Intervention de Damien Abad

Réunion du mardi 2 avril 2019 à 16h35
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDamien Abad :

Je crains malheureusement que ce projet de loi n'apporte qu'une réponse politicienne à un problème pourtant bien réel. En premier lieu, on parle d'une « taxe GAFA », mais il s'agit en réalité d'une taxe sur les entreprises numériques. En second lieu, on a beaucoup parlé de l'article 1er et très peu de l'article 2, alors qu'ils pèsent respectivement pour 400 millions d'euros – dans le meilleur des cas – et 1,8 milliard d'euros.

Enfin, bien que je ne mette pas en doute votre volonté réelle et sincère, monsieur le ministre, vous vous livrez, avec ce projet de loi, à un affichage politique qui vise à masquer un échec européen : on peut s'être mis d'accord à quinze, vingt-deux, vingt-trois ou vingt-cinq pays, la vérité, c'est que la règle de l'unanimité empêche tout accord européen et nous oblige à faire cavalier seul. Lise Magnier a d'ailleurs fort justement fait observer que, parmi les États réputés favorables à la taxe, certains avaient reculé, d'autres étaient attentistes, d'autres enfin n'avaient pas pris les décrets d'application ; le compte n'y est donc pas.

Par ailleurs, l'une de nos collègues de la majorité a prétendu que cette taxe allait nous permettre de financer les mesures décidées par le Président de la République en faveur du pouvoir d'achat : dois-je rappeler que nous avons d'un côté 10 milliards d'euros et, de l'autre, 400 millions d'euros au mieux, soit 0,03 % des recettes publiques ?

Au nombre des multiples problèmes que pose cette taxe figurent également la question de sa collecte, puis celle de son caractère provisoire : mis à part l'amendement du rapporteur proposant un rapport d'évaluation, quelle garantie a-t-on qu'il s'agit simplement d'attendre une solution à l'échelle de l'OCDE ? Pourquoi ne pas envisager une clause d'extinction pour sortir de ce flou, d'autant que nous ne savons rien de l'évolution de cette taxe puisque, a priori, l'OCDE ne s'appuie pas pour ses travaux sur le chiffre d'affaires.

Je pense également aux répercussions économiques, bien réelles, que pourrait avoir cette taxe. Lorsqu'Amazon répercutera le coût de la taxe sur les vendeurs tiers, des PME françaises qui vendent leurs produits sur la plateforme, nous serons face à un transfert de coûts que les entreprises, pour préserver leurs marges, répercuteront à leur tour sur le consommateur. Qu'en sera-t-il par ailleurs des entreprises traditionnelles qui doivent se transformer en plateformes numériques, sachant que certains analystes considèrent que cette taxe les freinera dans leur évolution ?

Enfin, après l'article 1er, ce projet de loi comporte surtout un article 2, qui est bel et bien un renoncement et transforme la trajectoire fixée en véritable zigzag, qui risque de nous faire passer à côté de l'objectif que nous nous étions fixé.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.