Intervention de Perrine Serre

Réunion du mardi 26 mars 2019 à 17h20
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Perrine Serre, rapporteure extérieure à la Cour des comptes :

Je voudrais apporter un complément au sujet du bornage et de l'évaluation, et de l'ordre dans lequel on procède – M. Jolivet a dit qu'il faut des certitudes pour borner. S'agissant des évaluations, le véritable enjeu porte sur les moyens et les priorités que l'on donne à l'administration. Elle est occupée à traiter d'autres priorités, et on ne se met donc pas autour de la table pour évaluer. On ne fait pas non plus de collecte des données. Or c'est important : il faut savoir analyser les données, certes, mais on doit commencer par les collecter d'une manière extrêmement fiable.

Une éclairante enquête sur place a été réalisée pendant plusieurs jours au sein d'un centre d'impôt pour les particuliers, dans une banlieue parisienne où l'on trouve plutôt des contribuables à hauts revenus. Nous avons demandé au service des impôts concerné de nous fournir un échantillonnage de dossiers – une trentaine – que nous avons examinés dans le détail, sur plusieurs années. Pour ce qui est des profils sociologiques, il ne s'agissait ni des plus hauts revenus, ni des bas revenus – quel serait l'intérêt, en effet, d'un crédit d'impôt si l'on ne paie rien au titre de l'impôt sur le revenu ?

Nous avons échangé avec toutes les strates de ce service des impôts. Les plus « cash » ont été les contrôleurs. Ils nous ont dit que ces dispositifs sont du pain bénit parce qu'ils sont compliqués. On sait où chercher, et il est évident que l'on va trouver quelque chose. Il faut préciser que les dossiers étudiés ne correspondaient pas à des situations de redressement fiscal – ou alors dans une infime minorité de cas – mais plutôt à des rectifications, sans remise en cause de la bonne foi du contribuable. Ce que nous avons constaté, c'est qu'il y a une très grande complexité de ces dispositifs, même s'ils améliorent au fil du temps – ils sont de plus en plus simples à utiliser.

En ce qui concerne la déclaration complémentaire de revenus n° 2042, il faut savoir que le dispositif « Scellier » représente 47 lignes différentes et 108 cases où l'on peut donner une information. Ce sont autant de possibilités de se tromper. Tout est parfaitement formulé, quand on lit avec attention ; pour un contribuable lambda, néanmoins, avoir à reporter tantôt un neuvième d'une réduction d'impôt et tantôt un neuvième de l'investissement est une source potentielle d'erreurs.

Parmi les vingt-neuf dossiers que nous avons examinés dans le détail – nous avons éliminé certains d'entre eux, qui nous paraissaient un peu hors normes –, neuf ne comportaient pas d'erreurs de report. Les autres ont donné lieu à des rectifications – ce n'était pas des erreurs graves. Quand les contrôleurs nous disent que c'est du pain bénit pour eux, on comprend pourquoi.

Dans 10 % des cas, on a constaté une utilisation de ce que l'on appelle la « mention expresse » : on remplit sa déclaration d'impôt, mais on joint une question écrite sur les renseignements à apporter. Il y a donc un véritable enjeu sur le plan de la complexité. Et je ne parle même pas des trois dossiers pour lesquels les contribuables avaient fait appel à des conseils rémunérés, mais se sont quand même fait prendre par l'administration fiscale.

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