Intervention de Anton Maria Battesti

Réunion du jeudi 21 mars 2019 à 9h05
Commission d'enquête sur la lutte contre les groupuscules d'extrême droite en france

Anton Maria Battesti, responsable des affaires publiques de Facebook France :

Je souhaiterais d'abord, d'un mot, répondre à Mme O. Madame la députée, je faisais seulement référence à un principe de précaution, compte tenu de la sensibilité du sujet. J'ai seulement demandé un huis clos et je n'ai jamais envisagé de ne pas comparaître. Du reste, je viens régulièrement à l'Assemblée nationale, à la demande des députés, pour échanger avec eux sur ces sujets.

S'agissant de Christchurch, je souhaite étayer mes propos techniques. Il y a certains contenus, aujourd'hui, dont la suppression repose principalement sur le signalement, parce qu'ils sont difficiles à appréhender par la technologie : c'est le cas du discours, et notamment du discours de haine. Les machines ont certes fait des progrès spectaculaires et peuvent désormais détecter des phrases commençant par « Mort à… », mais il reste un cap à franchir dans ce domaine.

Sur d'autres types de contenus, en revanche, comme les images et vidéos terroristes ou pédopornographiques, le signalement est devenu totalement inutile, car l'intelligence artificielle permet d'agir de manière beaucoup plus efficace : aujourd'hui, 99 % des contenus de propagande terroriste sont d'abord détectés par la machine. Mais nous poursuivons nos recherches : lorsque des machines sont confrontées à une vidéo dans laquelle une arme à feu est en train de tirer, il faut qu'elles puissent déterminer si ce contenu doit être immédiatement surfacé à une équipe, voire bloqué. Nous avons déjà fait de grands progrès, mais il faut encore que les machines puissent comprendre qu'elles n'ont pas affaire à un jeu vidéo du type Call of Duty ou à un reportage sur une zone de guerre, mais bien à une situation de type Christchurch. Des progrès ont été faits, mais il faut être réaliste et je veux avoir un discours de vérité avec vous. Ne doutez pas, en tout cas, de notre détermination à avancer dans ce sens.

Je dirai un mot, pour finir, sur le 1er amendement. Facebook est une entreprise américaine, mais 85 % de ses utilisateurs vivent en dehors des États-Unis. Il n'est donc pas question d'exporter dans le reste du monde une disposition juridique de la Constitution américaine. Les règles du service sont fondées sur les grands principes communs de la démocratie libérale : la liberté, qui est limitée par la liberté des autres, et la sûreté des utilisateurs. Nous cherchons toujours un équilibre entre ces deux principes.

Je veux insister sur un point qui peut vous intéresser : les règles du service de Facebook sont plus strictes que la liberté juridique garantie par la Constitution américaine, et elles s'appliquent à tout le monde. Un Américain qui utilise Facebook aux États-Unis ne peut pas invoquer le 1er amendement : sa liberté d'expression, sur cette plateforme, n'est pas celle que lui confère la Constitution, parce qu'il est sur un service privé qui a ses propres règles et qui a décidé, pour des raisons qui lui sont propres, de limiter la liberté d'expression de ses utilisateurs. Par ailleurs, à chaque fois qu'une notification légale nous est faite sur des contenus, notamment via PHAROS, il est évident que la loi du pays doit être respectée. Et c'est d'autant plus facile quand il s'agit d'un État démocratique.

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