Intervention de Nathalie Loiseau

Séance en hémicycle du mardi 5 mars 2019 à 15h00
Débat en vue du conseil européen des 21 et 22 mars 2019

Nathalie Loiseau, ministre chargée des affaires européennes :

Soyons clairs : nous souhaitons un retrait ordonné, et nous sommes dans l'attente d'un signe que le Royaume-Uni s'en donne les moyens en ratifiant l'accord négocié et conclu ensemble. Mais nous ferons toujours primer les intérêts des Européens, et, au vu de la situation politique britannique, nous ne pouvons pas exclure aujourd'hui que le Royaume-Uni glisse vers une sortie sans accord.

Dans cette éventualité, nous serons prêts. L'État a fait tout ce qu'il avait à faire pour cela : vous avez bien voulu voter une loi d'habilitation, le Gouvernement a pris six ordonnances et les décrets d'application sont prêts eux aussi. Sur le terrain, les travaux d'infrastructure avancent ; les douaniers et les vétérinaires supplémentaires sont recrutés et formés. Je serai jeudi à Londres pour rencontrer à nouveau les autorités britanniques et la communauté française. Notre engagement est total : nous demandons que les Français bénéficient du maintien de leurs conditions actuelles de séjour au Royaume-Uni. En outre, nous travaillons activement avec la Commission européenne comme au plan national pour venir en aide aux pêcheurs – que j'ai rencontrés la semaine dernière à Cherbourg – en cas de sortie sans accord.

Je tiens par ailleurs à redire devant vous que, s'il est normal que les budgets européens soient affectés par la perte de la contribution du Royaume-Uni, nous veillerons en revanche, contrairement à ce que certains ont pu dire de manière assez irresponsable, notamment au salon de l'agriculture – où je me suis moi aussi rendue – , au maintien des financements de la politique agricole commune, lesquels ne peuvent ni ne doivent servir de variable d'ajustement du Brexit.

Les discussions sur le retrait du Royaume-Uni de l'Union ne doivent pas nous détourner de notre objectif central de relance du projet européen. À cet égard, le Conseil européen de mars sera une échéance importante, à l'opposé de ce que certains ont laissé entendre.

Conformément à ses conclusions de décembre dernier, le Conseil européen débattra de l'avenir du marché unique dans la perspective du prochain programme stratégique. Cela permettra d'aborder les sujets liés au marché intérieur, comme l'approfondissement de l'intégration des marchés, l'innovation, la concurrence loyale et la protection des droits des consommateurs, mais aussi de traiter de la protection des données et des transformations induites par la numérisation, l'intelligence artificielle et les nouvelles technologies. Qui pourrait dire que ces sujets ne méritent pas que l'on s'y arrête un moment ?

C'est dans ce cadre que nous voulons engager le débat sur l'avenir de l'industrie européenne et sur la nécessité d'une réelle politique industrielle. La France et l'Allemagne ont présenté des propositions stratégiques ambitieuses ; il est maintenant nécessaire que le Conseil européen en débatte. Il s'agit d'avancer sur trois axes.

Premièrement, permettre à l'Union d'investir dans les nouvelles technologies et de les financer massivement, notamment en donnant au Conseil européen de l'innovation des moyens comparables à ceux disponibles aux États-Unis, comme l'a indiqué dans sa tribune le Président de la République.

Deuxièmement, rendre nos entreprises plus concurrentielles, y compris en révisant les lignes directrices en matière de concentration d'entreprises en Europe pour tenir compte de la concurrence au niveau mondial. Qui pourrait nier que le sujet est d'une actualité brûlante ?

Nous proposons aussi que le Conseil puisse bénéficier d'un droit de recours après une décision de la Commission.

Troisièmement, il s'agit de mieux défendre nos technologies, nos entreprises et nos marchés en tirant pleinement profit du nouveau cadre de filtrage des investissements, en exigeant une plus grande réciprocité dans les marchés publics avec les pays tiers et en appuyant le multilatéralisme, tout en le modernisant chaque fois que c'est nécessaire – je pense notamment à l'Organisation mondiale du commerce. Qui pourrait dire qu'aujourd'hui le multilatéralisme n'est pas attaqué ?

En outre, les chefs d'État ou de gouvernement discuteront des orientations politiques à adopter pour que l'Union soit en mesure de préparer, d'ici à 2020, une stratégie de long terme de lutte contre le changement climatique, dans la continuité de l'accord de Paris. Il est fondamental de maintenir la dynamique engagée en la matière en vue du Conseil européen de juin, afin que l'Union soit en mesure d'adopter à cette date le scénario de neutralité carbone pour 2050 et de présenter cette stratégie au sommet sur le climat que le secrétaire général des Nations unies organisera en septembre 2019. Le Président de la République a fait des propositions fortes en ce sens : neutralité carbone en 2050, division par deux de la consommation européenne de pesticides d'ici à 2025.

Si M. le député Coquerel était là pour m'écouter…

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