Intervention de Jean-René Cazeneuve

Réunion du mercredi 27 mars 2019 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-René Cazeneuve :

Cette proposition de loi vise à rétablir le pouvoir d'achat des Français. Voilà une cause que nous partageons. Depuis le début du quinquennat, nous avons oeuvré pour le pouvoir d'achat des Français, en rémunérant mieux le travail, en allégeant la fiscalité locale, particulièrement injuste, et en soutenant les personnes les plus fragiles.

Permettez-moi d'entrer un peu dans le détail, s'agissant des mesures que nous avons prises pour mieux rémunérer le travail. Nous avons supprimé les cotisations salariales maladie et chômage. C'est un gain de 1,45 % pour tous les travailleurs et cela représente 22 euros par mois pour un salarié au SMIC. Nous avons adopté une trajectoire d'augmentation de la prime d'activité sur la durée du quinquennat. C'est une incitation claire au retour à l'emploi et à une société qui se retrouve autour de la valeur travail.

Pour alléger la fiscalité locale, rétablir une plus grande justice en fonction des territoires, essentiels à notre République, nous avons supprimé la taxe d'habitation pour 80 % des ménages. Cela représente non moins de 80 milliards d'euros de pouvoir d'achat rendus aux Français sur trois ans. À partir de l'année prochaine, cela représentera 14 milliards d'euros par an.

Pour soutenir les plus fragiles, nous avons augmenté l'allocation de solidarité aux personnes âgées. C'est 100 euros de plus d'ici à 2020, comparé à 2017. Nous avons augmenté l'allocation aux adultes handicapés (AAH) : une personne seule percevra 900 euros en 2019, quand elle n'en touchait que 800 en 2017.

Lorsque les Français nous ont dit, avec fracas, qu'ils ne ressentaient pas suffisamment l'effet de ces mesures, nous sommes allés plus loin encore.

Fin décembre 2018, la prime d'activité a ainsi été revalorisée et le nombre de ses bénéficiaires a été augmenté. Pour une personne seule au SMIC, c'est un gain mensuel de 100 euros, cumulé à la hausse légale du SMIC. Les heures supplémentaires et complémentaires ont été défiscalisées et exonérées de cotisations et contributions sociales, à l'exception de la CSG et de la CRDS. Les primes exceptionnelles versées entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019 ont été exonérées de cotisations sociales salariales et patronales ainsi que d'impôt sur le revenu. Voilà 1 milliard d'euros qui ont été rendus aux Français, nets d'impôt. Enfin, la hausse de la CSG a été annulée pour une partie des retraités. Ainsi, 70 % des retraités en sont désormais exonérés. Et je passe sur toutes les mesures d'aide à la transition énergétique. Toutes ces dispositions ont un sens économique et social, au service d'une France forte.

En fait, il me semble que votre proposition vient à contretemps. Peut-être aurait-elle été utile sous le mandat de Nicolas Sarkozy ? Je vous rappelle en effet que c'est pendant cette période que la croissance du pouvoir d'achat a été la plus faible depuis le début de la Ve République… En tout état de cause, nous aurions pu comprendre son dépôt il y a encore un an, mais elle est sans fondement aujourd'hui, alors que l'INSEE vient de publier des chiffres – indiscutables – qui montrent en effet que le pouvoir d'achat des Français a augmenté de 1,1 % sur le seul dernier trimestre 2018. L'INSEE prévoit également une nouvelle augmentation du pouvoir d'achat des Français en 2019 à hauteur de 1,8 % ! Pour la première fois depuis dix ans, la pression fiscale pesant sur les ménages baissera de 0,5 point de PIB. Il y a donc, aujourd'hui, une augmentation significative du pouvoir d'achat des Français.

C'est un premier pas vers une société qui vit mieux, qui dépense plus, qui libère les plus entreprenants et protège les plus fragiles. Ce que nous avions proposé aux Français, nous l'avons fait, et nous continuerons à le faire, peut-être même davantage encore.

La famille politique que vous représentez, et que je respecte, me semble quelque peu désorientée. Alors que sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, les impôts avaient augmenté de près de 28 milliards d'euros, vous voulez maintenant accroître les dépenses publiques de 17 milliards d'euros ! Encore n'ai-je pas pris en compte les amendements que vous avez déposés en sus… Sans doute quelques-uns d'entre vous ont-ils entendu parler de ces livres pour enfants, qui s'intitulent Où est Charlie ? De même, je me demande ce qu'est devenu le ministre du budget qui disait : « La maîtrise de la dépense publique est notre priorité absolue. »

Certes, vous proposez de gager pour 20 milliards d'euros les mesures inscrites au sein de votre proposition de loi. Mais, après mainte relecture de votre texte, je constate qu'il n'y a pas le début du commencement d'une piste, même si vous vous êtes efforcé d'en dessiner quelques-unes dans votre exposé liminaire. Votre mot d'ordre semble être : « Je dépense maintenant » – voire hier, car certaines mesures ont un effet rétroactif – « et je ferai des économies… plus tard. » À moins que vous ne comptiez reprendre les propositions figurant dans le programme du candidat François Fillon, comme la baisse de 15 milliards d'euros des dotations aux collectivités ?

Entre 2007 et 2012, la dette a augmenté de 600 milliards d'euros, le déficit public de 51 milliards d'euros et la dépense publique de 16 %. En 2018, notre majorité a su démontrer son sérieux et respecter ses engagements européens : pour la première fois depuis plus de dix ans, nous avons réussi à baisser les dépenses publiques, les prélèvements obligatoires, le déficit public et à stabiliser la dette.

Nous croyons fermement en ces mesures qui respectent les grands équilibres budgétaires et sociétaux. Nous ne croyons pas aux effets d'annonce qui, au-delà d'effrayer les Français parce qu'ils entraîneraient en pratique des coupes budgétaires insensées, s'accompagnent rarement d'un droit de suite.

Nous voulons, quant à nous, augmenter le pouvoir d'achat tout en respectant les équilibres budgétaires, et continuer à transformer notre pays pour réduire les inégalités.

Certes, certaines de vos propositions ont retenu notre attention car elles font partie de nos objectifs : ne faut-il pas, effectivement, réindexer les petites retraites ? Comment continuer à baisser les prélèvements obligatoires ? Mais le groupe La République en Marche ne votera pas des mesures qui ne sont pas financées et qui aggravent les inégalités et déficits, comme nous le démontrerons. Ce n'est pas en ayant recours à des mesures inflationnistes et non ciblées, voire démagogiques, que vous améliorerez le pouvoir d'achat des Français. Le temps est au travail, les dispositions nécessaires pour compléter la palette au service du pouvoir d'achat des Français viendront. Soyez-en assurés.

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