Intervention de Francis Claudepierre

Réunion du jeudi 24 janvier 2019 à 11h00
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

Francis Claudepierre, président et agriculteur méthaniseur de l'Association des agriculteurs méthaniseurs de France :

Je souhaiterais vous faire partager trois constatations. La première concerne l'acceptabilité : on remarque que les plus gros problèmes proviennent des zones où il n'y a pas encore de méthaniseurs. En revanche, on ne rencontre pas de refus catégorique dans les cantons dans lesquels quelques méthaniseurs sont déjà implantés.

Le deuxième constat est que lors des travaux du groupe mis en place par M. Lecornu, nous nous sommes, en tant qu'agriculteurs, retrouvés face aux ONG, telles que FNE ou le WWF, et étions naturellement sur la défensive. Or au fil des débats, nous avons trouvé un terrain commun autour de la question de la mobilité au GNV et, depuis lors, nous nous parlons, nous faisons mutuellement confiance et travaillons ensemble. Cela a suscité chez nous l'espoir que la méthanisation réconcilie un jour l'agriculture et l'environnement. Nous réfléchissons également avec ces ONG sur la notion de troisième culture en deux ans, qui va nous permettre entre autres d'éviter les épandages de glyphosate.

À l'occasion de ce groupe de travail, nous avons ressenti également une forte pression des acteurs de la dépollution de l'eau, qui voulaient absolument que la méthanisation par le mélange des boues conduise à un changement de statut du digestat en produit. Nous nous sommes élevés contre cette suggestion. Nous ne sommes pas opposés à l'idée de traiter les boues d'épuration, qui sont un concentré de la dépollution de l'eau et qu'il faut bien épandre quelque part. Il s'agit d'un problème de société, société dont nous faisons partie, si bien que nous entendons cette demande. Mais nous sommes avant tout des producteurs de lait, de viande, de fromage, de céréales et notre devoir est de nourrir la population avec toutes les garanties de sécurité alimentaires et de qualité. Un digestat devenant un produit épandu sans répondre aux règles de plan d'épandage constitue de notre point de vue une dérive que nous ne pouvons accepter. Voici vingt ans, nous avons subi la crise de la vache folle, qui nous a énormément perturbés et a conduit à la disparition de nombreuses exploitations. Aujourd'hui, il est difficile pour nous d'envisager d'accepter un risque nouveau. Bien entendu, nous sommes là pour travailler ensemble, trouver des pistes, dont la méthanisation fera partie, puisque les boues sont déjà souvent traitées par des agriculteurs en co-compostage. Le co-compostage présente l'avantage de pouvoir identifier et séparer des lots, alors qu'en méthanisation il existe un mélange qui rend la démarche plus compliquée, ce qui explique que nous prenions des précautions. Il faut savoir que les boues d'épuration ne présentent pas un grand intérêt méthanogène et que la méthanisation n'est pas une grande lessiveuse qui éliminera les micropolluants organiques et les traces d'éléments métalliques. Tout cela doit donc se faire dans le respect de règles d'épandage, sur des terres bien identifiées.

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