Intervention de Louis-Mathieu Gaspari

Réunion du mercredi 6 mars 2019 à 17h30
Commission d'enquête sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, qu'il s'agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale

Louis-Mathieu Gaspari, secrétaire général du Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG) :

Monsieur le président, je vous remercie d'avoir convié le groupe de liaison Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG) pour répondre aux questions de votre commission d'enquête.

Le CFMG est l'instance nationale de dialogue social de la gendarmerie. Créé en 1989, il compte 75 officiers et sous-officiers qui représentent la gendarmerie dans sa pluralité, statutaire, fonctionnelle et géographique. Ce modèle de dialogue interne constitue un point d'ancrage fort à la communauté militaire ; la gendarmerie a su l'adapter par touches successives depuis plus de trente ans.

Le CFMG est chargé d'étudier toutes les questions concernant les conditions de vie, d'organisation du travail ou d'exercice du métier militaire. Son action est parfaitement coordonnée avec le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), instance nationale de consultation et de concertation de l'ensemble des militaires.

Les onze officiers et sous-officiers du groupe de liaison ici présents ne sont que l'émanation du CFMG. Mus par la seule volonté de défendre l'intérêt général, ils portent fidèlement la voix des 100 000 gendarmes qui les ont élus. Parce qu'ils servent dans les unités opérationnelles, ils n'ignorent rien des difficultés qui existent sur le terrain ; parce qu'ils vivent au quotidien des engagements exigeants, ils ne manqueront pas de partager avec vous leurs expériences très concrètes et leur ressenti.

Pour eux, 2018 a été une année particulièrement riche, marquée par des engagements opérationnels d'ampleur : en métropole, face aux « zones à défendre » (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes, de Bure et de Kolbsheim ; outre-mer, à l'occasion de fortes tensions à Mayotte, en Guyane, en Nouvelle-Calédonie. Depuis le début du mouvement des « Gilets jaunes », le 17 novembre dernier, les gendarmes ont pris toute leur part pour protéger les institutions et la population. Le 8 décembre, 89 000 membres des forces de sécurité intérieure ont été engagés, dont 65 500 gendarmes. Cette mobilisation sans précédent a été rendue possible grâce à la disponibilité, la robustesse, l'organisation et le savoir-faire militaire de notre institution.

Cet engagement qui perdure depuis près de trois mois et demi est très éprouvant. Plus de 400 gendarmes ont été blessés, parfois dans des conditions de violence inouïe – je pense à nos deux camarades de l'escadron de Grenoble violemment agressés sur la passerelle Senghor à Paris. Certaines casernes, où nous travaillons et où habitent nos familles, ont également été attaquées, comme celle qui abrite le peloton d'autoroute de Narbonne ou celle de Dijon. Au quotidien, le gendarme, au service de nos concitoyens, exerce un métier exigeant qui peut aller jusqu'au sacrifice suprême. Quatorze officiers de gendarmerie dont le colonel Beltrame, ont été tués en 2018 dans l'accomplissement de leur devoir.

Les gendarmes, et tel est l'état d'eprit des membres du groupe de liaison, sont très pragmatiques et ne demandent qu'une chose : disposer des moyens humains et matériels pour rendre le meilleur service de sécurité aux Français.

Pour terminer, je souhaite vous faire part d'une inquiétude majeure qui prévaut actuellement dans les rangs de la gendarmerie : il s'agit de la réforme des retraites.

Ce n'est pas l'idée de réforme qui est en jeu, bien au contraire. Les militaires de la gendarmerie sont pleinement conscients de la nécessité de conduire une réforme sur ce sujet. Mais ils souhaitent que le futur système universel de retraite prenne en compte leur spécificité et surtout leur « militarité ». Cette réforme ne peut être engagée en ne prenant en compte que les missions, en faisant fi du statut militaire. Au motif que policiers et gendarmes relèvent du même ministère et accomplissent nombre de missions similaires, on voudrait leur appliquer les mêmes critères pour la retraite. Or l'article 1er de la loi du 3 août 2009 dispose que la gendarmerie est une force armée. Les missions exécutées par les militaires dans une gendarmerie doivent donc absolument être considérées selon une approche statutaire dont l'équation est simple : au regard de son statut, la communauté militaire dont les gendarmes font partie, possède moins de droits, moins de liberté, plus de devoirs et de sujétions, donc l'État leur doit impérativement des garanties spécifiques, notamment dans le calcul de la retraite.

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