Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du mardi 5 mars 2019 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

Je suis relativement choqué par ce que je viens d'entendre. Tout d'abord, Monsieur le ministre, cela ne fait pas deux ans que votre texte est en discussion, puisqu'il a été déposé en juin 2018. Ensuite, les accusations portées à l'encontre de nos collègues sénateurs manifestent un manque de respect pour leur travail. Lors de la CMP, les sénateurs nous ont fait une proposition : retirer la question la plus épineuse, c'est-à-dire la cession d'ADP. La CMP aurait pu être positive et conclusive. Si ce texte est aussi urgent que cela pour la vie des entreprises, pourquoi n'avez-vous pas saisi cette main tendue par les sénateurs ? Pourquoi n'avez-vous pas retiré l'article du projet de loi concernant ADP, ce qui aurait permis d'avoir une CMP conclusive ? Ne racontez pas d'histoires à ce sujet. Vous êtes les seuls responsables du fait que votre texte n'est pas encore adopté.

Cessez aussi de taper sur le législateur. Nous avons besoin de temps pour bien légiférer. Je ne suis pas d'accord avec cette petite chanson que le Gouvernement et la majorité font entendre : nous serions une gêne à l'action du Gouvernement et aux avancées du pays. En réalité, nous légiférons trop et mal car vous gérez très mal l'agenda. Pendant les travaux de cette commission spéciale, il y avait aussi l'examen du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable, dit EGALIM. Certains d'entre nous n'ont pas pu être présents dans l'hémicycle lors des débats sur ce projet de loi auquel nous étions attachés. Vous gérez très mal l'agenda : nous avons de longues périodes pendant lesquelles nous faisons des auditions puis, d'un seul coup, nous avons un embouteillage de textes législatifs. Balayez devant votre porte avant de vous en prendre aux sénateurs et au Parlement.

Quant au projet de loi PACTE, c'est un texte fourre-tout. Cette appréciation ne va pas vous plaire mais c'est malheureusement la vérité. On y trouve de tout : des périodes de soldes aux procédures collectives en passant par l'épargne retraite, la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations – CDC. Vous avez même ajouté la fin de la tarification réglementée du gaz.

C'est un texte qui se veut de simplification. En fait, la simplification est assez homéopathique. Le projet ne va pas vraiment changer les choses dans notre pays parce qu'il ne va pas assez loin sur certains points. Peut-être allez-vous enfin nous entendre et accepter de faire vraiment bouger les curseurs ? S'agissant des seuils, ceux de dix et cinquante salariés sont vraiment bloquants, et pas seulement celui de vingt salariés. D'ailleurs, vous ne touchez pas au code du travail.

Vous n'allez pas assez loin sur le forfait social et, de façon générale, sur la possibilité de développer l'intéressement dans les PME. Vous maintenez tous les statuts juridiques – entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, personne physique, micro-entreprise – et les créateurs d'entreprise sont perdus dans ce maquis. Quelle simplification apporte votre texte ? Je ne la vois pas.

Il pourrait même compliquer la vie des chefs d'entreprise en raison de la suppression des centres de formalités des entreprises – les CFE –, du stage de préparation à l'installation – le SPI –, du soutien des commissaires aux comptes en plus des experts-comptables. Quant à la redéfinition de l'objet de la société, elle est une véritable folie. Il n'est vraiment pas raisonnable d'obliger les entreprises de notre pays à agir en considération des enjeux sociaux et environnementaux. On peut accepter, à titre facultatif, que certaines entreprises modifient leur objet social. En revanche, cela n'a absolument aucun sens de l'imposer à toutes les entreprises du pays, quels que soient leur taille, leur mission et leur secteur d'activité.

Le texte soulève plusieurs questions. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez vendre ADP, une infrastructure essentielle et stratégique, et la FDJ. Ce n'est absolument pas rationnel : les dividendes actuels sont au moins équivalents à ce que va générer le fonds que vous allez créer. Je n'ai toujours pas compris l'intérêt de cette mesure, si ce n'est peut-être de diminuer l'endettement de notre pays.

Enfin, il a des lacunes. L'économie numérique, qui est supposée nous projeter dans l'avenir, est la grande absente de ce texte. Voilà ce que je voulais dire au nom du groupe Les Républicains.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.