Intervention de Paul Molac

Séance en hémicycle du mardi 5 mars 2019 à 21h30
Débat sur la judiciarisation et la criminalisation de l'action militante

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul Molac :

Avant de commencer mon propos, je souhaite préciser qu'en aucune manière je ne puis cautionner la violence, quelles qu'en soient les causes. Et cela vaut autant pour les militants que pour les forces de l'ordre.

L'Assemblée a adopté le 5 février dernier la loi dite « anticasseurs ». Il ne fait aucun doute qu'il s'agissait en l'espèce, pour le Gouvernement, d'adresser une réponse immédiate à l'opinion publique à la suite des manifestations hebdomadaires de gilets jaunes auxquelles nous assistons depuis la mi-novembre. Manifestement, ces lois de circonstances ne permettent généralement pas d'obtenir les effets voulus et, ce qui est plus grave, entraînent même des aspects pervers.

D'ailleurs, quand on voit que deux personnes interpellées un samedi à un péage de la région parisienne ont été mises en garde à vue pendant quarante-huit heures parce qu'elles avaient une biellette de direction dans la voiture, mais pas de gilets jaunes – c'est d'ailleurs la seule infraction qu'on ait pu leur imputer – on se dit que l'arsenal juridique est largement suffisant !

Dès lors, notre inquiétude est aujourd'hui très grande à l'égard des mesures d'interdiction de manifester, droit aujourd'hui constitutionnellement garanti. Nous ne sommes pas très loin de la présomption de délit.

De plus, le droit existant permettait tout à fait d'interpeller des individus se livrant à la destruction de biens ou à l'atteinte à des personnes. Les centaines d'interpellations et de condamnations le prouvent.

Enfin, l'usage du flash-ball, ou LBD, comme arme de défense par les forces de l'ordre suscite une forte inquiétude. Vous n'êtes pas sans savoir que le Conseil de l'Europe a demandé une suspension immédiate de son utilisation. Comme l'indique la commissaire des droits de l'homme du Conseil de l'Europe, Dunja Mijatovic : « la tâche première des forces de l'ordre consiste à protéger les citoyens et les droits de l'homme ».

Je condamne évidemment les violences à l'égard des forces de l'ordre, mais suite à leurs actions, on dénombre plus de 200 manifestants blessés à la tête, 22 ayant perdu un oeil. Cinq ont eu la main arrachée, et une personne est décédée après avoir reçu une grenade lacrymogène en pleine tête alors qu'elle était sur le point de fermer sa fenêtre.

Nous nous inquiétons donc. Pouvez-vous nous indiquer comment vous comptez garantir le droit de manifestation pour tous, et assurer la sécurité de l'immense majorité de manifestants qui le font pacifiquement ?

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