Intervention de Michel Neugnot

Réunion du mercredi 13 mars 2019 à 9h35
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Michel Neugnot, vice-président du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, président de la commission Transports et mobilité de Régions de France :

Je partage les propos de M. Jean Rottner. La problématique de notre région est exactement la même. Personnellement, j'emploie l'expression « réenchanter les gares ».

Nous n'évoquons les gares, trop souvent, que lorsque des guichets sont supprimés, ce qui est inévitable à terme. Nous devons plutôt chercher à donner une nouvelle vie aux gares, qui sont d'anciens lieux de vie, en périphérie, bien sûr : le buffet de la gare, l'hôtel de la gare… Nous devons remettre du service dans ces gares grâce à l'intermodalité. Et ce débat doit obligatoirement avoir lieu avec les maires des communes concernées.

Nous ne devons pas avoir peur de la modernité et de l'évolution des technologies – nos billets deviendront des e-billets –, mais plutôt en profiter pour poser la problématique de l'avenir des gares ; c'est primordial.

Une question a été posée sur les conséquences d'un désaccord entre deux AOM. La contractualisation est justement là pour traiter les désaccords. Je suis favorable à la réintroduction des contrats opérationnels de mobilité.

En tant qu'architectes, les régions devront fixer les conditions d'organisation d'un bassin de mobilité. La région Bourgogne-Franche-Comté compte 104 intercommunalités et nous aurons entre 30 et 40 bassins de mobilité. Il appartiendra à la région de définir – par dialogue, par co-construction – dans quelles conditions les mobilités seront assurées, au-delà de ce qui est réalisé dans chaque commune ; ensuite, une contractualisation aura lieu.

Le comité des partenaires est essentiel et doit inclure les grands oubliés de tous les textes antérieurs, à savoir les entreprises. La mobilité du quotidien entre domicile et lieu de travail est essentielle, nous le voyons bien dans le mouvement des gilets jaunes : le sentiment prévaut que tout le monde n'est pas traité de la même façon, que certains territoires possèdent des systèmes performants, alors que d'autres n'ont rien du tout.

Le comité des partenaires doit représenter tous les acteurs et ne doit pas être trop strictement défini par la loi ; cette question doit être traitée bassin de mobilité par bassin de mobilité, car ce lieu doit être co-construit, suivi et adapté si nécessaire.

S'agissant de la « soudure tarifaire », des éléments existent déjà. M. Jean Rottner a évoqué l'électrification de la ligne 4, sur laquelle roulaient les trains d'équilibre du territoire (TET) et qui est gérée par la région Grand-Est, mais qui passe aussi en Bourgogne-Franche-Comté. Nous avons donc négocié les tarifs pour qu'ils soient alignés sur ceux des autres lignes qui traversent notre région ; des accords de réciprocité sont négociés dans chaque région.

Cependant, si nous voulons favoriser l'intermodalité, il convient de donner un avantage compétitif à ceux qui se déplacent via une chaîne de mobilité, n'utilisant pas, ou très peu, le véhicule automobile individuel.

Nous avons décidé, pour une quinzaine d'AOM possédant des systèmes de transport à l'intérieur de leur territoire, d'accorder 10 % de remise à l'usager qui utilise deux types de transport en commun. Par ailleurs, nous vendons des billets uniques. L'évolution des technologies permettra de mettre en place des systèmes très simplifiés. La « soudure tarifaire » existe déjà, elle est l'aboutissement d'une volonté politique entre deux régions.

Quant aux données, elles ne valent rien ; seule leur utilisation vaut quelque chose. Nous sommes donc favorables à ce que les données soient traitées par les AOM, dont les régions, qui les mettront ensuite à la disposition de ceux qui en ont besoin.

Une question se pose : quelle est la valeur de ces données ? Celles-ci ont-elles un intérêt général pour la puissance publique ? Des questions de droit doivent être traitées et le ministère est justement en train d'y travailler.

Ces données sont essentielles. Par exemple, nous sommes obligés de connaître les données des constructeurs automobiles – flux quotidiens par tranche horaire – pour créer des solutions alternatives qui répondent aux besoins des usagers.

Il est également nécessaire d'établir des règles pour le free floating, sinon c'est la jungle. Se pose en effet la problématique de l'utilisation de l'espace public. La règle actuelle autorise un vélo à rouler à 6 kmh sur un trottoir, en ville.

La loi d'orientation des mobilités a vocation à trouver le point d'équilibre, par le débat, entre les piliers du développement durable – environnemental, social et économique. Actuellement, chacun est arcbouté sur sa position, sans prendre en considération les deux autres piliers. L'application de la LOM dans les territoires, en co-construction, sera le moment de mener un débat citoyen pour trouver le bon équilibre. Équilibre qui sera différent d'un territoire à l'autre, d'un bassin de mobilité à l'autre.

Par ailleurs, la gare qui, comme vient de le dire M. Jean Rottner, deviendra le point d'intermodalité, devra être accessible. Et pour qu'elle le soit, des voies sécurisées pour les vélos et des espaces de stationnement sont à créer, tout comme des espaces réservés aux vélos dans les trains.

En Bourgogne-Franche-Comté, nous disposons maintenant de 34 abris sécurisés pour vélos dans des gares que nous avons choisies en raison de leur volume d'activité. Nous avons par ailleurs développé le site et l'application Mobigo, sur lequel les usagers peuvent trouver toutes les informations – de la voiture partagée aux stations de vélos – pour se déplacer en transports en commun dans la région. Toutes les AOM sont impliquées.

Un groupe de travail a été créé par trois ministres, suite au mouvement des gilets jaunes, pour apporter des réponses à ceux qui n'ont aucune solution de mobilité. Le rendu de cet exercice va nous être fait demain après-midi. Plusieurs sujets ont été abordés.

D'abord, le ticket mobilité pour ceux qui n'ont pas d'alternative à l'usage individuel de la voiture. Voici ce qui semble avoir été retenu : les entreprises devront être volontaires ; la distance devra être supérieure à 30 km ; le salarié devra toucher au maximum deux fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) pour être éligible. La région proposera aux entreprises volontaires de contribuer à ce ticket mobilité, à hauteur de 50 %. Nous avons arrêté le montant de 30 euros par mois, dont 15 euros seront donc payés par la région. En outre, dans un souci de simplification, nous proposerons que le montant figure sur une ligne de la feuille de paye.

Ensuite, le covoiturage organisé conventionné. Le covoiturage, pour des distances courtes, n'est pas économiquement équilibré et ne fonctionne pas, d'où la nécessité de l'organiser avec les entreprises et de le conventionner. L'incitation qui est donnée au conducteur ne doit pas être en lien avec ce que paie le covoituré. Pour que le covoiturage fonctionne, il doit être intégré dans les systèmes d'information multimodale, c'est-à-dire intégré en code API et non pas considéré, j'insiste sur ce point, comme une solution autoportée – ainsi que le souhaitent toutes les sociétés de covoiturage.

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