Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du mercredi 20 février 2019 à 9h30
Commission des affaires économiques

Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances :

Monsieur Sempastous, s'agissant de la société Toupnot, détruite dans un incendie, 80 salariés se retrouvent en effet sans activité. Un travail est en cours avec les services de l'État et les élus pour proposer au groupe Cofigéo une implantation nouvelle. Ce groupe a déjà participé au sauvetage des activités de la Financière Turenne Lafayette et reçu le soutien du ministre lors des échanges avec l'Autorité de la concurrence concernant William Saurin. Nous suivons donc ce dossier avec attention, et sommes déterminés à accompagner l'entreprise.

L'accompagnement financier des territoires est, bien entendu, le rôle de BPIfrance ; la Banque des territoires sera sollicitée pour l'ingénierie et le portage de l'immobilier industriel. Dans chaque région, il appartiendra aux référents de BPIfrance et de la Banque des territoires d'apporter les réponses.

M. Olivier Lluansi, délégué aux territoires d'industrie, est à votre disposition pour répondre à vos questions. Ce dispositif est un accélérateur de contrat-type visant à faciliter la vie des EPCI et des régions. D'ailleurs, il serait intéressant, là aussi, de nous remonter les signaux faibles de ce qui ne fonctionne pas.

Les contrats stratégiques de filières ont pour objectif de faire travailler, ensemble, des industries dont les process sont proches, notamment pour aller plus vite sur les sujets d'innovation, de recherche-développement et de plateformes numériques. Bien entendu, si vous regroupez des activités de chimie, de plasturgie et de papier, il ne s'agit pas d'une filière. Néanmoins, la démarche est suffisamment souple pour s'adapter à la complexité d'une PME qui s'adresse à différentes filières ; je le répète, pour durer, les PME ne doivent pas être mono marché.

Nous travaillons aussi en interfilières. Lorsque la chimie travaille sur les matériaux, c'est au bénéficie de l'ensemble de la production industrielle, qu'il s'agisse de l'aéronautique, de l'automobile – allègement des produits composites, etc. – ou du ferroviaire. Par ailleurs, des travaux communs ont lieu entre les filières. La filière « déchets », par exemple, travaille en étroite concertation avec d'autres filières.

Le dispositif « Territoires d'industrie » a pour objectif d'approcher sur le territoire les PME et les ETI dont les activités diffèrent mais qui ont des problèmes communs, notamment celui du recrutement.

S'agissant de l'articulation avec les régions, nous avons organisé, début janvier, une réunion avec les présidents de conseil régional pour travailler à un fonctionnement très fluide sur les questions de développement économique entre l'État et les régions. Lors de la prochaine réunion du Conseil national de l'industrie, nous ferons probablement des propositions tendant à la création, dans chaque région, d'un conseil régional de l'industrie. En effet, les représentants industriels souhaitent, au niveau régional, être en contact avec un représentant de l'Alliance pour l'industrie du futur et un représentant de France Industrie.

Concernant le dispositif « Territoires d'industrie », l'enjeu est d'avoir des reportings aussi précis que possible pour permettre à chaque région de savoir où elle en est par rapport aux autres. Ces reportings doivent être à la fois un facteur d'émulation et un partage de bonnes pratiques. Aucun patron de région, aujourd'hui, ne refusera de créer de l'emploi.

Concernant la filière européenne de batteries électriques, nous avons indiqué que nous mettrons à disposition 700 millions d'euros. Un appel à manifestation d'intérêt a été lancé en janvier pour identifier les industriels intéressés par ce projet. Nous avons pris connaissance des propositions de Carbone Savoie, qui se place en amont de la chaîne de valeur ; elles doivent désormais être discutées avec l'ensemble des autres industriels intéressés. Nous ne ferons pas de planification à la place des entreprises, mais l'objectif est bien d'intégrer l'ensemble de la filière avec, de préférence, des acteurs européens – si ce n'est français.

Monsieur Sommer, s'agissant de TIGA, une dizaine de territoires ont été sélectionnés, non pas seulement pour des projets industriels, mais aussi pour des projets liés à la transition écologique ou à la mobilité. Les territoires d'industrie peuvent en bénéficier, mais sans exclusivité. Nous avons fait en sorte, dans un cas sur deux, qu'il y ait une totale cohérence entre les deux dispositifs, ce qui permet de réutiliser l'argent. Sur d'autres territoires, TIGA poursuit son chemin.

Madame Deprez-Audebert, le projet de l'A380 est effectivement abandonné, mais il reste l'A350Neo, qui est à la fois un projet important et une réussite industrielle et commerciale.

Le Royaume-Uni a été, pendant quarante-cinq ans, un partenaire industriel très proche. Cette relation est bien entendu négociée dans le cadre du Brexit. Il est difficilement envisageable de ne pas réussir à négocier une relation étroite, comme nous avons pu le faire avec d'autres pays tels que la Suisse. Nous sommes confiants sur notre capacité à poursuivre des projets industriels avec le Royaume-Uni. Il est d'ailleurs prévu, dans les ordonnances prises dans le cadre du Brexit, de prolonger notre coopération en matière de matériel d'armement.

Concernant les moteurs à hydrogène, Alstom a développé un prototype et une première expérimentation a eu lieu en Allemagne. Les régions françaises sont intéressées, notamment l'Occitanie, qui souhaite effectuer prochainement des expérimentations.

La pile à combustible à hydrogène est une technologie à laquelle le Gouvernement croit, en particulier pour les modes de transport lourds. Votre collègue Benoît Simian a remis un rapport au Gouvernement sur le sujet. L'hydrogène est une alternative qui nous paraît peu coûteuse pour l'électrification, ainsi que pour verdir le transport ferroviaire. Cependant, je ne puis vous dire exactement à quelle date les premiers moteurs seront livrés. Cela dépend de considérations industrielles et de recherche-développement que je ne maîtrise pas.

La 5G n'est pas une technologie qui a vocation à être déployée sur l'ensemble du territoire. Elle répond à des usages bien précis, liés notamment à l'intensité du réseau. Elle sera utilisée pour la communication, dans les agglomérations extrêmement denses où la 4G n'est pas assez puissante, et pour des usages industriels. À ce titre, les Hauts-de-France, comme tous les autres territoires, auront accès à la 5G, mais pour des usages bien précis, où une grande puissance est nécessaire. C'est la raison pour laquelle nous continuerons le New Deal mobile pour la 4G et le très haut débit.

L'immobilier industriel est l'un des points traités par le dispositif « Territoires d'industrie ». Il est demandé à la Banque des territoires d'accompagner des projets de portage de murs industriels, comme elle le fait déjà pour le tourisme et les centres commerciaux. Nous nous appuyons donc sur son expérience.

S'agissant des stages de troisième, nous souhaitons amener les entreprises à s'engager davantage. À chaque étape du French Fab Tour, nous leur demandons de faire plus de propositions d'accueil d'élèves de troisième et de stages de qualité – cinq jours, cela passe très vite. Je souhaite – et cela n'engage que moi – qu'un maximum d'entreprises s'engagent dans une démarche volontaire et non contrainte, d'autant qu'aujourd'hui les entreprises industrielles ont besoin de montrer leur métier et ont tout à y gagner. Lors de mes déplacements, nombreux sont les industriels qui me disent intervenir dans les collèges et les lycées et ouvrir leurs portes pour la semaine de l'industrie. Il existe donc un changement important de paradigme sur cette question.

Nous devons faire en sorte que les élèves de troisième, qui ont la tentation d'effectuer leur stage dans la société de leurs parents ou de leur proche entourage, sortent de cette zone de confort pour découvrir un autre monde du travail. Nous devons aussi donner la possibilité aux élèves qui n'ont pas de réseau, dont les parents sont, par exemple, éloignés de l'emploi, d'accéder aux métiers industriels.

Concernant la formation des jeunes sur leur territoire, je ne reviendrai pas sur la question de la formation professionnelle mise en oeuvre par Mme Pénicaud. La formation doit être tirée par les branches pour être au plus près des besoins des entreprises. Par ailleurs, dans le dispositif « Territoires d'industrie », des outils, financés par le programme d'investissement dans les compétences (PIC), sont mis à la disposition des entreprises pour mettre en place soit des programmes POEC, soit des sections d'apprentissage, en particulier de métiers répondant aux besoins de recrutement des entreprises. Compte tenu des difficultés de recrutement, nombreuses sont les entreprises prêtes à s'engager dans ce type de démarche.

Par ailleurs, la démarche engagée par M. Jean-Michel Blanquer pour créer des campus d'excellence vise à revaloriser la formation professionnelle et à rendre toutes ses lettres de noblesse aux lycées professionnels. Enfin, le volontariat territorial en entreprise vise à amener des jeunes diplômés ou des étudiants – à l'occasion d'une année de césure, par exemple – à consacrer un an à une PME, dans un territoire, pour lui faire bénéficier de ses connaissances, mais également apprendre sur le terrain. Cette expérience sera valorisée lors du recrutement.

Il s'agit peut être aussi d'une façon d'entrer dans une PME, de prendre des responsabilités et d'y rester, les PME et les ETI n'ayant pas les mêmes capacités que les grandes entreprises à recruter des cadres.

Monsieur Di Filippo, les territoires retenus pour bénéficier du dispositif « Territoires d'industrie » sont – c'est le principe même du dispositif – loin des agglomérations. Ce sont des territoires qui ne bénéficient pas de la force des agglomérations, du très haut débit, ou d'un bâtiment facilement finançable. Cependant, aucune enveloppe n'est fléchée. Les territoires doivent être en capacité de se mobiliser, de porter leur projet et de contractualiser rapidement pour bénéficier du dispositif ; aucune enveloppe n'est d'avance prévue pour tel ou tel territoire. Notre démarche est de faire en sorte qu'il y ait le maximum d'appétit et de mouvement sur ces projets, afin de pousser les acteurs, sur les territoires, à s'emparer du dispositif.

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