativement bas, les électeurs ne se rendant plus aux urnes du fait des consultations trop nombreuses ou de leur objet peu attrayant. En outre, ces référendums sont souvent très encadrés, en particulier quant à leur objet. Aucun pays ne laisse la porte ouverte à n'importe quelle délibération, ni ne peut s'enorgueillir de participations légitimant sans concession la question puis son résultat. Nous devons aussi le prendre en compte.

En réalité, il ne s'agit pas d'affirmer que donner la parole et des moyens d'action aux citoyens pour mettre en place une dose de démocratie directe est bon ou mauvais par principe ; il s'agit surtout de trouver les modalités de cette participation pour qu'elle puisse répondre aux attentes de nos concitoyens tout en étant suffisamment encadrée pour empêcher toute dérive. Les référendums législatifs et abrogatifs pourraient être utilisés de façon abusive par de puissants lobbys ayant les moyens de faire campagne pour leurs intérêts.

De plus, la démocratie n'est pas seulement la parole du peuple, c'est aussi le pluralisme, les libertés fondamentales et de nombreux droits acquis. Il faut concilier l'ensemble et veiller à ce que notre régime ne porte pas en lui les instruments de sa destruction. Je l'ai dit en commission, il n'est pas certain que la loi Veil, l'abolition de la peine de mort ou le mariage pour tous auraient été votés par référendum d'initiative citoyenne. Certains ont tenté de déformer mes propos : je n'ai pas dit avoir peur du peuple, bien au contraire, seulement que la question méritait d'être posée. Je le pense d'autant plus qu'un référendum d'initiative citoyenne serait une grande nouveauté dont il nous est a fortiori impossible d'évaluer la portée.

Toutes les questions doivent pouvoir être posées, sans procès d'intention.

Je pense ainsi que le référendum révocatoire serait une erreur. Un élu a besoin de la durée de son mandat pour mettre en place sa politique. Or la possibilité de le révoquer après le premier tiers de son mandat le conduirait à ne plus rien faire, à ne plus oser agir ou à rester dans l'électoralisme. On n'avancerait pas.

1 commentaire :

Le 27/02/2019 à 23:19, Laïc1 a dit :

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"Je le pense d'autant plus qu'un référendum d'initiative citoyenne serait une grande nouveauté dont il nous est a fortiori impossible d'évaluer la portée."

C'est la révolution permanente en Suisse ? (pays des banques, des assurances, et du chocolat...)

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