Intervention de Jacqueline Gourault

Séance en hémicycle du lundi 11 mars 2019 à 16h00
Agence nationale de la cohésion des territoires — Présentation commune

Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales :

… là où les besoins en ingénierie, en copilotage, en soutien financier sont les plus grands, afin de leur apporter une aide sur mesure.

Cette politique différenciée, qui tient compte des spécificités de chaque territoire pour assurer son développement, est au coeur de l'action que je mène au ministère de la cohésion des territoires. Car, comme vous et moi nous le savons bien, tous les territoires ne sont pas égaux du point de vue des ressources – et je ne parle pas uniquement des moyens financiers. Dès lors, je vous le dis, je veux que l'État soit en priorité aux côtés des territoires les plus fragiles pour résorber les fractures territoriales de notre pays et pour aider à la réalisation de leurs projets.

Vous vous interrogez certainement sur la nature de cette aide sur mesure ; je tiens, là aussi, à clarifier plusieurs points.

L'ANCT pourra apporter un appui à la fois technique, par l'ingénierie, et financier. En effet, en coordonnant les services et les opérateurs de l'État, l'agence pourra mobiliser et surtout fédérer leurs ressources techniques et financières. Cet appui technique et financier sera complémentaire de celui que les collectivités territoriales ou le secteur privé peuvent eux-mêmes apporter. Sur ce point, qui a fait l'objet de nombreuses interrogations au Sénat, et même ici en commission, je tiens à être précise : l'intervention de l'agence sera bien complémentaire et non concurrente des ressources techniques et financières dont disposent les collectivités territoriales et leurs agences locales. Ainsi, cette intervention ne sera pas uniforme : elle se fera à la demande des élus. Là où il n'y a pas de besoin, là où les élus locaux ne souhaitent pas que l'agence intervienne, celle-ci ne le fera pas ; là où des besoins se font sentir, là où les élus souhaitent le soutien de l'agence en complément de leurs éventuelles ressources, elle interviendra. En la matière, l'ANCT fera donc du cousu main, en partant des volontés et des besoins locaux.

Cette approche, je tiens à l'affirmer, l'agence la mettra également en oeuvre à travers les actions auxquelles elle contribuera par les politiques publiques dont les territoires ont besoin. On pourrait citer, entre autres, la rénovation urbaine, le programmer action coeur de ville, la couverture mobile et numérique, les maisons de santé, la mobilité ou la transition écologique.

La création de l'ANCT relève avant tout d'un changement de méthode : elle permet de sortir d'une logique verticale, celle de l'État prescripteur qui aménage le territoire sur la base d'appels à projets, en créant des distorsions entre les grandes collectivités, qui disposent des capacités techniques pour y répondre, et les petites, qui ne les possèdent pas. La création de l'agence mettra fin à cette logique verticale et descendante pour lui substituer une logique horizontale et ascendante : à partir des besoins et des projets des élus d'un territoire, l'agence mobilisera les ressources techniques et financières de l'État ainsi que de ses opérateurs pour soutenir ces projets.

Au-delà de ces interrogations méthodologiques, je sais que les enjeux de périmètre de l'agence et de gouvernance mais aussi les outils financiers ont fait l'objet de questionnements.

En la matière, le Gouvernement est favorable à l'équilibre de la proposition de loi, à savoir l'intégration à l'agence, dès la promulgation du texte, d'une partie du Commissariat général à l'égalité des territoires, ou CGET, de l'Établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, ou EPARECA, et de l'Agence du numérique. Il s'agit d'un choix pragmatique et stratégique qui permettra à l'ANCT d'être rapidement opérationnelle pour soutenir les projets des collectivités territoriales ; au contraire, une intégration maximale, incluant par exemple l'ANRU, l'ANAH, l'ADEME et le CEREMA – Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement – , aurait alimenté de longs débats organiques en vue de fusionner des organismes aux statuts très divers, ce qui n'aurait pas manqué de nuire à l'action de l'agence. Or l'important, je crois, ce n'est pas les structures, c'est l'action et les politiques publiques que l'on mène.

La gouvernance de l'agence est un autre point qui ne manquera pas de faire débat. Alors que le Gouvernement était favorable aux équilibres figurant dans le texte initial, les sénateurs les ont bouleversés pour mettre en minorité l'État au sein de sa propre agence. Or, si le Gouvernement est tout à fait favorable à ce que les représentants des élus disposent d'une large place au sein du conseil d'administration de l'agence, ce n'est pas incompatible avec le fait que les représentants de l'État y conservent au moins la moitié des sièges. Au demeurant, une telle répartition ne paraît pas incohérente dans la mesure où l'ANCT sera une agence de l'État, composée d'agents de l'État et dont le budget sera établi à partir des crédits de l'État. Je me réjouis que les membres de votre commission du développement durable et de l'aménagement du territoire aient été sensibles à ces arguments et qu'ils aient accepté d'en revenir à l'économie générale de la proposition de loi initiale ; je les en remercie, nous y sommes très sensibles.

Au-delà de cet aspect, si je comprends que l'on souhaite une déclinaison au niveau local des instances de coordination, d'information ou de pilotage, je me suis toujours prononcée en faveur de la souplesse : les dispositions introduites en la matière ne doivent pas être source de rigidités dans l'action de l'agence. Par conséquent, si l'information des élus par le représentant de l'État m'apparaît légitime et même essentielle, elle ne doit pas passer par le truchement de dispositifs législatifs visant à décrire toutes les modalités de fonctionnement de l'instance d'information à l'échelon local, lesquelles me semblent évidemment relever davantage d'une circulaire. Sur ce point, je ne doute pas que les débats en séance publique nous permettront de trouver un équilibre satisfaisant et respectueux des exigences de souplesse comme de transparence.

Vous le savez tous, les mouvements de décentralisation et de déconcentration ont modifié le rôle de l'État, qui est passé d'une logique de prescription à une logique de facilitation. C'est dans cette optique que l'État se tient aux côtés des collectivités pour faire réussir nos territoires.

Nous avons identifié divers « irritants », comme on dit maintenant ; nous vous proposons de lever des freins. Avec cette agence, nous avons l'opportunité de créer un nouvel outil – j'insiste sur ce terme – lisible et fonctionnel, …

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