Intervention de Arnaud Viala

Réunion du mercredi 27 mars 2019 à 8h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Viala, rapporteur :

Le groupe Les Républicains a choisi d'inscrire à l'ordre du jour cette proposition de loi visant à soutenir le fonctionnement des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) et à valoriser la profession de sapeurs-pompiers professionnels et l'engagement de sapeurs-pompiers volontaires. Ce texte est l'aboutissement d'un long travail mené avec plusieurs de mes collègues ; à cet égard, je tiens à saluer particulièrement Valérie Lacroute qui m'a accompagné tout au long de ce travail en assistant à l'ensemble des auditions que nous avons organisé, et qui a même animé des auditions auxquelles moi-même je n'ai pas pu participer.

Avec cette proposition de loi, nous souhaitons alerter sur une situation grave et urgente et proposer des solutions. Notre système de sécurité civile repose sur le dévouement de 40 000 sapeurs-pompiers professionnels, 195 000 sapeurs-pompiers volontaires et 11 250 personnels administratifs et techniques (PATS). Chaque année, les interventions des sapeurs-pompiers viennent au secours d'environ 5 % de la population française. Pourtant depuis plusieurs années, l'équilibre qui faisait des services d'incendie et de secours français un modèle a été fragilisé par plusieurs phénomènes. En premier lieu, on observe une perte de reconnaissance et un manque de protection des intéressés : en 2017, les sapeurs-pompiers ont été victimes de 2 800 agressions et 382 de leurs véhicules ont été endommagés. Alors que le nombre d'interventions croît sans cesse, nous ne prenons pas suffisamment en compte la fatigue et les risques qu'encourent nos sapeurs-pompiers dans l'exercice de leurs missions. En outre, on ne peut que constater un manque de moyens et d'investissement en faveur de la modernisation de certains SDIS dont le matériel se dégrade et les systèmes d'information sont désormais dépassés.

Il en résulte une difficulté croissante à recruter. Cette crise des vocations est aggravée par la démographie de notre pays dont le vieillissement de la population conduit inévitablement à davantage interventions dans des zones où demeurent de moins en moins de personnes actives susceptibles d'être volontaires.

Qui plus est, le droit européen ne prend pas correctement en compte les spécificités du volontariat. Le 21 février 2018, dans un arrêt dit « Matzak », la Cour de Justice de l'Union européenne, a estimé que la directive du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail s'appliquait aux sapeurs-pompiers volontaires belges. Or les implications de cette directive rendent quasiment impossible la conciliation du volontariat avec un emploi, menaçant ainsi l'existence même du volontariat. Il est urgent que le Gouvernement intervienne, même s'il est difficile pour la France de demander la renégociation d'une directive dont elle a été à l'initiative…

Mais notre pays n'est pas le seul dans cette situation. En Europe, 2,2 millions de sapeurs-pompiers ont un statut comparable à celui de nos sapeurs-pompiers volontaires. À titre d'exemple, en Allemagne, 94 % des sapeurs-pompiers sont des volontaires. Il est donc indispensable d'engager de toute urgence une initiative européenne sur ce point.

Le défi qui se présente à nous est prioritaire : il y va de la sécurité de nos concitoyens et de l'égalité entre les territoires. Dans ce domaine plus que dans tout autre, le maillage territorial se doit d'être le plus fin possible. Il s'agit aussi par la garantie de la présence des secours de proximité de préserver nos territoires ruraux, leur attractivité et leur activité économique.

Le Gouvernement annonce des rapports et des groupes de réflexion, mais la mise en oeuvre des propositions est sans cesse reportée. Comme le disait Clemenceau, si vous voulez enterrer un problème, nommez une commission… Cela ne doit pas être la stratégie du Gouvernement. Au-delà des divergences politiques, il est donc urgent d'agir pour répondre à l'inquiétude de nos sapeurs-pompiers et obtenir de nouvelles avancées.

La volonté qui sous-tend ce texte est d'améliorer le quotidien des personnes qui chaque jour risquent leur vie pour sauver celles des autres. La présente proposition de loi est donc composée de quatorze articles visant à accroître l'attractivité du volontariat en accompagnant les entreprises qui emploient des sapeurs-pompiers volontaires, en soutenant la formation et en permettant à davantage d'étudiants d'effectuer des stages au sein des SDIS pour susciter les vocations. Ensuite, elle tend à protéger et à soutenir les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires, aussi bien en matière de protection sociale, en réduisant leur durée de cotisation, qu'en matière de sécurité en renforçant les sanctions pour les outrages dont ils peuvent faire l'objet. Enfin, elle entend faciliter la modernisation des SDIS afin d'améliorer les conditions de travail des sapeurs-pompiers professionnels, en particulier par la mutualisation des systèmes d'information et la mise en oeuvre du numéro unique d'urgence.

Ainsi, nous pourrons garantir une meilleure conciliation entre l'exigence des missions, la vie personnelle et la vie professionnelle des sapeurs-pompiers. Hier a été adoptée la proposition de loi relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés de notre collègue Catherine Troendlé ; je souhaite que nous abordions ce texte dans le même esprit constructif, car cette proposition de loi porte sur un sujet qui nous concerne tous et dépasse les clivages politiques. Il s'agit d'un véritable enjeu de société : la promotion de l'engagement des citoyens. Notre objectif est également d'interpeller le Gouvernement sur les inquiétudes des sapeurs-pompiers. J'espère donc que nous aurons un vrai débat en séance publique le 4 avril prochain.

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