Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du jeudi 21 février 2019 à 15h00
Interdiction du glyphosate — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Les plantes cultivées ont donc besoin d'un peu de plantes adventices. Nous savons cependant que la gestion de ces « mauvaises herbes » demande beaucoup de travail aux agriculteurs. Dans un climat concurrentiel extrêmement tendu, renoncer au glyphosate apparaît à beaucoup d'utilisateurs comme proprement impossible, pour des raisons de rentabilité, et, disons-le, parfois même pour la survie de leur exploitation. Nous devons donc réfléchir collectivement, avec détermination, aux mesures d'accompagnement de la transition vers des alternatives, notamment, monsieur le ministre, dans le cadre de la future PAC, à laquelle nous travaillons.

Car cet accompagnement financier et technique est un impératif absolu, je dis bien : absolu. Il impose de prendre en considération toutes les difficultés. Le glyphosate est employé par certains agriculteurs engagés dans une démarche visant à limiter les labours profonds, qui ont un effet dévastateur, en détruisant la vie et la structure des sols, lorsqu'ils sont pratiqués trop fréquemment. C'est le cas de nombreux agriculteurs qui cherchent les moyens d'augmenter la teneur en matière organique de leurs sols, notamment par l'agriculture dite de conservation. Ajoutons à cela les surcoûts importants des passages plus fréquents sur les parcelles, des consommations de gazole et des émissions de gaz à effet de serre supérieures, des charges de matériels plus lourdes, et plus de temps de travail. Cependant, d'autres agriculteurs travaillent sans glyphosate, et ne labourent pas plus profondément pour autant. Inversement, d'autres labourent tout en utilisant le glyphosate.

Notre responsabilité est donc de chercher un équilibre entre, d'un côté, rendement des exploitations et valeur ajoutée permettant aux agriculteurs de vivre du fruit de leur travail, et, de l'autre, préservation de la santé humaine et de nos écosystèmes. Cette exigence nous oblige à emprunter une ligne de crête, sur laquelle il ne faut pas reculer, mais s'engager au contraire de manière déterminée. Soyons donc cohérents : la transition agroécologique ne peut se réduire à de la communication et de l'affichage. Elle nécessite de vrais moyens et de forts soutiens publics. Tout le contraire, monsieur le ministre, des politiques d'austérité conduites en Europe comme en France !

Notre responsabilité politique est ainsi engagée : pour mener à bien cette transition, il nous faut protéger nos agriculteurs des effets délétères de la libre concurrence, voulue par Bruxelles et encouragée par le Gouvernement. Dans votre intervention, monsieur le ministre, vous avez occulté cette question essentielle : cette libre concurrence est l'une des causes de l'échec des politiques successives de réduction des usages des produits phytopharmaceutiques.

Rendre nos systèmes de production moins dépendants des produits phytopharmaceutiques suppose d'exclure le secteur agricole et l'alimentation de la concurrence mondialisée, en stoppant les accords de libre échange en cours de ratification ou de négociation.

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